• Stay With Me (Max & Tul)

    Stay With Me
    Petit Mot De L'Auteure
    Attention ! Présence de lemon donc si vous n'aimez pas le citron où que vous n'avez pas l'âge d'en consommer, ne le lisez pas je ne vous en voudrait pas.

    — Tul où est-ce que tu vas ? Reviens ! 

    On était en ballade, on se promenait main dans la main sur ce chemin de la campagne thaïlandaise et tout était calme, silencieux et apaisant. Je ne comprends pas pourquoi soudain, il a lâché ma main et s’est mis à courir droit devant lui sans se retourner. Mon cœur tambourine, je suis terrifié alors que je vois l’homme de ma vie s'éloigner et je ne peux que l’appeler avant de me mettre à courir à mon tour pour le rattraper. 

    Le chemin est boueux et j’ai l’impression que plus je tente de le suivre, plus mes pieds s'enfoncent dans la Terre, plus mes jambes deviennent lourdes et rapidement j’ai l’impression qu’un poids y est accroché. Je ralentis alors qu’il s’éloigne de plus en plus et je sens la panique monter en moi.

    Je ne peux plus courir, j’essaye de marcher rapidement, de continuer à le suivre, mais, même ça, ça devient difficile. La peur menace de totalement me submerger et je sens mes yeux s’humidifier. 

    — Tul je t'en pris reviens, mes jambes ont un problème. 

    Mes jambes se raidissent soudain et je ne peux plus faire un seul pas, c’est comme si elles s'étaient transformées en bâton. Je suis immobile au milieu du chemin, complètement seul, Tul m'a laissé derrière lui sans même se retourner. J'ai le souffle court, les larmes aux yeux et je ne sais pas ce qui ne va pas avec mes jambes. Lentement, je baisse les yeux, la peur m'envahit de plus en plus et au moment où je vais enfin voir mes jambes.

    Je me réveille en sursaut, allongé dans le lit que l’on partage depuis presque huit ans maintenant. J’ai du mal à respirer parce que je sens encore la panique couler dans mes veines. Je pince l'arête de mon nez en fermant les yeux, espérant chasser ces images qui, maintenant que je suis réveillé, prennent tout leur sens. Je prends une profonde inspiration, avant qu’un poids sur mon épaule ne me fasse sourire, c’est un sourire tendre et douloureux à la fois. Je baisse les yeux et dans la semi-pénombre, je peux voir que Tul dort profondément, collé contre moi. Sa tête repose sur mon épaule, un bras coincé entre nous, le second est fermement enroulé autour de ma taille, le retenant contre moi. Puis en baissant les yeux, je remarque sa jambe qui passe à travers mes cuisses, elle doit sûrement écraser la mienne, mais ça ne me gêne pas, je ne sens rien du tout.

    Je soupire longuement avant de plonger ma main dans les cheveux de Tul, l’observant un moment en train de dormir, j’ai l’impression que c’est un Koala accroché à son arbre. C’est toujours étrange pour moi de le voir comme ça, car jamais auparavant, il ne s’était comporté ainsi. Avant, il refusait que je le prenne dans mes bras la nuit, il dormait dans son coin du lit, il n’aimait pas être collé contre moi, il aimait avoir de l’espace et pouvoir bouger comme bon lui semble dans son sommeil. Et puis, il y a eu cet accident, il avait failli me perdre et depuis que j’étais rentré de l’hôpital deux mois plus tôt, il s’était mis à dormir chaque nuit de cette manière, comme s’il avait peur que je disparaisse soudain.

    Je peux comprendre sa peur, parfois j’essaie d’imaginer comment j’aurais réagi, moi, si nos rôles avaient été inversés. Comment est-ce que j’aurais réagi si c’était lui qui avait eu cet accident ? Comment j’aurais réagi, si c’était lui qui s’était trouvé allongé dans ce lit d’hôpital ? Comment j’aurais réagi, s’il s’était retrouvé plongé dans le coma sans savoir s’il se réveillerait un jour ? Ces questions tournent en boucle dans ma tête et je n'arrive toujours pas à savoir comment j’aurais pu tenir le coup si j’avais été à la place de Tul. Ma main quitte ses cheveux et je glisse doucement mes doigts sur son front, sur le pli entre ses sourcils qui refuse de se détendre même quand il dort, sous ses yeux qui sont en train de devenir aussi noirs que ceux d’un panda. Je sursaute quand il s’agite, sûrement gêné par mes caresses, alors j’enlève ma main.

    Je soupire en passant ma main dans les cheveux, je n’ai presque aucun souvenir de ce qui s’est passé ce jour-là. Encore une fois, je fixe le plafond, essayant de m’en rappeler, d’avoir plus que de vagues flashs. J’avais rendez vous avec Tul, on avait prévu un dîner romantique et j’étais en retard, mais je n’arrive plus à savoir pourquoi j’étais en retard. Je me vois clairement traverser la rue en courant pour rejoindre le restaurant où mon amour devait déjà m’attendre depuis un moment. Il y avait alors eu de crissement de pneus, l’impression de voler, la douleur et enfin le néant. 

    J’ai lu beaucoup de témoignages, disant que les gens dans le coma pouvaient entendre et sentir leurs proches près d’eux. Moi, c’est comme si j’étais plongé dans un océan de noirceur, je n’avais aucune conscience, ni de mon corps, ni de mon entourage, j’étais juste inconscient. Je me suis finalement réveillé avec le bip incessant des machines qui me surveillaient à l'hôpital. Outre ce bruit dérangeant, la première chose que j’avais senti, c’est la main de Tul dans la mienne. L’expression qu’il a fait quand il a vu mes yeux s’ouvrirent reste gravée dans ma mémoire, un mélange de soulagement, de joie, de peur et de colère. Je n’ai compris cette expression que quelques heures plus tard, quand les médecins m’ont annoncé que j’étais plongé dans le coma depuis presque quatre mois et que mes jambes n'étaient maintenant plus que deux poids morts au bout de mon corps.

    Je sens soudain la colère m’empêcher de respirer, c’est une bouffée brusque, violente. Généralement dans ces moments-là, je me mets à frapper violemment mes cuisses inutiles jusqu’à ce que Tul m’arrête. Il a peur que je finisse par me faire mal, mais moi, c’est tout ce que j’attends, ressentir la douleur et ne plus voir ces deux morceaux de viande en train de devenir deux sacs d’os. 

    Je soupire une nouvelle fois, mon corps se contracte alors que j’essaie de réprimer cette frustration. Tul s’agite contre moi, son bras agrippe mon t-shirt, son visage se crispe de peur et il tente de se rapprocher encore plus de moi avant de murmurer dans son sommeil.  

    — Reste avec moi Max, ne me quitte pas... 

    Mon cœur se serre, je sens les larmes me monter aux yeux car je sais que même s'il se montre fort, la situation le bouffe petit à petit et que c’est totalement à cause de mon comportement, qui devient de plus en plus sombre au fil du temps.

    J’aimerais être aussi fort qu’avant mon accident, j’aimerais réussir à accepter ce qui s’est passé et à reprendre ma vie en main. Surtout qu’il y a de l’espoir, du moins c’est ce que me vendent les médecins à chaque fois qu’ils me voient. Selon eux, je suis en vie, et ce fait tient déjà du miracle, et mes chances de guérison totale sont très élevées, il suffirait que je suive avec attention ma rééducation pour que dans quelques mois je puisse recommencer à marcher. J’aimerais les croire, mais je n’y arrive pas, pas quand je me sens tellement diminué au quotidien.

    Avant, j’étais une personne active qui ne tenait jamais en place, j’adorais faire du sport et partir en randonnée le week-end pour découvrir de nouveaux coins. Et puis surtout, je suis indépendant, je me suis toujours débrouillé seul sans compter sur l’aide de quiconque, parce que je suis celui qui s’occupe des autres. J’ai toujours été le soutien et j’ai du mal à être aujourd’hui devenu un poids pour Tul. 

    Pour lui, j'aimerais aller mieux, j’aimerais surmonter la dépression, voir la vie du bon côté et réussir à accepter d’être dans une chaise roulante. Seulement, voilà deux mois que je suis à la maison, cinq mois que je suis réveillé et huit mois que j’ai eu mon accident et pourtant, je n’y arrive pas. Cet état exacerbe alors ma plus grande peur, celle qu’un jour Tul se lasse de me voir diminué, qu’il ne supporte plus mon mauvais caractère et qu’il fasse ses valises et me quitte, me laissant alors définitivement seul.

    Je pousse un grognement de frustration, je dois arrêter d’y penser sinon je vais devenir dingue. Je veux me rendormir et rêver que je marche à nouveau et que ma situation actuelle n’est qu’un horrible cauchemar. J’ai soif, ma gorge est sèche, alors j’essaie de me redresser un peu pour atteindre la bouteille d’eau sur ma table de chevet. J'étire le haut de mon corps, mais Tul m’empêche de trop bouger et je ne veux pas le réveiller, il est épuisé et à besoin de dormir. J’arrive à la toucher du bout des doigts, mais elle est légèrement trop loin. Je fais un petit effort de plus et grogne quand au lieu de la saisir, mes doigts l’éloignent davantage, je…

    — Max tout va bien ? 

    La voix ensommeillée de Tul s’élève dans la chambre et je sursaute légèrement. Lui qui avait un sommeil de plomb avant, s’est réveillé alors que j’ai à peine bougé. Je ressens une nouvelle vague de culpabilité quand je me rends compte de combien mon accident a changé sa vie, l’a rendu anxieux et nerveux. Je suis responsable de ça, si seulement, j’avais regardé avant de traverser la route, on n’en serait pas là tous les deux.

    — Ce n’est rien Tul, je voulais juste prendre la bouteille d’eau, tu peux te rendormir. 

    Je veux juste qu’il se rendorme, qu’il fasse une nuit complète sans s’inquiéter pour moi, mais je sais que c’est impossible pour le moment. Il se redresse sans attendre, il se met à genoux et passe par-dessus mon corps pour attraper la bouteille à ma place. Et j’ai soudain une grande révélation, sur pourquoi je me sens tellement en colère, je suis jaloux, c’est bien là le problème en fait, je suis jaloux qu’il puisse utiliser ses jambes et pas moi. 

    — Tiens, j’aurais dû la laisser plus proche, excuse-moi. 

    Il me tend la bouteille, mais je sens tout mon corps se crisper quand il s’excuse. Comme s’il avait commis la plus grande des erreurs alors qu’il se montre parfait depuis mon réveil, non c’est juste moi qui suis un con, qui n’arrive pas à voir la chance que j’ai d’être en vie, d’être resté près de lui. Alors, comme à chaque fois que je m’adresse à lui ces derniers temps, c’est d’un ton sec et désagréable.

    — J’aurais pu le faire tout seul. 

    Je prends rageusement la bouteille de ses mains et je ne le regarde même pas, je ne le remercie pas non plus. Je me contente d’ouvrir la bouteille et de boire plusieurs longues gorgées d’eau fraîche. Boire m'éclaircit un peu les idées, mais elle n’arrive pas à améliorer mon humeur.

    — Je voulais juste t’aider. 

    Sa voix est triste, je le sais qu’il veut m’aider, je le sais qu’il prend beaucoup sur lui et qu’il voudrait juste me voir sourire et aller mieux. Je tourne le haut de mon corps brusquement vers lui. Je remarque qu’il tressaille légèrement, mais je suis trop en colère pour que ça puisse me calmer et une fois encore, je fais le con.

    — Et moi je ne t’ai rien demandé, alors arrête de me coller un peu et laisse moi souffler. 

    Je m’en veux dès que les mots sortent de ma bouche. J’aimerais pouvoir les ravaler, mais c’est trop tard. Il garde la tête baissée, mais malgré la pénombre, je peux voir que son visage est fermé, le silence s’éternise, il devient pesant et je souffle pour éliminer un peu la tension qui grandit entre nous. 

    J’attends qu’il explose comme avant, quand je dépassais les bornes et qu’il estimait que je ne devais pas le prendre pour acquis. Il m’aurait fait la tête pendant des jours jusqu’à ce que je m’excuse pour mon comportement. Là j’entends un sanglot étouffé sortir de sa gorge, puis sa voix basse et blessée me parvient. Ma colère disparaît totalement, il ne reste plus que la culpabilité, mais c’est trop tard pour faire marche arrière maintenant. 

    — Excuse moi… je… tu ferais mieux de dormir. 

    Il fait alors une chose qu’il n’a pas fait depuis deux mois, il se rallonge en me tournant le dos, s’éloigne le plus loin possible de moi et ne bouge plus. Je sais qu’il ne dort pas, je sais qu’il est en train de craquer seul dans son coin. Ces derniers temps, la tension est forte dans notre couple, on est tous les deux à fleur de peau et là je sais que c’est moi qui l’ai poussé à bout. Je l’entends renifler le plus silencieusement possible et je tends la main dans l’idée de lui caresser l’épaule pour essayer de rattraper le coup. Je sais que ce ne sera pas suffisant, que même si je fais tout pour le repousser, je ne veux pas qu’il quitte ma vie.

    Je lui ai demandé de me laisser souffler, mais la distance qu’il a instauré entre nous est soudain beaucoup trop dure à supporter. Je veux qu’il revienne se lover contre moi, je veux sentir le poids de son corps écraser le mien. Il ne reviendra pas cela dit, cette fois c’est moi qui doit faire le premier pas et essayer de réparer ce que j’ai cassé. Le vide au milieu du lit est glacial et je sais que je suis le seul à pouvoir le réchauffer. Je soupire avant de bouger lentement mes jambes avec mes mains pour les rapprocher de lui, ensuite je bascule mon corps sur le côté, mais je suis encore trop loin de lui. 

    J’enroule mon bras autour de sa taille et s’il ne bouge pas, je sais qu’il attends de voir ce que je vais faire, alors quand je l’attire pour qu’il me rejoigne, il se laisse faire et rapidement, son dos est collé contre mon torse, nos corps sont collés l’un à l’autre au milieu du lit. Je prends une profonde inspiration et son odeur m’envahit, ce qui me fait prendre conscience d’une chose, depuis deux mois que je suis rentré de l'hôpital c’est la première fois que je prends l’initiative de le prendre dans mes bras. Tul le fait tous les jours, en permanence, mais moi, jamais.

    — Je n’aurais pas dû te parler comme ça… je suis désolé. 

    Il renifle et essuie les larmes qui ont coulé sur ses joues. Je me mordille la lèvre inférieure avant de sourire quand je le sens hausser les épaules. Il est maintenant boudeur et je retrouve le Tul d’avant mon accident, j’espère le voir se mettre en colère, mais encore une fois, il ne le fait pas.

    — C’est pas grave je ne t’en veux pas. 

    Pourtant tu devrais m’en vouloir mon amour. Je suis tellement horrible avec toi. C’est ce que je pense quand d’un revers il balaie toutes mes mauvaises actions. Je pose mes lèvres sur son épaule et y dépose un tas de petits baisers jusqu’à ce qu’il frissonne. C’est alors que je me rends compte d’une deuxième chose. Depuis deux mois que je suis rentré de l'hôpital, je ne l’ai pas touché de la sorte. Je sais qu’il a envie que je le touche, j’en ai envie aussi, mais chaque fois qu’il a tenté une approche, je l’ai repoussé de plus en plus méchamment.

    — Tu devrais pourtant, j’ai besoin que… que tu sois moins conciliant avec moi.

    C’est sûrement étrange de demander ça, mais j’ai besoin de l’homme que j’aime, avec son mauvais caractère pour me secouer quand j’en ai besoin, pas de quelqu’un toujours d’accord avec moi, qui se rabaisse pour ne surtout pas me froisser. 

    — Je t’aime Tul, je t’aime tellement. Mais je t’en prie, plus que tout, j’ai besoin de toi, du vrai toi, sinon je sens que jamais je ne remonterai la pente.

    Ma main se pose sur sa joue et je fais en sorte qu’il tourne son visage, sans attendre, je saute sur ses lèvres, l’embrassant passionnément et c’est ainsi que je fais une dernière constatation douloureuse. Depuis deux mois, que je suis rentré de l'hôpital je peux compter sur les doigts de la main les moments où l’on s’est embrassé de cette manière et une fois encore, c’est la première fois que c’est moi qui l’embrasse en premier. Notre baiser s’éternise, généralement ce genre de baiser nous amène toujours à faire l’amour. Mais pas ce soir, ni aucun autre soir d’ailleurs, car depuis mon réveil, je n’ai pas eu la moindre érection, je sais d’avance, que je ne pourrai plus le satisfaire de cette manière et je sais qu’un jour malgré ce qu’il peut en dire, ne plus être satisfait deviendra un autre poids à notre relation déjà bien alourdie.

    — Laisse-moi te tenir dans mes bras pour cette nuit d’accord ? 

    Je veux être celui qui le réconforte, celui qui le protège, même si c’est juste de mes sautes d’humeur et des cauchemars. On s’endort rapidement, apaisé que j’ai réussi à faire le premier pas pour apaiser les choses. Pourtant avant de m’endormir, je sais que malgré toute ma bonne volonté, demain je serai encore au plus bas, demain je le blesserai un peu plus et je me déteste encore plus à cause de ça. Je suis devenu un incapable et je pense toujours sérieusement qu’il devrait me quitter.

    Après cette nuit-là, on a vécu presque une semaine calme et apaisée, je suis plus calme, moins en colère et je me focalise sur la rééducation. Tul m’assiste beaucoup moins et je pense, j’espère, que l’on est en train de trouver un équilibre. D’ailleurs, j’ai été heureux aujourd’hui de le voir sortir, prendre du temps pour lui, même si j’ai noté son petit regard inquiet avant de finalement fermer la porte pour rejoindre ses amis qu’il n’avait pas vu depuis des semaines. 

    Je reste un moment immobile dans ma chaise roulante à observer la porte, ressentant une nouvelle fois cette pointe de jalousie qui me serre le ventre. Je veux prouver à Tul que je peux faire quelque chose pour lui, que je ne suis pas aussi inutile que je ne le pense, je veux lui cuisiner un bon repas. Qui sait, après on pourrait se mettre tous les deux dans le canapé et passer la soirée en regardant la télé dans les bras l’un de l’autre.

    Je fais rouler mon fauteuil jusqu’au frigo et quand j’ouvre la porte, j’ai un petit sourire en coin. Les étages du haut sont complètement vides et Tul a tout organisé pour que je puisse accéder à tout ce dont j’ai besoin. Je sens mon cœur s’épanouir alors que l’amour que j’ai pour lui grossit un peu plus, laissant répandre une agréable chaleur dans mon torse.

    Je veux lui préparer une recette toute simple, mais déjà, réunir tous les ingrédients me demande une éternité et je suis épuisé avant d’avoir commencé. Je sens l’agacement commencer à me gagner, mais je me raccroche à l’image de Tul, heureux quand il aura juste à se mettre les pieds sous la table quand il rentrera.

    Je fulmine, rien ne se passe comme je le veux, rien n’est adapté pour moi, le comptoir est beaucoup trop haut et je me suis déjà coupé deux fois en essayant de couper les légumes. Et puis quand j’ai voulu faire cuire la viande et cuire les nouilles de riz, je ne pouvais pas voir ce que je faisais. Je sais que c’est dangereux, mais je veux cuisiner pour lui et je suis bien décidé à réussir. La porte s’ouvre et Tul entre avec un merveilleux sourire sur le visage, mais il disparaît petit à petit quand il aperçoit le carnage qu’est devenu la cuisine. 

    — Max… qu’est-ce que… 

    Il me fait un petit sourire en coin et malgré le fait que j’ai complètement raté mon projet, je peux voir combien il est heureux. 

    — Tu veux que je t’aide à finir ?

    Je suis excédé, je n’ai pas réussi, en plus Tul va s'épuiser à ranger et à nettoyer alors que le but était de lui faire plaisir. 

    — J’en ai vraiment marre de toute cette merde. 

    Je balance la poêle que je tiens encore à la main dans un accès de rage, de l’huile chaude jaillit et une partie retombe sur mon bras en me brûlant. 

    — Bordel !

    — Max ! 

    Tul se précipite vers moi, ayant soudain de l’inquiétude sur le visage. Il saisit mon bras qui est en train de me lancer. 

    — Pourquoi tu as fait ça, tu aurais pu te blesser gravement.

    Et alors qu’il essaie de mettre un linge humide sur mon bras, je ne peux pas m’empêcher d’éclater de rire. 

    — Tu veux dire plus grave que de ne plus pouvoir marcher. 

    Et voilà, la période douce est clairement finie, à la différence que cette fois, Tul ne semble pas prêt à s’excuser, son visage se durcit et mon cœur accélère. Il jette le linge humide contre mon bras avant de couper le gaz sous les aliments. 

    — Viens, je vais t’aider à te laver. 

    Il saisit les poignées de mon fauteuil et, sans un mot de plus, il le dirige vers la salle de bain. Il referme la porte derrière nous et la tension qui a disparu tout au long de la semaine réapparaît en l’espace de quelques minutes. Je sens la colère, la jalousie et la peur de retour, elles m'étouffent et ma respiration se fait laborieuse tout au long de ma douche qui se fait dans le plus grand des silences.

    Tul m’a déposé sur le lit le temps d’aller chercher une serviette pour mes cheveux et de la crème pour mon bras. Je suis allongé sur le dos, appuyé sur mes coudes, juste habillé d’un caleçon. 

    — Je vais passer de la crème sur ton bras et je t’aiderai à t’habiller. Ensuite… on ira manger un bon repas et ça ira mieux demain. 

    Il revient dans la chambre avec la serviette sur son épaule, la crème dans la main et il se dirige vers mon armoire. Seulement, je sais qu’il est encore en colère car il ne me regarde pas.

    Je sais que je le blesse encore et encore, je sais qu’il essaie de faire front pour nous deux avec ce qui nous arrive. Mais je n’y peux rien, la colère bouillonne et elle explose parfois en me faisant lui hurler dessus, et puis d’autres fois en étant froid comme là quand j’ouvre finalement la bouche. 

    — Tu ferais mieux de partir, de tenter ta chance avec un homme qui pourra marcher, qui pourra prendre soin de toi et dont tu ne sera pas l'infirmière à domicile.

    Sa mâchoire se crispe et ses yeux me lancent des éclairs quand il comprend ce que je sous-entends. Il se tient là, au milieu de la chambre, et je comprends alors qu’il ne compte pas se rabaisser, qu’aujourd’hui, il sera le Tul que j’aime tant et je ne sais pas comment les choses vont finir, mais j’ai l’impression que l’on se trouve aujourd’hui à un tournant de notre histoire.  

    — Tu es vraiment un connard, tu sais. Tu penses vraiment que je suis avec toi pour tes jambes, hein ? C'est toi tout entier que j'aime.

    La tension grimpe d’un niveau quand j’éclate soudain d’un rire sombre, j’ai l’impression de perdre la tête, parce que là tout de suite, j’ai envie de lui faire du mal, de le voir s’effondrer pour que peut être il puisse comprendre ne serait-ce qu’un dixième ce que je ressens à être cloué dans ce putain de fauteuil. 

    — Arrête d’imaginer que notre vie va redevenir comme avant Tul. Arrête d’être naïf à ce point, huit mois que je ne t’ai pas touché et plus jamais je le referai. Tout ce que je peux t’offrir c’est un amour d’écolier de primaire.

    Je suis en train de me torpiller tout seul, mais au fond je sais pourquoi je suis en train de lui dire tout ça. Je suis en train de le tester, je veux avoir la confirmation que, si mon corps est amoindri, alors forcément il ne voudra plus de moi, c’est dans la nature des choses, car moi, ce corps, je ne supporte plus de vivre avec. Alors je lui offre une porte de sortie et de nouveau je suis partagé entre ce que je veux. Je le veux heureux et n’ayant pas à s’occuper d’un infirme, mais je ne veux pas qu’il me laisse seul et qu’il m’abandonne.

    Ses yeux lancent des éclairs et il me lance la serviette qu'il tient, je la rattrape d'une main et je me demande comment il va réagir. Contrairement à ce que j’ai cru, il ne part pas, au contraire il se rapproche du lit, il monte dessus et me surplombe. Je me retrouve à avaler ma salive mal à l’aise car son regard s’assombrit au fur et à mesure qu’il approche de moi. Il attrape fermement ma nuque et me force à me redresser pour me rapprocher de lui, nos nez se touchent et il se met à parler d’une voix basse et froide. 

    — Alors c'est ce que tu penses de moi... Que je suis avec toi juste parce que je veux me faire baiser ?

    Je le sens trembler de colère et malgré tout, il y a de la souffrance dans son regard, une fois encore je me sens coupable d'être allé si loin. Pourquoi je ne peux pas juste remonter la pente, accepter le fait que mes jambes sont fichues, mais que Tul va rester à mes côtés coûte que coûte malgré tout.

    — Arrête de me repousser Max, je t'aime avec ou sans tes jambes et même si on ne doit jamais refaire l'amour. Je veux juste être près de toi.

    Mon cœur s'emballe, ses mots, il me les a déjà dit des millions de fois depuis mon réveil mais jamais avec cette note désespérée dans la voix et j'ai soudain peur que finalement il craque. Je suis en train de le pousser à bout et un jour il va réellement partir, je ne veux pas qu’il disparaisse de ma vie. Il est à moi, l’homme de ma vie, mon âme sœur. 

    — J'ai peur que tu réalises que je ne suis qu'un poids mort pour toi. Que tu me quittes parce que je ne peux plus rien t'apporter. Je ne peux plus rien faire pour toi, je ne peux pas te protéger, je ne peux pas t'emmener en vacances comme on l'avait prévu et je ne peux plus te donner de plaisir. Je ne sers plus à rien Tul.

    C'est la première fois que je dis tout haut ce que je pense tout bas depuis que j'ai appris que je ne pourrais plus me servir de mes jambes. Ma voix se brise au fur et à mesure que je parle et mes yeux me piquent des larmes que je retiens depuis des semaines. Le visage de Tul s’adoucit quand il m’entend parler, son corps se relâche et sa poigne sur ma nuque se desserre. Il me fixe droit dans les yeux avant de répondre calmement, presque tendrement. 

    — Mon amour, tu penses vraiment que je sors avec toi pour ça. Tu penses que je suis avec toi pour que tu me protèges ? Pour que tu me paies des voyages ? Pour que tu me fasses l'amour ?

    Il soupire profondément avant de me lâcher et de quitter le lit. Mon cœur s’emballe, j’ai la nausée, ça y est, on y arrive, il va me quitter. Une larme coule sur ma joue et je cherche ce que je pourrais dire et faire pour l’empêcher de me quitter, même si je n’ai pas arrêté de le supplier de le faire ces dernières semaines. Je lève un sourcil quand je le vois se diriger vers mon armoire et en sortir une cravate que je n’ai pas utilisé depuis longtemps. Il me regarde un instant tout en faisant glisser le tissu entre ses doigts puis il revient vers moi. 

    — Je suis terrifié à l’idée de te perdre, que tu t'éloignes de moi. Je sais que tu veux faire tout ça pour moi, mais moi aussi je veux le faire pour toi. Je veux te protéger, je veux te voir heureux et que l’on découvre le monde ensemble. Et puis, je peux être celui qui, jour après jour, te donnera du plaisir, Max.

    Il parle d’un voix nonchalante alors qu’il se livre et mon coeur s’accélère, j’ai l’impression d’avoir oublié depuis trop longtemps que notre couple est comme ça, on se soutient l’un l’autre, on fait les choses ensemble et jusqu’ici ça avait toujours marché. Il monte de nouveau sur le lit sans me quitter des yeux avant de venir s’installer sur mes cuisses endormies. 

    — Même si tu ne veux pas l’entendre, les médecins ont dit que tout marchait parfaitement bien en bas, mais que c'est toi qui te bloque. Alors laisse-moi te débloquer Max et te prouver que même sans tes jambes, tu peux me combler de toutes les manières possibles et inimaginables.

    Sa voix se fait suave et langoureuse et un long frisson court le long de ma colonne vertébrale. Il me lance un regard qui fait contracter le bas de mon ventre. Mon cœur bondit quand il attache la cravate autour de mes yeux me plongeant dans le noir. 

    — Maintenant laisse-moi te faire ressentir les choses mon amour.

    Sa bouche s’écrase sur le coin de ma lèvre, avant que sa langue glisse le long de ma mâchoire.

    Cela fait des mois que cette situation ne s’est pas présentée, habituellement, je repousse Tul quand il commence à me faire des avances, mais là, il est tellement dominant, que je ne peux que me laisser faire. Je suis surpris de remarquer que j’aime être comme ça, que j’aime sentir mon coeur au bord des lèvres, j’aime sentir ma respiration se faire plus rapide à cause de l’anticipation, alors que le désir s’éveille au creux de mon ventre. 

    Je le sens bouger au-dessus de moi, je sens sa présence sur le lit, mais je ne sens rien sur moi. Je fronce les sourcils me demandant ce qu’il est en train de faire et je finis par craquer et lui demander ce qu’il fabrique au-dessus de mes jambes. 

    — Tul ? Qu'est-ce que tu fais ?

    — Ne dis rien Max, laisse-toi faire, détends-toi et ressens. 

    Je ne réponds rien, je me contente de hocher la tête et de lui obéir, même si je ne suis pas sûr qu’il me voie faire. J’essaie d’imaginer ce qu’il est en train de faire actuellement. Dans ma tête, je le vois partir de mes pieds, les caresser, les masser, embrasser ma peau et même la mordiller tout en remontant lentement.  L’image est tellement claire dans ma tête qu'elle me donne l’impression de réellement sentir ses lèvres et ses mains sur ma peau jusqu’à ce que… 

    — Ahn…  

    Soudain, je ressens une chose étrange qui fait que mon souffle et mon coeur accélèrent brutalement. 

    — Juste la... Encore... 

    Je suis surpris mais Tul recommence, il mordille la peau de ma cuisse droite avant de la masser fortement et j’éclate de rire car je ressens une drôle de sensation. C'est comme si ma peau était complètement endormis après une anesthésie chez le dentiste, mais cette zone n’est pas aussi morte que je le pensais.

    Il ne fait aucune remarque, il continue de me masser, de m'embrasser et de mordiller cet endroit ce qui finit par me donner le souffle court et m’envoyer des décharges dans tout le corps. Finalement, il abandonne ma cuisse pour remonter et capture mes lèvres dans un baiser passionné. J’y participe avec envie, ayant l’impression de le faire pour la première fois, mes mains que je gardais sagement le long de mon corps s'accrochent à son dos et je me plonge dans son étreinte. Ses baisers glissent sur ma joue pour arriver à mon oreille, il en mordille le lobe avant de chuchoter une phrase qui m’envoie une décharge de plaisir directement dans mon sexe qui contrairement à ces derniers mois, n’est plus aussi mou qu’avant. 

    — Maintenant, laisse-moi éveiller le reste de ton corps.

    Je me mords la lèvre inférieure et je bascule la tête en arrière pour lui laisser toute la place dont il a besoin alors qu'il dévore mon cou, sa main caresse ma gorge, la pressant un peu quand il suçote ma peau. Il doit me laisser plusieurs suçons et ne se montre satisfait qu'au moment où un râle passe la barrière de mes lèvres.

    Je soupire quand ses mains se posent sur mes épaules et qu'il les masse, détendant chaque muscle avant de laisser ses mains glisser le long de mes bras. Il saisit mes mains et les garde un moment dans les siennes avant d'en embrasser la paume avec douceur. Chaque fois qu'il me touche avec ses mains ou ses lèvres j'ai l'impression que mon corps s'embrase, qu'il prend feu et même longtemps après son passage ma peau reste brûlante. Je grogne et mon bas ventre se contracte délicieusement quand il me suce l'index et le majeur de ma main gauche, imitant à la perfection une fellation. 

    — Tul ! 

    Une supplique haletante sort de ma bouche. Je bouge le haut de mon corps à la recherche de plus de contact, j’ai du mal à croire qu’il réagisse si fort à son toucher. C’est comme si l’homme au-dessus de moi avait trouvé la cellule où je maintenais le désir enfermé à double tour dans ma tête. C’est comme si, juste avec quelques caresses bien placées, il avait trouvé le moyen de le libérer et que ce dernier se répandait à toute vitesse dans chaque cellule de mon corps.

    — Ne t'inquiète pas Max, tout va bien. Tu es magnifique mon amour. 

    Sa voix me fait vibrer et quand il me lâche les mains, les miennes se posent sur ses cuisses que je masse doucement. Sa langue suit le tracé de ma clavicule, mon souffle est saccadé, je suis submergé par les sensations qu’il réveille petit à petit. Je sais que je tente à plusieurs reprises de bouger le bas de mon corps pour augmenter le contact que j’ai avec Tul, mais à cet instant, je ne me sens même pas frustré de ne pas y arriver, car je suis bien trop concentré sur les caresses de l’homme au dessus de moi.

    — Embrasse-moi, s'il te plaît, embrasse-moi. 

    J'ai ma voix suppliante, mes mains griffent ses cuisses encore couvertes par son jean, avant qu’elles n’aillent attraper ses cheveux pour les tirer et ramener son visage vers le mien. Mes lèvres me picotent, elles réclament les siennes et il met beaucoup d'entrain à me combler. Nos langues jouent l'une avec l'autre et mon cœur bondit contre ma poitrine, j'ai l'impression de me sentir vivant, chose qui ne m'était pas arrivée depuis des mois.

    Je gémis contre ses lèvres quand ses doigts font rouler mon téton entre leur pulpe, je me sens haleter et je suis surpris d’être si bruyant, alors que je suis plutôt silencieux habituellement, et puis, Tul me fait complètement découvrir mon corps, puisqu’il appuie sur certaines zones dont je ne me serais jamais douté du pouvoir érogène qu’elles possédaient sur moi. 

    Il quitte mes lèvres pour retourner embrasser mon corps, mais instinctivement, je bouge le visage pour essayer de les retrouver, elles me manquent déjà et je veux encore sentir leur pression contre les miennes. C’est comme si mes lèvres étaient en manque et qu’elles essayaient de rattraper tous ces mois sans avoir entamé de ballet avec celles qu'elles aiment tant.

    Ma tête retombe lourdement sur l’oreiller et je laisse de petits grognements s’échapper, car sa langue taquine mes tétons, les léchant, les mordillant et chaque fois j'ai l'impression qu'une décharge violente vient frapper mon bas ventre. Je ne peux pas vraiment bouger, mais du bout des doigts j’essaie autant que possible de le caresser, j’effleure sa peau, je sens que comme moi, elle est bouillante et je suis même surpris par sa douceur. C’est grisant de le laisser découvrir mon corps de cette manière, de lui laisser complètement les commandes et je me laisse totalement aller sous ses mains.

    Sa langue glisse le long de mon ventre, ma peau se couvre de chair de poule sur son passage alors que mes muscles se contractent. Mon souffle se coupe à plusieurs reprises et j’aimerais retirer la cravate qui me cache la vue, j’aimerais voir Tul, vois son visage grisé par le désir, concentré à me donner du plaisir, mais je ne fais rien et je le laisse décider du moment où il me rendra la vue. 

    Ses doigts saisissent la ceinture de mon caleçon et lentement il le descend, déposant de tendres baisers sur ma peau exposée. C'est seulement à cet instant que je prends conscience de mon érection, j'ai un hoquet de surprise et je sens un petit sourire soulagé naître sur mes lèvres. C’est bête de se sentir entier juste parce que je suis capable de durcir, mais j’ai soudain l’impression que les choses s’arrangeront finalement.

    Tul se redresse, je le sens bouger et quand il se penche pour capturer une nouvelle fois mes lèvres, je pose mes mains sur ses flancs pour comprendre qu’il a retiré son t-shirt. 

    — Mon amour, tu es tellement sexy. Tellement dur… 

    Sa voix est voilée par l’excitation, il se contient pour me faire ressentir du plaisir, mais je prends aussi conscience qu’il doit être excité après plus de huit mois sans avoir pu me toucher et être touché. Il s’éloigne de ma bouche à nouveau et je soupire. 

    — Tul... 

    Je ne sais pas ce que je vais dire mais je suis coupé dans mon élan, quand sa bouche humide se referme sur mon sexe et il l'enfonce dans sa gorge. La sensation est incroyable, même si je me rends compte que ce n'est pas aussi intense qu'avant, je ressens les sensations du plaisir et de la langue qui caresse ma longueur. Je mords fortement ma lèvre, j'ai le souffle court, je grogne et gémis de plus en plus fort avant de me figer.

    Un instant l'idée d'être capable d'avoir une érection mais pas de pouvoir jouir me déstabilise, certes dans l’histoire, la jouissance n’est pas forcément importante, pas quand je peux me retrouver contre Tul, pas quand il me fait ressentir mon corps pour la première fois depuis si longtemps, malgré tout la peur me ronge un instant. Jusqu'à ce que sa langue glisse sur mon gland, que je gémisse et que je la sente, cette pression si familière dans mon  bas ventre, celle qui annonce la construction de mon orgasme.

    Tul me dévore, il me laisse pantelant sur le lit et je n'ai jamais eu autant conscience de mon corps qu'à cet instant. Seulement, je prends vite conscience que je ne veux pas que ce soit à sens unique, je ne peux pas juste recevoir du plaisir je veux lui en donner, je veux le toucher et redécouvrir son corps. Mes mains se posent sur son visage, je l’arrête alors qu’il continue de sucer mon sexe, je le force à se redresser, à venir contre moi et je le serre en soupirant quand je sens son poids sur le mien. 

    — Max ? Ça va ? 

    — Je veux te toucher. 

    Mes mains se posent sur son dos et je caresse lentement tout ce qui est à ma portée, alors que je plonge contre son cou, je mordille son lobe d’oreille et quand il gémit, je le serre plus fort contre moi. Mes lèvres glissent le long de son cou où je laisse plusieurs suçons, me rendant compte que sa peau n’a pas été marquée par moi depuis bien trop longtemps. Je laisse ma langue suivre le tracé de sa pomme d’adam et je sens ses doigts s’enfoncer dans mes épaules. 

    — Laisse-moi te goûter aussi.

    Je l’entends glapir et je le sens frissonner, il sait très bien ce que je veux lui faire maintenant. 

    — D’accord… 

    Il quitte mes bras et je suis obligé de tendre l’oreille pour suivre ce qu’il fait. J’entends ses habits tomber sur le sol, je l’entends fouiller dans un tiroir avant qu’il ne monte sur le lit pour s'asseoir à côté de moi, le dos appuyé contre la tête de lit. 

    — Je vais t’aider. 

    Sur le moment, je ne comprends pas ce qu’il veut dire par là, puis en douceur il me fait basculer sur le côté, je passe un bras par-dessus sa taille et mon coude s’appuie sur le matelas. Le haut de mon corps est relevé et en partie appuyé contre son flanc, je tiens en équilibre et la sensation est grisante.

    Toujours plongé dans le noir, ma main glisse sur ses cuisses, instinctivement il les écarte et je souris en me penchant pour déposer des baisers sur son aîne. Il glisse sa main dans mes cheveux et je me rapproche de son sexe que je prends en bouche sans trop le faire languir. Il gémit fortement et moi, mon cœur s’envole soudain, la sensation d’être normal me prend aux tripes alors que je sens Tul se cambrer sous moi. 

    — M..Max… prépare-moi… 

    Sa voix est voilée par le désir, alors qu’il pose un tube dans ma main et je sais maintenant ce qu’il est allé chercher dans le tiroir, j’ai un petit sourire en coin satisfait. Sans que ma bouche n’arrête sa caresse sur son sexe, j’enduis mes doigts de lubrifiant et c’est avec toute la douceur dont je suis capable que je le prépare pour me recevoir plus tard. 

    L’idée d’être en lui me contracte le bas ventre et j’ai l'impression de sentir mon érection durcir davantage. Ma bouche fait de rapides va-et-vient sur son sexe, mes doigts entrent vite en lui et j’obtiens bientôt ma récompense, quand un long gémissement emplit cette pièce qui a été trop longtemps silencieuse. Comme moi plus tôt, ses mains arrêtent les mouvements de ma tête, il a le souffle court et je donnerais tout pour le voir alangui à cause du plaisir. 

    De nouveau, on change de position et c’est avec tendresse qu’il m’aide à me repositionner sur le lit. Ce n’est pas très romantique ou sensuel, mais il bouge mon corps de manière à ce que, cette fois, ce soit mon dos qui soit appuyé contre la tête de lit.  Il se replace sur mes cuisses sans attendre et m’offre un long et langoureux baiser. Mes mains s’enroulent autour de sa taille pendant qu’il se positionne au-dessus de ma longueur et lentement il commence à me faire rentrer en lui. Il fait alors la chose la plus érotique qui soit quand, au moment où la pointe de mon sexe entre en lui, il retire la cravate qui m’aveugle et je vois son visage crispé par le plaisir, ce qui me fait presque jouir tant il est magnifique. On se regarde droit dans les yeux alors qu’il continue de s’étirer autour de moi. 

    Je voudrais que ce moment dure toujours, il est tellement intense et Tul si beau, pourtant je le vois soudain grimacer de douleur et une petite plainte sort de sa bouche, même si je sais qu’il essaie de ne rien laisser paraître. Instinctivement, je resserre ma prise autour de sa taille pour l’empêcher de bouger. 

    — Attention, ne te fais pas mal. Prends ton temps. 

    Je le colle contre moi et il me rend mon étreinte nous serrant l’un contre l’autre. On est tellement serré que je peux sentir son coeur pulser contre le mien et un grand sourire naître sur mon visage quand, après un long moment, ses fesses butent finalement contre mes hanches. Je le pénètre entièrement et même si la sensation n’est pas totalement comme avant, même si tout est différent, à cet instant, tout est parfait. 

    — Je t’aime Tul, je suis désolé. 

    Cette fois, mes excuses ne sonnent pas platement, cette fois, elles sont vraies et je sais qu’à partir de maintenant, je ne ferai plus rien qui risquerait de le blesser.

    Tul est immobile sur moi, mais je sens mon cœur se serrer quand je sens une goutte tomber sur mon épaule et couler le long de mon dos, rapidement suivie d’une deuxième, puis d’une troisième et d’une quantité incalculable d’autres gouttes. Je l’embrasse sur la tempe pour essayer de le réconforter, de lui faire comprendre que maintenant je sais qu'aucune épreuve ne sera trop difficile pour nous. 

    — Ne pleure pas, ne sois pas triste, je suis désolé mon coeur.

    Ma voix se brise, mes yeux me piquent et je dois lutter contre les larmes, cet instant doit être heureux alors que l’on se retrouve liés l’un à l’autre. Je le serre aussi fort que je peux contre moi pour le réconforter et lui transmettre tout mon amour.

    — Je vais bien… je suis heureux…

    Sa voix est étouffée contre ma peau, mais il dit la vérité, il n’y a aucune tristesse dans sa voix. Il tourne la tête et nos lèvres se trouvent, se caressent, alors que lentement il soulève ses hanches avant de se rabaisser et on gémit à l’unisson dans ce premier va-et-vient. Le rythme est lent, sensuel, on savoure la présence de l’autre, on laisse les sensations aller et venir sans chercher à les précipiter. On laisse s’effacer ces huit derniers mois qui ont été vides d’amour et de tendresse, au fur et à mesure que le plaisir grimpe en nous.

    Mes mains sont posées sur ses hanches, je l’aide à se mouvoir, à bouger un peu plus fort, un peu plus vite et je perds rapidement pied. Je voudrais être capable de le retourner d’un mouvement de hanche, je voudrais pouvoir sentir ses cuisses s’enrouler autour de moi et reprendre les choses en main. Je voudrais venir à sa rencontre pour m’enfoncer profondément en lui et le faire gémir de plus en plus fort, mais j’accepte de ne pouvoir rien faire de plus. Je profite des sensations qu’il m’offre, de la possibilité de le tenir dans mes bras, alors que la tension dans mon bas ventre grandit de plus en plus. 

    J’aurais aimé que l’on fasse l’amour pendant des heures, mais le manque a rapidement raison de nous et il ne nous faut pas longtemps pour être fauché par l’orgasme, exactement au même moment, ce qui ne nous était encore jamais arrivé. Tul est épuisé, son corps s’alourdit contre moi alors que nous peinons à reprendre nos respirations. Je lui caresse lentement le dos me laissant griser par la sensation de flottement qui ne me quitte pas. 

    Aucun de nous ne parle, pour le moment on n’a pas les idées assez claires et on savoure juste l’instant. Au bout d’un certain temps, j’ai un grand sourire quand je me rends compte que mon homme s’est endormi contre mon épaule. Avec des gestes lents et un peu maladroits, je réussis à le soulever et à le faire s’allonger juste à côté de moi. Il doit être épuisé, car il ne se réveille même pas.

     

    Je reste un long moment à l’observer dormir, son visage est détendu et un petit sourire reste au coin de ses lèvres rougies par tous nos baisers. Il est beau même si la culpabilité reprend le chemin de mon cœur quand je me rends compte qu’il a maigri et qu’il a des cernes énormes sous les yeux. Je ne l’ai pas réellement regardé depuis que j’ai quitté l’hôpital, je l’ai complètement délaissé, parce que j’étais trop occupé à pleurer sur mon triste sort. Je me penche vers lui, embrasse sa tempe avant de murmurer quelques mots à son oreille qu’il n’entendra sûrement pas. 

    — Je vais bien m’occuper de toi maintenant mon coeur.

    Je tire sur mon fauteuil pour le rapprocher du lit et je m’y transfère sans trop de mal. Silencieusement, je roule jusqu’à la salle de bain où je prends quelques minutes pour me nettoyer avant de poser un linge humide sur l’accoudoir. Je souris en voyant Tul allongé sur le lit, il n’a pas bougé, j’espère qu’il va dormir un long moment, il en a besoin. Je veux qu’il soit à l’aise pour se reposer, alors je vais faire en sorte qu’il soit bien installé. Je prends des sous-vêtements dans la commode, je prends le temps d’enfiler le mien et m’approche du lit où je me transfère à nouveau dessus.

    Je prends le temps de nettoyer Tul de tous nos fluides, sa peau se couvre de chair de poule et il remue dans son sommeil et j’ai un petit sourire. Si le laver a été simple, lui remettre un caleçon propre est une toute autre histoire. Je me tortille dans tous les sens, pas vraiment aidé par les poids morts qui se trouvent en bas de mon corps. Je grogne à plusieurs reprises, mais je ne me mets pas en colère et finalement j’y arrive. Je pose ma tête sur le torse de Tul pour reprendre mon souffle, je suis couvert de transpiration et j’ai l’impression d’avoir fait un marathon. J’entends son cœur battre lentement dans sa poitrine et je reste un moment à écouter, j’avais oublié à quel point écouter ce son avait le don de m’apaiser.

    Je reste comme ça sans bouger jusqu’à ce que je le sente frissonner, alors je me redresse lentement et je rabats la couverture sur lui pour qu’il soit bien au chaud. Je caresse un peu ses cheveux, je n’arrive pas à détacher mon regard de lui, mais mon ventre grogne et je sais qu’il va dormir encore un moment. J’embrasse ses lèvres avant de retourner dans mon fauteuil, je quitte notre chambre et mon cœur qui était léger comme une plume retombe au sol comme une pierre quand je rentre dans la cuisine et que je vois l’état dans laquelle je l’ai mise.

    Quand je pense à ce qui s’est passé dans la cuisine tout à l’heure, je n’ai pas l’impression que c’est moi. J’observe la poêle qui se trouve encore au sol, la nourriture étalée par terre et instinctivement je passe mon doigt sur la brûlure en grimaçant quand ça tiraille un peu trop. 

    — Ok, reprenons-nous en main. 

    Pendant plus d’une heure, je ramasse et range tout ce que j’arrive à atteindre, ce n’est pas parfait, il reste encore du bazar, mais j’espère que Tul ne m’en voudra pas de ne pas y arriver.

    Je suis en train de préparer un café tout en coupant quelques fruits quand un mouvement attire mon attention. Tul sort de la chambre en se frottant les yeux. Il a l’air tellement plus reposé, ça me fait plaisir de ne plus voir ses traits tirés. Seulement, quand nos yeux se croisent, il se fait hésitant, comme s’il ne savait pas comment se comporter avec moi et j’ai l’impression de prendre un coup dans le ventre. On était si proche avant, il n’y avait aucune hésitation dans notre comportement. Je soupire avant de reculer mon fauteuil du comptoir et de lui tendre la main.

    — Viens. 

    Je lui souris doucement et il s’approche de moi sans me quitter des yeux. Il s’arrête à quelques pas du fauteuil et je m’en veux tellement d’avoir apporté une telle gêne entre nous, au point que Tul ne sache plus comment réagir avec moi. Je me penche alors vers lui, l’attrape par les hanches et le fais s’asseoir sur mes cuisses. 

    — Max, attends ! 

    Je l’empêche de se relever en le maintenant contre moi et sans attendre je capture ses lèvres, je l’embrasse à pleine bouche, un baiser langoureux et amoureux. Il ne résiste pas longtemps avant d’y répondre, passant ses bras autour de mon cou et s’accrochant à moi. 

    Le désir qui avait totalement disparu revient au galop maintenant et je me surprends à vouloir lui faire encore l’amour. Quand nos lèvres se quittent, je pose mon front contre le sien et je respire profondément. 

    — Les choses vont aller mieux Tul, je te le promets.

    Je lève les yeux vers lui et on se sourit avec tendresse. Sa main se pose sur ma joue et il la caresse doucement.

    — J’ai confiance en toi Max.

    On s’embrasse à nouveau et j’ai l’impression qu’à chaque mouvement de nos lèvres, les choses reprennent petit à petit leur place. Ne pas utiliser mes jambes me met toujours en colère, mais je ne ressens pas le besoin de la déverser sur Tul pour me sentir mieux. Il quitte de nouveau mes lèvres, ses joues sont rouges, il a un petit sourire aux lèvres et regarde autour de nous avant qu’un air surpris passe sur son visage. 

    — Tu as rangé la cuisine ?

    — J’ai essayé, mais je n’ai pas réussi à tout ranger. 

    Je lui frotte lentement le dos avant de m'avancer vers le comptoir. 

    — Mange un fruit, tu dois avoir faim. 

    Passer du temps avec Tul sur mes genoux, parler de tout et de rien en grignotant des fruits est un plaisir simple, un plaisir que j’ai failli perdre en me perdant moi-même, je sais que le chemin est encore long, qu’il nous faudra du temps pour trouver un équilibre, mais j’ai confiance en nous et je sais maintenant que l’on est plus fort que tout.

     

    Je relis le message que Max vient de m'envoyer et j’ai un petit sourire triste sur le visage. Aujourd’hui c’est Noël, le réveillon, une période que j’aimais particulièrement avant. Avant que Max ne se fasse renverser. Avant que je doive veiller sur lui pendant des mois endormi dans ce lit d’hôpital. Avant que son cœur ne lâche non pas une, mais deux fois et que les médecins ne le sauvent in-extremis. Avant qu’il ne se réveille si sombre et agressif. 

    Repenser à l’année qui vient de s’écouler est encore douloureux, même si maintenant on s’est apaisés, c’est encore dur. Ces quatre derniers mois, les choses se sont arrangées, tout n’est pas devenu parfait du jour au lendemain, mais les périodes sombres de Max se sont espacées jusqu’à disparaître et maintenant il remonte tout doucement la pente. 

    Je suis heureux d’avoir tenu bon, d’avoir été fort pour nous deux et maintenant on est encore plus proches qu’avant. Je soupire, un peu tendu, je ne comprends pas trop son message, pourquoi il veut remuer le couteau dans la plaie, en me donnant rendez-vous dans le même restaurant, à la même heure un an après. Je ne veux pas me rasseoir à cette table et l’attendre, sentir l’angoisse monter jusqu’à ma gorge en voyant les minutes passées, jusqu’à ce que le téléphone sonne pour m’apprendre l’horrible vérité. 

    J’avais vu les ambulances ce soir-là, à travers la vitrine du restaurant, mais pas un instant je n’avais imaginé que la personne gravement blessée qu’ils emmenaient était l’homme de ma vie. 

    — Hey p’tite tête qu’est-ce qui t’arrive ? 

    Je sursaute quand la voix de mon ami me parvient, j’étais tellement plongé dans mes pensées que je ne l’ai même pas entendu s’approcher. J’essuie, un peu surpris, les quelques larmes qui coulent sur mes joues. 

    — Quelque chose ne va pas ? 

    Je soupire avant de secouer la tête et de sourire un peu pour le rassurer. 

    — Non tout va bien, je pensais juste à l’année que l’on vient de passer.

     Heureusement, j’ai pu compter sur mes amis pour me soutenir, ils ont été d’un immense soutien pour moi et je ne sais pas si j’aurais réussi à tenir le coup sans eux. Tout le temps où Max était à l'hôpital, ils se sont assurés que je mange et dorme un minimum. Quand Max est rentré à la maison, ils m’ont forcé à sortir, à me changer les idées et à souffler pour ne pas craquer. Alors, après m’avoir vu dans tous ces états, je sais qu’il comprend parfaitement ce que je peux ressentir à cet instant. 

    — Et… il veut que l’on retourne au restaurant, celui où je l’ai attendu quand…

    Il passe son bras autour de mon épaule et m’attire contre lui quand il sent la panique dans ma voix. 

    — Tul, tu t'imagines bien que rien ne va recommencer. 

    Il m’empêche de finir ma phrase et me fait un petit sourire alors que je baisse les yeux. 

    — Peut-être que justement, il fait ça pour que vous puissiez tourner la page du passé. 

    Bon d’accord, mon pote a oublié d’être con, je n’ai pas pensé à cette possibilité. C’est vrai que réussir à aller manger dans ce restaurant serait un véritable pied de nez au passé. 

    — Ou alors il veut te demander en mariage.

    Je le regarde un instant, surpris, avant d’éclater de rire, la tension présente en moi me quittant tout de suite.

    — Ne sois pas bête, tu sais très bien qu’on est bien comme ça et qu’on ne veut pas se marier. 

    Je me lève et m’étire soudain, pressé d’être ce soir et de pouvoir profiter d’une soirée juste lui et moi. 

    — Je te laisse, je rentre me préparer. 

    Son rire m’accompagne, mais il ne fait aucun commentaire de plus et je dois me réfréner pour ne pas partir au pas de course. 

    Je ne peux pas m’empêcher de regarder l’heure et je fais tout pour ne pas paniquer. Heureusement, le serveur ne m’a pas installé à la même table qu’avant, sans quoi je serais sûrement en pleine crise de panique à l’heure actuelle, car Max est en retard. Pourquoi est-ce que j’ai l’impression de revivre un mauvais flashback. Ma table est juste en face de l’entrée donc je ne peux louper qu’à chaque fois que la porte s’ouvre, ce n’est pas lui. Des millions de scénarios sont en train de se produire dans ma tête et j’ai peur de m’effondrer en larmes s’il n’arrive pas bientôt. 

    — Hey ! P’tite tête ! 

    Je sursaute et mes yeux s’écarquillent quand je vois mon meilleur ami s’assoir à côté de moi et piocher pour prendre de quoi grignoter. 

    — Max m’envoie pour te calmer, il y a un petit souci logistique et il savait que tu devais être en train de paniquer.

    Je fronce les sourcils sans comprendre. 

    — Tu es au courant ?

    Il continue de grignoter comme s’il ne voyait pas combien je suis inquiet et complètement perdu.

    — Bien sûr, ça fait plus de dix jours qu’il prépare tout ça, alors il n’est pas très content que ça coince maintenant, mais il ne voulait surtout pas que tu te sentes mal. 

    Il tourne alors la tête et me fait un petit sourire, je ressens le besoin de le frapper pour lui faire ravaler son sourire condescendant, mais il doit le deviner alors il lève la main en rigolant. 

    — Hey pas de violence p’tite tête, on est au restaurant, pas dans la rue. 

    Son sourire s’agrandit alors que mon visage s’assombrit. Je me cale contre le dossier de ma chaise en croisant les bras. 

    — Mais qu’est-ce qu’il fabrique, raconte-moi, s’il te plait. Promis, je ne dirai rien.

    Je lève la main droite pour lui prouver ma bonne foi. 

    — Je ferai même semblant d’être surpris. 

    Je lui montre alors ma plus belle expression de surprise et il éclate de rire, attirant l’attention de nos voisins sur nous, mais il secoue vivement la tête.

    — Tu veux que Max me poursuive dans tout Bangkok pour me rouler dessus, tu es dingue. Je tiens à la vie, mon ami. 

    Il est bien l’un des rares à faire ce genre de blague et à chercher à dédramatiser au maximum ce que l’on a vécu. Il arrive même à faire rire Max avec ce genre de choses, ce qui prouve que les choses s'améliorent. Je baisse la tête, essayant de trouver autre chose pour le convaincre de m’expliquer ce qu’il se passe, quand il me tape sur le bras. 

    — Regarde, l’homme de ta vie arrive.

    Je relève la tête rapidement et mon cœur s’arrête de battre plusieurs secondes avant de repartir à un rythme effarant. 

    — Max ! 

    Je me lève brusquement sans avoir conscience que je viens de buter contre la table et que j’ai renversé la cruche d’eau. A cet instant-là, il n’existe plus rien autour de moi, à part Max.

    Je sens mes yeux me piquer alors que je le regarde de haut en bas, mon cœur bondit dans ma poitrine alors que j’ai du mal à croire ce que je vois. Je veux aller le rejoindre et je fais même un premier pas vers lui mais mon ami me retient par le bras pour m’en empêcher. 

    — Laisse-le venir à toi, c’est ce qu’il veut.

    Je reste debout près de la table et ne réussis pas à quitter des yeux mon petit ami qui se dirige vers moi, il arrive lentement, mais ça ne me gène pas, je pourrais rester là des heures à l’observer alors qu’un pas tremblant après l’autre, il réduit l’espace entre nous en s’appuyant sur des béquilles. J’éclate en sanglots quand il se trouve devant moi, je n’ai pas besoin de baisser les yeux pour le regarder et il m’offre son plus beau sourire. Je ne résiste plus, je le prends dans mes bras, savourant la sensation de retrouver nos anciennes étreintes. 

    — Pourquoi est-ce que tu pleures Tul ? 

    Il ne peut pas me serrer dans ses bras car les béquilles l’aident à rester debout, mais moi je me colle contre lui, mes bras enroulés autour de sa taille, je cache mon visage dans son cou et je ne peux pas m’empêcher de savourer ce moment.

    — Parce que tu marches. Je suis juste heureux. 

    Je sens ses lèvres souriantes se poser sur ma tempe et je frémis. Je pourrais rester là pendant des heures, juste à le tenir dans mes bras, en savourant le fait qu’il se tient debout sur ses deux jambes.

    — Tul, j’aime te sentir contre moi, mais je ne peux pas rester debout très longtemps. 

    Je me recule alors pour voir que ses jambes tremblent légèrement et qu’il fatigue. Je me sens un peu stupide sur le moment, mais son sourire me rassure.

    — Oh, bien sûr désolé. 

    Je quitte ses bras à regret et l’aide à s'installer sur la chaise en face de moi. Je remarque alors le silence qui nous entoure et quand je regarde dans la salle, je peux voir que tout le monde nous regarde avec un petit sourire sur les lèvres. Je me sens rougir, moi qui n’aime pas spécialement montrer mon affection en public, là on ne pouvait pas faire plus clair. Je fais un waii à la ronde avant de rejoindre Max à table et voir que mon meilleur ami s'est esquivé et que la cruche a été remplacée. 

    — Mais… depuis quand Max.

    Il tend la main à travers la table et saisit la mienne, entrelaçant nos doigts, son sourire ne le quitte plus. 

    — J’ai réussi à me tenir debout, il y a un mois et demi environ, j’ai travaillé plus dur encore, car je voulais pouvoir marcher vers toi ce soir. C’est grâce à toi que je peux marcher à nouveau. Je t’aime Tul, merci pour tout.

    Je m'essuie les joues de ma main libre et rougis à cause de sa déclaration. Je me sens soudain tellement heureux. Bientôt Max ira mieux on pourra retrouver nos vies et reprendre les projets que l’on a mis de côté depuis un an.

    — C’est aussi parce que tu as travaillé fort, tu peux être fier de toi. 

    Un serveur vient déposer deux coupes de champagne à notre table, mais je ne suis pas du tout surpris, il a dû tout préparer de manière très millimétrée. Je prends la coupe avec une main tremblante quand il fait pareil.

    — Je te demande encore un peu de patience, dans quelques mois, je pourrais remarcher sans aide et normalement et alors je te prouverai chaque jour combien je t’aime. 

    Mon sourire s’agrandit, il faut encore un peu de patience, mais je sais maintenant que le plus dur est derrière nous. Je bois une gorgée de champagne, mais il sort ensuite une enveloppe qu’il me tend.

    — Qu’est-ce que c’est ? 

    Il me fait un sourire énigmatique et me fait un petit signe de tête m’indiquant que je dois ouvrir l’enveloppe. Je peux sentir son regard sur moi alors que j’obtempère, les mains tremblantes. J’en sors alors deux feuilles, deux réservations pour une croisière qui ira jusqu’en Europe pour Noël prochain.

    — Ce n’est pas le tour du monde, mais je me suis dit que c’était un bon début, qu’est-ce que tu en penses ? 

    J'acquiesce avant de brusquement me lever, faire le tour de la table et capturer ses lèvres avec tendresse. Je n’entends pas les réactions autour de nous, je suis dans une bulle de douceur avec l’homme de ma vie. Le chemin a été long pour en arriver ici, mais je sais que maintenant, quoi qu’il arrive, Max et moi on est plus soudés que jamais et je l’aime de toutes mes forces.

     



  • Commentaires

    13
    Mercredi 29 Juin 2022 à 12:45

    Très belle histoire ! Touchante et émouvante, en plus avec un couple qui nous fait ressentir tellement de choses dans leurs drama ou dans la vie de tous les jours. J'ai adoré, merci beaucoup ! 

    12
    Mardi 21 Décembre 2021 à 01:56

    C'est  vraiment  très  beau rempli d'émotions et de sentiments  J'ai  adoré Un grand MERCI

    11
    Jeudi 25 Février 2021 à 17:01

    ohhhhhh mon dieu

    tellement beau c'est la 1er fanfic que je lit sur max et tul (parce que malheureusement je n'en trouve aucune)

    mais non d'une pipe je ne suis pas prête de l'oublier

    merci pour ce moment plein d'émotion

     

    • Voir les réponses
    10
    Mardi 15 Décembre 2020 à 13:49

    Max, Tul, Lemon, 3 mots je dis ouiiiii! lol. Nan plus sérieusement, comme @MyaEria plus bas, j'ai eu la larme à l'oeil ⊙﹏⊙ ∥ಥ_ಥ Vraiment, très belle histoire sur les épreuves de la vie, de couple et l'amour inconditionnel et pour le coup, le couple MaxTul s'y prête à merveille! Merci pour ce partage ❤

    • Voir les réponses
    9
    Dimanche 13 Décembre 2020 à 07:57

    Oh, purée ! J'ai eu la larme à l'œil. 

    C'est vraiment beau. Et ça fini tellement bien. Avec cet espoir... ou plutôt cette certitude que tout ira pour le mieux.

    J'aime beaucoup. 

    Merci pour cette belle surprise. 

    Tous ces OS sont différents. En tout cas, bravo. J'adore. :)

    • Voir les réponses
    8
    Vendredi 11 Décembre 2020 à 23:11
    J’ai adoré
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