• R - Reconnect Our Feelings {Rossi & Art}

    Reconnect Our Feelings
    Petit Mot De L'Autrice

    La lettre 'R' mettra en scène Rossi & Art, les acteurs du drama Love Syndrome III. J'espère que l'histoire vous plaira et je vous retrouve vite pour les autres lettres.


    Le paysage défile sous mes yeux, je l’observe sans vraiment le voir. Tout comme j’entends les voix de mes amis sans vraiment les écouter. Je suis complètement plongé dans mes pensées et elles sont toutes focalisées sur la même chose. Art. Est-ce qu’il va bien ? Est-ce qu’il pense aussi à moi ? Est-ce que je lui manque ? Est-ce que j’ai pris la bonne décision ?

    Je soupire alors que ces questions tournent encore et toujours dans ma tête. Elles ne me laissent pas une minute tranquille depuis que j’ai pris la décision de m’éloigner de lui. C’était la seule chose à faire non ? Je n’arrivais pas à imaginer un avenir pour nous, ou plutôt j'avais terriblement peur de le perdre. 

    En plus de ça, quand j'ai essayé d'imaginer la réaction de nos parents, de nos amis et même du reste de l’université, je me suis dégonflé.

    Quand je lui ai parlé, quand j’ai pris la décision pour nous, j’étais persuadé que mes sentiments pour lui n'étaient pas si forts que je ne le pensais. Sinon, comment expliquer que je n’étais pas prêt à faire face au reste du monde. J’étais sûr que j’allais rapidement l'oublier et tourner la page, seulement, je n’arrive pas à le sortir de ma tête.

    Mon amour pour lui grandit de jour en jour. J’ai envie de le voir, d’être sûr qu’il va bien aussi. Je veux… je veux juste être près de lui. Je pose ma tête contre la vitre, les yeux fermés et luttant une nouvelle fois pour ne pas sortir mon téléphone et lui envoyer un message. Je lui ai déjà fait du mal en le rejetant, je ne peux pas maintenant revenir pour le supplier non ?

    — Rossi ? Hey Rossi !

    Je sursaute quand quelqu’un me tape sur le genoux et je tourne la tête vivement vers Torn qui se trouve à l’avant de la voiture et qui me regarde avec une lueur inquiète dans les yeux. Je me redresse en me frottant l'arrière de la tête et en lui souriant pour le rassurer. 

    — Tu disais quelque chose ?

    Je le vois jeter un petit coup d'œil à Yoon qui m’observe à travers le rétroviseur. Il s’inquiète pour moi, je le sais bien, mais je n’ai jamais réussi à expliquer ce que Art et moi avons vécu. Alors je ne me vois pas soudain tout leur dire, je ne suis même pas sûr qu’ils pourraient vraiment comprendre. 

    — Yoon va acheter des snacks, tu veux quelque chose ?

    — Hmm non merci, je n’ai pas très faim.

    Torn ne dit rien de plus sur le moment, il discute encore un peu avec Yoon qui finit par quitter la voiture pour se rendre dans la petite supérette. Je n’avais même pas fait attention que l’on s’était arrêté, complètement pris par mes pensées pour Art.

    — Rossi, tu sais que tu peux me dire si tu as un problème. Je pourrais t’aider. 

    Je relève les yeux vers mon ami qui s’est de nouveau tourné vers moi et m’observe intensément pour essayer de comprendre mon comportement. Je n’ai jamais été du genre loquace, mais depuis la remise des diplômes, je suis encore plus silencieux que d’habitude. 

    — Je sais que j’ai pris la bonne décision, mais… je regrette de l’avoir prise. 

    Ma gorge se serre quand j'arrive enfin, à lui faire cette déclaration énigmatique, parce que dans le fond, je ne suis même pas certain que c’était la bonne décision. C’était juste la décision qui me rassurait le plus sur le moment.

    Torn fronce les sourcils en entendant mes paroles, il ne peut pas comprendre de quoi je suis en train de parler. Je ne peux pas lui expliquer que la peur m’a sûrement fait perdre l’homme que j’aime, alors on se contente de se regarder un moment dans le blanc des yeux sans que je ne puisse rajouter quoi que ce soit. 

    — Tu sais qu’il est possible de changer de décision ? Tu dois prendre celle qui te rendra le plus heureux. 

    — Même si je blesse les autres autour de moi ?

    Il prend un instant pour réfléchir à la question que je viens de poser. J’en suis persuadé, si je reviens en arrière, si je supplie Art, alors des gens vont être blessés autour de moi, en particulier Lisa, ma sœur. Pourtant, en le repoussant, c’est nous que j'ai blessés. Je baisse les yeux sur mes doigts abîmés, je suis tellement nerveux que j’ai tendance à m'arracher la peau.

    — Rossi, parfois il faut savoir être égoïste. 

    Sa réponse me surprend un peu, je m’étais attendu à ce qu’il soit d’accord, à ce qu’il me conforte dans mon idée. Je relève la tête pour croiser son regard et il est extrêmement sérieux. Il soupire en s'humidifiant rapidement les lèvres. 

    — Tu ne peux pas faire passer le bonheur du monde avant le tien.

    Il ne dit rien de plus, il ne pose pas de question, il doit savoir que je n'ai pas envie d'y répondre, même s’il brûle de comprendre ce qui m’arrive. 

    Yoon revient et on reprend rapidement la route. Je reste silencieux, les paroles de Torn venant s'ajouter à toutes mes questions, mais cette fois, je m'assoupis sans même m'en rendre compte. 

     

    — Rossi, tu es aussi dans cette classe. 

    Je me retourne et souris avec un air surpris alors que le petit ami de ma grande sœur s’installe à côté de moi. Ils sont ensemble depuis quelques mois, mais on n’a jamais été très proche, d’ailleurs je crois même que c’est la première fois que l’on se retrouve seuls tous les deux. 

    — Oui, si je veux devenir coach, alors ça me fera des points supplémentaires. 

    — Tu veux devenir coach ? Pourtant, tu es assez doué pour être athlète.

    Je me tourne complètement vers lui. Le cours n’a pas encore commencé, alors pour le moment, la salle est plongée dans la cacophonie de toutes les conversations. 

    — Comment tu peux le savoir ?

    — L’université de sport n’est pas très grande, je t’ai souvent vu t'entraîner. 

    Il n’a pas tort, notre université est très sélective et est censée représenter le haut du panier sportif de notre pays. Y entrer n’a pas été facile et même si je veux me diriger vers l'entraînement, je dois me dépasser au volley-ball.

    — C’est un sport d’équipe, je ne pourrais pas gagner tout seul. 

    — Ta sœur m’avait dit que tu étais beaucoup trop modeste. Je sais, vu que tu veux devenir coach, aide-moi à m’entrainer pour ma prochaine compétition.

    Je fronce les sourcils, Art est champion de Muay Thai. Pour avoir vu plusieurs de ses combats, il est vraiment impressionnant et je ne sais pas vraiment ce que je pourrais lui apporter avec mes maigres connaissances. Surtout que je n’ai jamais réellement coaché quelqu’un.

    — Je ne suis pas sûr que ce soit une bonne idée. Si jamais tu perds la compétition à cause de moi, je…

    — Pourquoi tu pars du principe que tu vas me faire perdre. Notre coach est très occupé par les membres du club, j’ai besoin de quelqu’un qui reste focalisé sur moi et mes exercices pour progresser. Je suis sûr que tu pourras me faire de bons programmes d’entraînement.

    J’ouvre la bouche pour répondre, mais au même moment la salle devient silencieuse car le professeur vient de faire son entrée et il n’a pas vraiment la réputation d’être tendre avec les perturbateurs dans sa classe.

    Il commence son cours après avoir rapidement fait l’appel et malgré tous mes efforts, je n’arrive pas à me concentrer. La proposition de Art, même si elle me fait un peu peur, me donne envie d’essayer. Alors discrètement je pousse le coude de mon voisin pour attirer son attention. Il me regarde droit dans les yeux et je prends la parole dans un murmure. 

    — D’accord… je vais t’aider. 

    Ses yeux s'illuminent, son sourire s'agrandit et on reste un moment à se regarder fixement, oubliant le monde autour de nous. À ce moment, mon cœur fait un premier bond incontrôlable dans ma poitrine.  

    Mes yeux s’ouvrent soudain en grand, je sens mes lèvres esquisser un sourire alors que je viens de rêver de notre première vraie rencontre. Parfois, je me surprends à regretter d’avoir accepté, mais la plupart du temps, je suis juste heureux qu’il se soit intéressé à moi et d’avoir appris à le connaître. 

    Mon regard se fixe sur le paysage qui a beaucoup changé. En toile de fond, je peux apercevoir les falaises où pendant trois jours on va faire de l’escalade, le sport favori de Yoon.

     

    Je pose mon sac à dos sur le lit de la chambre d'hôtel que l’on a réservée. Enfin, moi je suis seul. Hors de question d’avoir Yoon et Torn en train de roucouler toute la soirée sous mes yeux. Leur chambre est juste à côté de la mienne et j’espère juste qu’elle est bien insonorisée, car même s’ils m’ont répété de ne pas dormir trop tard après notre repas au restaurant, je doute qu’ils se contentent d’éteindre sagement la lumière. Ils sont en couple depuis peu et toujours dans la phase lune de miel. 

    Je prends le temps de me doucher, me sentant seul tout en repoussant l’idée que Art aurait aimé être ici avec nous, que j’aurais aimé l’avoir à mes côtés et… je remercie intérieurement la sonnerie de mon téléphone qui retentit dans la poche de mon jean. Un remerciement de courte durée quand je vois le nom inscrit sur l’écran. Ma grande sœur. 

    — Allo ?

    Je réponds d’une voix incertaine, j’ai hésité un instant à décrocher, mais je ne peux pas ignorer ma sœur éternellement, même si j’ai trop honte pour lui faire face pour le moment. 

    — Rossi, tu vas bien ?

    Sa voix est aussi hésitante que la mienne et on sait tous les deux pourquoi. La dernière fois que l’on s’est parlé, on s’est disputé, ou plutôt, elle m’a couvert, à raison, de reproches. C’était le lendemain de mon baiser avec Art, nous n’avions pas vraiment réfléchi, la tension était à son paroxysme et on avait cédé à la tentation sans savoir qu’elle était là. Certes, Art l’avait quitté, mais je n’aurais pas dû faire ça, j’avais blessé ma sœur et je m’en voulais autant que je regrettais l’absence de celui dont j’étais tombé amoureux. 

    — Oui et toi ?

    — Je suis désolée pour ce soir-là.

    Au lieu de répondre à ma question, elle s’excuse et je ne comprends pas bien pourquoi. Elle n’a rien fait de mal. Elle était en droit de m’en vouloir, je lui ai piqué son petit ami, je suis le plus horrible des frères. 

    — Non, c’est moi, je…

    — Arrête Rossi, écoute-moi d’accord ? J’ai rencontré Art aujourd’hui, j’ai discuté avec lui et… je comprends, je ne dis pas que ça fait pas mal, mais je ne veux pas non plus que mon petit frère soit malheureux. Je suis désolée pour tout ce que je t’ai dit, je veux que tu sois heureux aussi et moi… moi ça ira avec le temps. 

    — Ça ne change rien, je lui ai dit qu’on ne pouvait pas être ensemble. Je ne veux pas te faire souffrir et puis… les autres ne comprendront pas, alors, c’est mieux comme ça.

    Ma gorge est serrée et j’entends son soupir de l’autre côté de la ligne. J’apprécie ce qu’elle m’a dit, ça me réchauffe le coeur, mais même si elle nous donne sa bénédiction, il faudra quand même faire face à nos parents, à nos amis et à tous les autres et je ne suis pas certain qu’eux comprennent. Art a un brillant avenir sportif et je pourrais tout gâcher si je suis à ses côtés. 

    Je ne peux imaginer le scandale que cela provoquerait si ça venait à se savoir. Art en couple avec un homme, qui plus est, le petit frère de son ex. J’en frémis d’avance. Elle tente de me faire changer d’avis, de me rassurer, mais après quelques minutes on met fin à notre conversation. Je m’allonge sur le lit, observant le plafond, le téléphone sur ma poitrine, je passe un long moment à me répéter que j’ai pris la bonne décision.

     

    J’étouffe un bâillement alors que le soleil se lève à peine. On est déjà au pied de la falaise, équipés pour grimper alors que l'instructeur nous explique comment grimper en toute sécurité et toutes les choses qui pourraient nous être utiles. 

    — N'oubliez pas, restez en alerte et concentrés sur votre ascension et surtout communiquez avec la personne qui vous assure. 

    Ce matin, on va grimper les premiers spots du site, ceux qui sont les plus faciles. J’ai déjà fait de l’escalade, mais jamais en pleine nature, alors je tente de rester attentif, mais le manque de sommeil me rend encore plus pensif que d’habitude. Je me suis couché tôt, mais je suis resté allongé sur le dos, pensant encore et encore à la conversation avec ma sœur, luttant difficilement contre mon envie de plus en plus pressante de l’appeler. 

    Yoon ouvre la marche, ou plutôt la montée. Personne ne l’assure, c’est lui qui s’occupe de mettre les différents crochets qui lui permettront ensuite de nous assurer Torn et moi. Il grimpe avec dextérité, confiance et habitude. Il n'hésite pas, prenant juste le temps d'assurer ses prises avant de se hisser vers la suivante. Il lui faut un petit moment pour arriver au sommet et s'y hisser avant de nous faire un grand sourire. Torn l’applaudit, vraiment fier de son petit ami, moi je me contente d’un petit sourire.

    — Allez les gars, à votre tour. 

    Torn me jette un petit coup d'œil avant de tapoter mon épaule, je sais qu’il est toujours inquiet pour moi. Je prendrai peut-être le temps ce soir de lui en parler. Un avis extérieur à la situation pourrait m’aider à y voir plus clair. 

    — On se retrouve au sommet.

    Et il s’élance sans attendre vers la première prise, il grimpe facilement, suivant les conseils de son cher et tendre qui nous attend au sommet tout en assurant sa progression. Il est bien moins rapide que Yoon, mais il ne semble à aucun moment en difficulté. Quand il rejoint son petit ami, il a les joues rouges, un sourire jusqu’aux oreilles et ils échangent un baiser rapide. 

    — Allez, rejoins-nous, c’est facile. 

    J’ai un petit rire quand Torn me donne l’ordre de monter, je ressens aussi un peu la pointe de compétition dans sa voix, alors je m'approche de la falaise. J’accroche la corde à mon baudrier, Je lève les yeux vers Yoon qui comme pour Torn s’assure de ma sécurité. Il me fait un petit signe de tête et je pose mon pied gauche sur la première prise.

    Je prends du temps, mais c'est peut-être parce que je suis plongé dans mes pensées. Je ne suis pas du tout concentré sur mon ascension, Je pose mes pieds un peu au hasard alors que, comme toujours ces derniers temps, Art envahit totalement mon cerveau. 

     

    La salle où la compétition s’est déroulée est complètement vide, j'éprouve un sentiment de fierté en ayant vu Art gagner son combat haut la main. Certes, c’est lui qui a combattu, mais, je l’ai aidé pendant des semaines.

    Je suis assis sur une chaise face au ring vide et je ne peux pas m’empêcher de sourire un peu bêtement. Art était magnifique alors qu’il combattait, je pourrais même dire… sexy. Je rougis à mes propres pensées et me mordille la lèvre inférieure pour tenter de museler ce que je ressens actuellement. 

    Je ne pensais pas me sentir aussi bien avec lui, ni aussi proche d’ailleurs, mais être avec lui est facile. Je me laisse porter par le courant et je ne peux pas nier que j’ai une certaine attirance pour lui. D’ailleurs, bien trop souvent, j’oublie qu’il a été le petit ami de ma sœur. 

    Ils ont rompu il y a quinze jours, aucun des deux n’a vraiment voulu en parler et si, pendant un moment, les choses ont été distantes entre Art et moi, notre relation est devenue encore plus proche. Tout est prétexte à se toucher, on recherche ce contact, on le savoure et on ne peut pas ignorer la tension sexuelle qui s’est installée depuis quelques jours. 

    Je me sens souvent coupable, j’ai peur d’être la raison de la rupture entre Art et ma sœur et en même temps, j’oublie tout le reste dès qu’il est près de moi. Parfois, j’ai l’impression de devenir fou, j’essaie de ne pas trop penser à mes sentiments, à surtout ne pas mettre de nom dessus pour me permettre de fuir une réalité qui pourrait être trop douloureuse. 

    — Un sou pour tes pensées.

    Je sursaute quand la voix de Art s’élève dans la pièce, il a encore les cheveux humides de sa douche. Il est en survêtement, la médaille bien placée sur son torse et son sac de sport sur l’épaule. Je ne peux pas m’empêcher de le détailler de la tête aux pieds.

    — Je suis juste fier… de moi.

    Il éclate de rire, il pensait que j’allais être fier de lui, c’est vrai que je le suis, mais je ne pense pas pouvoir le lui dire de cette manière. Il s’approche et s’installe sur la chaise libre à côté de moi. Comme d’habitude, nos épaules se touchent et aussitôt je ressens cette attraction, comme si un crochet relié à mon nombril m’attirait irrémédiablement vers lui.

    — Tu as été un bon coach, mais tu ne trouves pas que j’ai bien combattu ?

    Nos têtes se rapprochent l’une de l’autre alors que la tension devient presque incontrôlable. J’avale difficilement ma salive. On joue un jeu dangereux, mais aucun de nous ne peut s’arrêter d’y jouer. On veut savoir ce qui va se passer après des semaines de retenue. 

    — Bien sûr, mais j’ai eu peur que tu sois blessé.

    Son bras passe autour de mes épaules et il me rapproche de lui, nos fronts se touchent et nos respirations sont hachées. 

    — Tu m’aurais soigné si j’avais été blessé ?

    Mon cœur est sur le point d’exploser alors que nos lèvres s’effleurent. C’est vraiment un jeu dangereux, mais c’est aussi incroyable et grisant. Je ne peux pas m’empêcher d’en vouloir plus, de vouloir plus que ses légères caresses frustrantes. 

    — Bien sûr, je serais resté près de toi…

    Son bras me rapproche soudain de lui, nos lèvres s’écrasent l’une contre l’autre et je me sens léger alors que ce que j’attendais depuis si longtemps sans vraiment en avoir conscience se réalise. Ma main se pose sur sa joue et notre premier baiser est juste incroyable, je voudrais faire un arrêt sur image et ne plus jamais…

     

    —  ROSSI ! 

    La voix inquiète de Torn me ramène au moment présent, mais c’est déjà trop tard, mon pied glisse et je tombe dans le vide alors que sans m’en rendre compte, j’avais presque atteint le sommet. Yoon réagit vivement, bloque ma chute et je rebondis douloureusement contre les rochers. 

    J'entends le crac avant que l'éclair de douleur dans ma main ne se propage comme un feu ardent. Je n'arrive pas à rattraper une prise, la douleur et la peur me paralysent alors que je frappe de nouveau les rochers et que l’homme à l’autre bout de la corde tente difficilement de me faire redescendre en sécurité.  

    Quand enfin j’arrive à terre, je n’arrive pas à me réceptionner sur mes pieds tant la douleur dans mon bras est intense. Ma tête cogne sur le sol et je grogne, la douleur me donne envie de vomir. Malgré le casque, ma vue se brouille, les couleurs s’estompent et alors que je sombre, je ne peux penser qu’à une chose. 

    J'aime Art et je veux être celui qui le rendra heureux, peu importe le prix. 

     

    Je n’ai pas vraiment la sensation de me réveiller, le noir devient juste de plus en plus clair, jusqu’à ce que j’entrouvre les yeux et que j’ai soudain conscience de mon corps. Il est raide et je pousse un petit grognement de douleur quand j’essaie de bouger. C’est alors que je sens un mouvement à côté de moi.

    — Ne bouge pas, dit une voix douce.

    Je tourne légèrement la tête et vois Art du coin de l'œil. Je fronce des sourcils, ne comprenant pas ce qu’il fait là et encore moins pourquoi je me sens si groggy. Je cligne des yeux à plusieurs reprises, essayant de me souvenir de ce qui s’est passé. 

    — Art… qu’est-ce que tu fais là ?

    Celui-ci s’approche et s’assoit au bord du lit. Je réalise à cet instant que ce n’est pas mon lit, mais celui d’un hôpital et je sens la panique me saisir à la gorge. Il caresse doucement mon front, retirant les mèches de cheveux qui s’y trouvaient avant de me faire un petit sourire. 

    — Tu as eu un accident, alors j’attendais que tu te réveilles.

    — Un accident ?

    Je fronce les sourcils avant d’essayer de m'asseoir mais il m’en empêche en appuyant doucement sur mes épaules. Je n’insiste pas, je me sens tout engourdi et je me concentre pour essayer de me souvenir de ce qui s’est passé. 

    — Tu es parti faire de l’escalade avec Yoon et Torn, mais tu as glissé et tu t’es cogné à plusieurs reprises contre la paroi. Tu te rappelles ?

    Mon regard s’éclaire, je me rappelle de ce qui s’est passé, de mon manque d’attention et de la douleur à chaque fois que mon corps s’était cogné. Ma tête me fait mal, mais ce n’est pas tout, je sens quelque chose de pesant sur mon bras gauche. Je tente de le soulever et j’émets un sifflement de douleur.

    — Tu t’es cassé le bras, il doit être immobilisé pendant quelques semaines.

    Mon esprit commence à s’éclaircir et les souvenirs me reviennent petit à petit. La sortie, mes pensées complètement tournées vers lui et mon pied qui glisse sans que je puisse faire quoi que ce soit. 

    — J’ai mal à la tête…

    Aussitôt sa main vient masser doucement mon cuir chevelu et je ferme les yeux en soupirant de soulagement. Je me sens bien, il est près de moi, je me sens apaisé, comme si la souffrance de ces dernières semaines n’avait jamais existé. Malheureusement, cet instant de grâce ne pouvait pas durer éternellement. 

    — Et si Lisa arrive…

    J’ouvre brusquement les yeux, me redressant pour m’asseoir, ne lui laissant que le choix de passer son bras autour de ma taille pour me soutenir. Aussitôt j’ai la tête qui tourne, mais cela ne m’empêche pas de regarder nerveusement dans la chambre, puis de fixer la porte en imaginant qu’elle va la franchir d’une seconde à l’autre. 

    — Rossi, calme-toi, c’est elle qui m’a demandé de venir. 

    Je me concentre à nouveau sur lui, on est bien plus près l’un de l’autre. Presque collés, mais je n’ai pas envie de reculer, pas alors qu’il m’a tant manqué, pas alors que je me souviens très bien de ma dernière pensée avant de sombrer. 

    — Pourquoi ?

    — Parce qu’on a discuté, elle a compris que l’on s’aime et qu’on ne voulait pas la blesser.

    Mon cœur bondit dans ma poitrine quand il dit les choses si simplement. J’ouvre la bouche une première fois, mais je n’arrive pas à éclaircir mes idées, alors on reste un moment juste à se regarder, sa main caresse lentement mon dos et je ne peux pas m’empêcher de sourire en coin. 

    Lentement je pose ma tête contre son épaule et je ferme les yeux. Même si je viens de me réveiller, je me sens encore fatigué. Il ne bouge pas, me laissant me reposer contre lui à mon aise. 

    — On aura tout le temps d’en reparler. En attendant, je vais m’occuper de toi et m’assurer que tout va bien pour toi, murmure-t-il à mon oreille alors que je me rendors, étrangement en paix. 

     

    Les médecins ont insisté pour que je reste deux jours supplémentaires afin de s’assurer que ma tête allait bien, puis enfin j’ai pu rentrer. Enfin, disons plutôt que Art m’a traîné chez lui, bien déterminé à tenir sa promesse, même si je lui ai dit un nombre incalculable de fois que je pouvais me débrouiller seul. 

    D’un autre côté, j’apprécie vraiment la présence de Art à mes côtés, je sais que je l’aime vraiment et que m’éloigner de lui à nouveau serait impossible pour moi. Bien sûr, je me sens toujours aussi mal à l’aise par rapport à ma sœur et il faudra du temps pour que chacun puisse trouver sa place.

    — Viens, je t’emmène dans ta chambre.

    J’ai dû batailler très dur pour qu’il ne me porte pas, pour lui faire comprendre que je n’étais pas en sucre et capable de tenir sur mes jambes. Je ne râle pas cependant quand il attrape ma main pour me guider à travers son appartement que je découvre pour la première fois. 

    — C’est beau.

    — Merci, fais comme chez toi surtout. 

    On arrive dans un petit couloir où deux portes se font face. Sans attendre, il se dirige vers celle de droite et l’ouvre avant de me faire entrer dans une petite chambre qui, on le sait au premier coup d'œil, est une chambre d’invité. Elle est chaleureuse, agréable, mais pas vraiment personnalisée. 

    — Tu seras bien pour dormir ici. 

    — Et toi… tu vas dormir où ?

    Je me mordille et me sens rougir en posant la question. Aussitôt, son sourire s'agrandit et un air taquin apparaît sur son visage alors qu’il passe ses bras autour de mes hanches. Même si l’on n’a pas reparlé, il ne se passe pas une heure sans que l’on se prenne dans les bras pour se câliner. 

    — Dans la chambre juste en face, répondit-il sans se départir de son sourire. Pourquoi, tu voudrais que l’on dorme ensemble ?

    Je rougis tout en éclatant de rire pour cacher ma gêne. Oui, j’aurais aimé dormir dans ses bras, mais je suis bien incapable de lui répondre ça. Alors je me contente de le repousser de mon bras valide en marmonnant des mots incompréhensibles. 

    Quand on est tous les deux, on retrouve notre complicité d’avant que nos sentiments ne nous explosent à la figure. C’est apaisant et c’est peut-être pour ça que Art et moi repoussons inconsciemment la conversation qui changera absolument tout, aussi bien pour nous que pour notre entourage. J’ai essayé d’appeler Lisa, mais elle ne m’a pas répondu, se contentant de m’envoyer un message. 

    Lisa : Petit frère, je t’aime, je veux que tu sois heureux, alors arrête de trop réfléchir et fonce… et ne me fais plus jamais peur de te blesser comme ça petit imbécile. 

    — Rossi, à table !

    La voix de Art me sort de mes pensées alors que je fixe les mots depuis plusieurs minutes maintenant. Je sais pourquoi elle ne répond pas, elle sait que je ferai tout pour ne pas m’engager sur un chemin qui me fait peur. Elle me donne sa bénédiction, elle m’invite à profiter de la vie et à arrêter de me prendre la tête. 

    Je pose le téléphone sur mon lit et part rejoindre Art dans la cuisine, de nouveau j’oublie mes tracas et profite juste de sa présence. On mange tout en discutant de tout et rien, sentant dans chaque silence l’ombre de la conversation que l’on repousse encore et encore. 

    Après le repas, on s’est installé devant un film et je ne sais pas quand je me suis endormi, pourtant, quand j’ouvre à nouveau les yeux, je suis couché dans mon lit, bien couvert et mon bras bien calé pour que je n’ai pas mal. 

    Je ne sais pas pourquoi, mais être seul dans ce lit alors que depuis mon réveil à l’hôpital il est près de moi me met en colère. Je ne réfléchis plus, je me lève sans prendre le temps d’analyser ce que je ressens. J’ouvre ma porte et toque bruyamment à celle d’Art. 

    Je frappe un moment avant que la porte ne s’ouvre, il est là devant moi, encore à moitié endormi, je prends juste le temps de me dire qu’il est magnifique comme ça. Finalement, il n’y a pas besoin de grands mots, on sait tous les deux ce que l’on ressent, c’est juste qu’aucun de nous n’ose faire le premier pas. 

    Au début, je pensais que c’était à lui de le faire, à lui de me parler, à lui d’arranger les choses. Je me rends compte maintenant qu’il doit avoir peur, après tout, la dernière fois que l’on a parlé, je lui ai dit que l’on ne pouvait pas être ensemble, que je ne voulais plus le voir dans ma vie pour ne pas blesser les autres. C’est à moi d’arranger les choses et lui montrer que j’ai eu tort. 

    Avant qu’il ne puisse dire le moindre mot, ma main valide se pose sur sa nuque et je l’attire contre moi, nos lèvres se rencontrent et c’est une explosion de bonheur que de retrouver sa bouche après autant de temps. Il sursaute, mais ses mains se posent rapidement sur mon corps pour me garder près de lui. 

    On s’embrasse un long moment sur le pas de la porte, il n’y a pas de bruit dans l’appartement à part celui de nos baisers. Malheureusement, il finit par reculer pour que l’on puisse respirer. 

    — Rossi, qu’est-ce que…

    — Chut.

    Je pose mes doigts sur ses lèvres, je veux lui dire ce que j’ai sur le cœur avant de perdre le courage une nouvelle fois. On se regarde droit dans les yeux et je prends une profonde inspiration avant de me lancer. 

    — Je t’aime, je suis tombé amoureux de toi sans m’en rendre compte. J’aime ta compagnie, ton humour, la façon dont tu me regardes et prends soin de moi. 

    J’humidifie mes lèvres, un peu nerveux de m’ouvrir à ce point, mais je ne veux plus jamais risquer de le perdre. 

    — J’ai eu peur de faire face aux autres, de les blesser, mais surtout qu’ils te jugent pour être tombé amoureux de moi alors que je suis insignifiant. 

    — Ne dis plus jamais ça… dit-il brusquement alors que son regard s’est durci. Tu es loin d’être insignifiant. Tu es… parfait pour moi. 

    Mes joues rougissent quand il me fait ce compliment et je me sens tout simplement heureux d’avoir été honnête avec mes sentiments pour lui. 

    — Est-ce que tu m’en veux ?

    — Comment je pourrais t’en vouloir après une telle déclaration et un tel baiser ?

    Je sais qu’il essaie de détendre l’atmosphère et quand il pose rapidement ses lèvres sur les miennes, je soupire doucement de soulagement. Il reprend la parole d’une voix douce pour continuer lui aussi à me dire ce qu’il ressent. 

    — J’ai compris ta décision, je sais que ce n’était pas facile pour toi et même si tu as pris un peu de distance, je ne comptais pas abandonner. Je t’aime Rossi et je me serais battu pour être à côté de toi.

    On se sourit tous les deux avant de pouffer de rire, un peu gêné par ces déclarations qui mettent à nu nos sentiments. Pourtant, je suis heureux de ne pas avoir réfléchi et de lui avoir dit tout ça. Seulement maintenant, je ne sais plus quoi faire, est-ce que l’on est ensemble ? Est-ce que je devrais retourner dans ma chambre ou…

    Art m’aide à trouver la réponse quand il capture à nouveau mes lèvres tout en m’entrainant lentement dans sa chambre. C’est tendre, doux et je sais qu’avec lui à mes côtés, je pourrais tout affronter. 

    Mes jambes cognent contre le lit et je me laisse tomber dessus en l’entrainant avec moi, nos lèvres se sont à peine séparées. Rattrapant les semaines que l’on a perdues, se laissant enfin aller au désir que l’on a muselé pendant des mois, je gémis quand il mordille ma lèvre inférieure en me jetant un regard brûlant. 

    — Art… je ne sais pas si… je suis prêt.

    Oui, j’ai du désir pour lui, mais j’ai la sensation que l’on brûle les étapes, je veux déjà apprendre ce que c’est d’être son petit ami, avant de passer le cap de devenir son amant. Malgré mon âge, je ne suis jamais allé plus loin que quelques baisers, alors je ne veux pas me précipiter. 

    Art sourit, embrasse le bout de mon nez avant de rouler pour s’allonger à côté de moi, on est tous les deux excités et échevelés, mais on ne se sent pas frustré de ne pas faire plus. 

    — Dors juste avec moi, c’est nul que mon petit copain soit dans la chambre d’à côté. 

    Je hoche la tête et on arrive tant bien que mal, entre plusieurs baisers, à se glisser sous la couverture et s’installer. Mon bras plâtré repose sur son ventre, nos jambes sont emmêlées et il ne se lasse pas de me caresser le dos. Tout mon corps se détend et je comprends que c’est ce qu’il attendait depuis des jours. 

    — Les autres vont être surpris tu crois ? 

    Je ne peux pas m’empêcher de m’inquiéter de leur réaction. Après tout, nos amis ne se doutent pas un instant de ce qui s’est joué entre nous depuis le début de l’année. 

    — Peut-être au début, mais ils seront surtout contents que l’on soit heureux ensemble. Ne t’inquiète pas Rossi, tout se passera bien. 

    Je hoche lentement la tête avant de lui voler un énième baiser et de fermer les yeux pour entamer cette première nuit où on est officiellement devenu un couple.



  • Commentaires

    3
    Samedi 30 Décembre 2023 à 20:07

    Merci pour l'histoire du R

    2
    Mardi 26 Décembre 2023 à 21:25

    Ah merci pour cette histoire

    1
    Lundi 25 Décembre 2023 à 10:49

    Oh cool, le retour des histoires de l'alphabet ^^

    Merci pour cette nouvelle lettre ;0)

    Suivre le flux RSS des commentaires


    Ajouter un commentaire

    Nom / Pseudo :

    E-mail (facultatif) :

    Site Web (facultatif) :

    Commentaire :