• Chapitre 7

    Chapitre 7

    Parce que ça fait du bien à chaque fois que tu me touches...

    Et c'est suffisant pour que je me sente en sécurité.

    C'est pourquoi je me sens à l'aise avec toi.


    C'est le matin où Seeiw se sent le plus abattu depuis un an. Après s'être levé à cinq heures, avoir pris une douche et s'être habillé, il essaie de réveiller les autres garçons, qui dorment à poings fermés, depuis près d'une demi-heure, sans aucun signe de réveil. C'est déjà assez difficile de s'occuper de Cake, et Tar ne fait que doubler la tâche.

    — Cake ! Tar ! 

    C'est pas vrai ! Seeiw a mal à la gorge à force d'appeler leurs noms. L'un d'entre eux se cache sous la couverture, tandis que l'autre n'est absolument pas perturbé.

    — … 

    Un silence.

    — Debout maintenant. L'assemblée est à six heures et demie ! 

    A quelle heure se sont-ils couchés hier soir ?

    — … Mm. 

    Cake laisse échapper un gémissement agacé.

    — Ouvre les yeux tout de suite. Fais-le ! 

    Fatigué par ses tentatives, Seeiw se rapproche et crie à l'oreille de Cake. Cake, qui semble être dans un rêve à l'intérieur d'un rêve, n'entend rien.

    Seeiw fait un signe, pensant qu'il doit utiliser la même méthode. C'est ainsi qu'il saute sur le garçon endormi de tout son corps.

    — Ugh ! 

    Cake halète et tousse violemment alors que sa poitrine est frappée de plein fouet. 

    — Ewww, gémit-il en suppliant. 

    Pourquoi a-t-il fait ça ?

    — Lève-toi ! Il est presque six heures !

    — Ahem. 

    Cake ferme les yeux, ayant mal partout. 

    — Tu m'as encore sauté dessus.

    — A quelle heure tu t'es couché hier soir ?

    — … 

    — Parle. 

    Il évite même le contact visuel. 

    — Tu savais que nous allions au camp et que l'assemblée aurait lieu le matin.

    — Ugh, c'est la faute de Tar. Il avait dit une dernière partie, mais il a fini par en jouer cinq.

    — Ne blâme pas ton ami, dit Seeiw en fronçant les sourcils. Tu as mis la lampe de poche et la louche dans ton sac à dos ?

    — Oh, j'ai oublié.

    C'est ainsi que le garçon qui a fait les bagages pour lui avec diligence depuis hier en début de soirée perd les pédales. 

    — Cake ! On va être en retard !

    — Calme-toi, calme-toi, calme-toi. Je vais les chercher maintenant.

    — Dépêche-toi. Je vais réveiller Tar.

    — Oui, oui.

    Seeiw exhale un profond soupir et se lève de la grande silhouette de Cake. Il lui jette un regard avant de s'asseoir à côté du matelas sur lequel l'autre garçon dort aussi profondément. 

    — Tar. 

    Comme la voix de Seeiw ne fait aucun effet, il s'apprête à sauter sur Tar. Cependant, Cake, apparu derrière lui de nulle part, lui attrape le bras. 

    — Hmm ?

    — Qu'est-ce que tu fais ?

    — Je réveille Tar. 

    Seeiw penche la tête, confus par la question, avant de continuer. 

    — Va chercher tes affaires.

    — Je vais le réveiller.

    — Je me suis habillé et tout. Occupe-toi de tes affaires.

    — Je vais lui donner un coup de pied et il se lèvera tout de suite. Va prendre ton petit-déjeuner. Tu manges lentement.

    — Tu es sûr ? Fais vite, ou on sera en retard.

    — Oui. Je ne serai pas long.

    Malgré son désaccord, Seeiw acquiesce. 

    — D'accord. Je descends en premier.

    Cake sourit et regarde le garçon plus petit sortir de la pièce, puis il donne un coup de pied au cul de son ami effronté, qui se recroqueville sur le matelas, de toutes ses forces.

    — Tar, ouvre tes putains d'yeux !!!

    Seeiw n'a aucune idée de la raison pour laquelle Tar s'est douché et est descendu avant Cake. Il pensait que Cake finirait en premier puisqu'il s'est levé avant Tar. S'il l'avait su, il aurait attendu chez lui.

    Seeiw n'aime pas être seul avec les autres...

    — Tu as assez mangé, Eiw ? 

    Tar s'installe sur une chaise. Il choisit un morceau de pâte frite, le trempe dans du lait concentré et en prend une bouchée.

    — Oui, j'ai beaucoup mangé, répond le garçon. 

    Il ne sait pas de quoi parler, il se sent mal à l'aise.

    — Où est ton sac à dos ? 

    Tar tente d'engager la conversation.

    — À la porte.

    — Oh. 

    Tar acquiesce, marque une pause et prend un autre morceau de pâte frite.

    Seeiw serre les doigts. C'est pour cela qu'il a l'impression d'être à l'origine d'une atmosphère inconfortable lorsqu'il est avec d'autres personnes. Il doit trouver un sujet de conversation alors qu'il n'en connaît aucun.

    Quand est-ce que Cake sera là... ?

    — Dans quel groupe tu es ? C'est le même que celui de Cake ? continue Tar. 

    Il n'a pas envie de rester silencieux. En fait, il veut être plus proche de Seeiw, mais il ne sait pas quoi dire maintenant qu'ils sont seuls. Tar pensait que le manque de compétences sociales de Seeiw ne serait pas un problème. Tar est un bavard. Cependant, il ne s'attendait pas à ce que ce soit aussi gênant. C'est comme si Seeiw ne voulait pas s'asseoir à côté de lui. A-t-il fait quelque chose de mal ?

    — Oui, je suis dans le même groupe que Cake, répond Seeiw doucement. 

    Il se pince les lèvres, se demandant s'il doit répondre. Mais alors quoi ! Ils finiraient de toute façon par se taire. Ne devrait-il pas tout simplement arrêter maintenant ?

    Tandis que Seeiw discute avec lui-même dans son esprit, Cake descend les escaliers avec son sac à dos. Seeiw le regarde avec des yeux pétillants, comme si on lui avait enlevé une pierre de la tête. Il profite de l'occasion pour se lever, regarde Cake enfourner deux morceaux de pâte frite d'un coup et attend dehors.


    Après avoir rejoint l'assemblée et écouté les instructions des professeurs, les scouts et les éclaireuses de la classe de troisième montent lentement dans les bus de leur classe. Peak s'assoit avec Palm, alors Tar s'assoit avec Cake derrière eux. Le siège à côté de Tar est vide car Cake discute avec Seeiw depuis qu'il est monté dans le bus. Ils sont sur le point de démarrer, et il n'est toujours pas revenu. Il devrait juste s'installer là-bas pour être avec Seeiw.

    — Tu en as mis du temps, dit Tar au garçon qui vient de regagner son siège.

    — Ce ne sont pas tes affaires.

    — C'est vrai. 

    Tar, qui se fait gronder, pince les lèvres. Il étudie le visage heureux de son ami et commence : 

    — Hey.

    Cake croise son regard et déchire l'emballage d'un en-cas à base de poisson qu'il a ramené de chez lui. 

    — Qu'est-ce qu'il y a ?

    — Est-ce que Seeiw me déteste ?

    — Pourquoi tu demandes ça ? 

    Seeiw ne déteste jamais personne.

    — C'est comme s'il ne voulait pas me parler. Il m'a donné des réponses courtes et m'a à peine regardé en face.

    — Eiw n'est pas doué pour les relations sociales, explique Cake. … Pour être honnête, ça m'inquiète.

    — Qu'il ne soit pas doué pour les relations sociales ?

    — Pour tout. Eiw a peur des gens. Il n'aime pas se faire de nouveaux amis.

    — Mais Kung et Fee sont ses amis, non ? demande Tar en tendant le cou et en voyant Seeiw assis avec Toffee.

    — C'est vrai. Mais c'est trop peu d'amis pour toute une vie, n'est-ce pas ?

    — Beaucoup de gens n'ont que quelques amis.

    — Mais si tu t'enfuis quand tu rencontres beaucoup de gens et que tu ne fais rien, ou si tu vas dans des endroits inconnus, ce sera mauvais, n'est-ce pas ?

    — … Hum. 

    Tar s'arrête et réfléchit. 

    — Ce sera mauvais, je suppose. Qu'en dit sa famille ?

    — Eiw est le plus jeune des enfants. Hia-Pao le gâte.

    — Toi aussi, tu le gâtes.

    Cake lève les sourcils et regarde son ami. 

    — Quoi ?

    — Tu gâtes aussi beaucoup Seeiw. Tu es bien placé pour parler.

    — … 

    Il ne gâte pas Seeiw. Il prend soin de lui.

    — Il aura plus d'amis quand il sera plus grand. Ce n'est pas comme si tu allais être tout le temps avec lui. Tu auras bientôt besoin de ton espace personnel.

    — Il n'y a pas d'espace personnel entre Eiw et moi.

    — Tu ne diras pas ça quand tu seras plus vieux.

    — Tu parles comme si tu étais un adulte.

    — Espèce de connard, lance le gamin en souriant. Il y a Rin.

    — Qu'est-ce qu'il y a à propos d'elle ?

    — Tu devras prendre du temps pour elle quand tu sortiras avec elle. Tu voudras être avec elle. Vas-tu emmener Seeiw et faire un groupe de trois ?

    — … 

    — Rien que d'y penser, c'est non.

    Cake presse ses lèvres l'une contre l'autre et se tait, sans rien dire de plus.

    Hum… 

    Rien que d'y penser, c'est non.


    Cake s'inquiète du garçon qui marche devant lui. Il fait chaud et le chemin est escarpé. L'uniforme de scout n'est pas très bien ventilé. Tout cela peut vous faire tomber dans les pommes. Seeiw marche aussi très lentement. Cake peut voir d'ici à quel point il est pâle et en sueur.

    Ce n'est que le premier jour, avec la cérémonie d'ouverture, la randonnée, la récitation des vœux et l'épreuve des nœuds. La course d'obstacles n'a pas lieu aujourd'hui, mais il est déjà si fatigué. Ils vont devoir grimper aux cordes et au mur, descendre en rappel et bien d'autres choses encore. Est-ce qu'il va s'en sortir ?

    Une fois qu'ils ont atteint l'aire de repos, Cake s'approche rapidement du garçon qui reprend son souffle près d'un énorme rocher sous les arbres. Il se baisse à côté de Seeiw et lève les yeux. 

    — Ça va ?

    — Oui, ça va.

    — Bois beaucoup d'eau, dit Cake en montrant le gobelet en plastique que Seeiw tient à la main. 

    Il n'en a bu qu'une petite gorgée.

    — Je vais devoir faire pipi.

    — Alors tu peux juste faire pipi. 

    Le plus grand des garçons sourit. 

    — Bois plus d'eau, ou tu vas t'évanouir. Il m'en reste beaucoup. Si tu n'en as plus, prends la mienne.

    — Bois plus d'eau, toi aussi. 

    — Je vais très bien par ce temps. Je fais souvent de l'exercice.

    — Tu vas te plaindre que je ne fais pas d'exercice.

    — C'est vrai, s'amuse le garçon accroupi.

    Seeiw sourit. Il examine le front et les tempes de Cake avant de sortir quelque chose de son petit sac à dos situé à l'arrière. Il essuie la sueur de Cake avec un mouchoir. 

    — Tu transpires plus que moi.

    — Il fait chaud.

    — Oui, c'est vrai. Tu ne supportes pas bien la chaleur.

    — Comme c'est sympa.

    Seeiw lève les sourcils tout en essuyant la sueur de Cake. 

    — Qu'est-ce qui est sympa ? La chaleur ?

    — Je veux dire, c'est sympa qu'on puisse parler dehors, dit Cake en riant. Ce serait bien si on le faisait à l'école.

    — … Non. 

    Il y a des tonnes de gens à l'école. Cake est salué partout. Il n'y a que les élèves de troisième qui sont là. De plus, les activités se font en groupe. 

    — Allons-y. Nous devons rejoindre le groupe. 

    Seeiw met fin à la conversation. Il essuie une dernière fois le front de Cake et jette le mouchoir dans la poubelle sur le côté avant d'entraîner Cake dans le rang.


    Le test des nœuds est la chose la plus ennuyeuse pour Kung car il n'arrive pas à en déterminer l'utilité. Mais qui sait ? Le nœud de cabestan pourrait s'avérer utile à l'avenir. C'est pourquoi son ami essaie d'apprendre au garçon plus grand à le nouer de la sorte, comme un fou. Il peut le faire à sa place. Le superviseur jettera un coup d'œil rapide et signera la réussite.

    Kung accepte le carnet de scout que le superviseur vient de signer pour son nœud de chaise, le troisième. Il se dirige ensuite vers Seeiw, qui laisse Cake faire un nœud autour de son bras.

    — Ugh, Cake, tu dois le mettre à gauche de ce petit trou, pas à droite. Tu es un désastre. 

    Seeiw fronce les sourcils. Cake a pris tellement de temps que son bras commence à s'engourdir.

    — Tu as dit à gauche !

    — Ta gauche !

    Le plus grand des garçons pousse un soupir. 

    — Je peux arrêter ? Les autres laissent leurs amis le faire.

    — Comment tu peux laisser quelqu'un d'autre le faire ?

    — Ce n'est qu'un nœud, Eiw.

    — Oui, ce n'est qu'un nœud. Tu ne fais pas beaucoup d'efforts.

    — Mais siii.

    Seeiw frappe l'épaule de Cake de sa main libre et prend un air sérieux. 

    — Tu te souviens de l'objectif de ce nœud, de son caractère unique et de ses points forts ? 

    — Tu me l'as déjà dit une douzaine de fois , s'amuse Cake.

    — Tu n'as qu'une seule signature pour un seul nœud. Tu n'y arriveras pas à temps.

    — Si tu le fais pour moi, tu n'auras pas à m'apprendre.

    — Ne te plains pas. Fais-le vite et bien.

    Faisant un nœud à proximité, Kung sourit secrètement tandis que ces deux-là se disputent en fronçant les sourcils, une corde entre eux. L'un est attaché par le bras tandis que l'autre tient les deux extrémités.

    C'est Seeiw.

    Il est sérieux pour les choses insignifiantes.

    Et Cake n'a jamais montré le moindre agacement à l'égard de ces choses insignifiantes.


    Cake fronce les sourcils et se précipite vers Seeiw lorsque celui-ci tente d'aider un camarade de classe à porter la marmite de riz. 

    — Laisse-moi faire, Eiw. 

    Cake le bloque rapidement avec son corps. Il saisit la poignée et lance : 

    — Tu vas la renverser. C'est chaud.

    — Je veux aider. Il y a beaucoup de gens là-bas.

    — Tu ne peux pas soulever ça. 

    Cake se redresse après avoir incliné la marmite pour verser l'eau. 

    — Tes mains sont couvertes de charbon. Lave-les avant de te frotter accidentellement les yeux.

    Seeiw fait la moue. 

    — Quel casse-pieds. Je ne t'ai jamais fait remarquer que tes joues étaient barbouillées.

    — Où ?

    — Non. Un peu plus à gauche. 

    Seeiw sourit tandis que Cake essuie la trace avec le dos de sa main. 

    — Non, non. Descends ta main.

    — C'est ici ?

    Le garçon pousse un soupir et tend la main pour l'aider. 

    — Ici.

    — Pourquoi tu ris ? 

    Les joues touchées, Cake lève les yeux vers le visage amusé de l'autre garçon.

    — Je te frotte les joues, dit le garçon en riant, les deux mains en l'air. Mais mes mains sont aussi sales, s'amuse-t-il.

    — C'est drôle, hein ?

    — Tes joues sont toutes noires.

    — Tu te moques de moi ? 

    — Non, je ne me moque pas. J'ai simplement oublié.

    Cake plisse les yeux. Il n'arrive pas à croire ce visage. Seeiw est tout sourire. 

    — Arrête de sourire et je te croirai.

    — C'est drôle. On dirait que tu fais partie d'une tribu.

    — Eiwww. 

    Seeiw détourne son regard de la joue sale de Cake lorsqu'il entend la voix de Toffee derrière lui. Il saisit la taille de Seeiw.

    — Fee. 

    Seeiw se tourne vers son ami, son estomac lui faisant mal à force de rire. 

    — Ton groupe a fini de faire cuire le riz ?

    — Presque. Nous sommes en train de vider l'eau.

    Seeiw sourit. 

    — Regarde les joues de Cake.

    Toffee hausse les sourcils. Il suit les yeux de Seeiw et grimace. 

    — Qu'est-ce que tu fais ? Ce n'est pas mignon.

    Les lèvres de Cake se retroussent à cette remarque. 

    — Je vais te frapper.

    — Oh, tu peux essayer. Je me cache derrière Eiw.

    — N'attrape pas trop Eiw. Tu es aussi fort qu'un éléphant.

    — C'est toi qui parles, tu es aussi grand qu'un immeuble.

    — Essaie d'atteindre ma taille.

    — Espèce d'ours noir.

    — Espèce de porcelet.

    Seeiw ne peut s'empêcher de rire tandis que les garçons devant et derrière lui se disputent au dessus de sa tête.

    — C'est drôle, hein, garçon condiments ? dit Cake en fronçant les sourcils devant son voisin.

    Seeiw fronce le nez et termine par “Va te laver le visage, garçon dessert”. Il tire la langue au garçon aux joues sales et renvoie Fee, laissant Cake sourire d'amusement avec la marmite de riz tout seul.


    Après le repas, le professeur emmène les élèves récupérer leurs sacs à dos pour qu'ils puissent se reposer. Les logements sont des maisons en briques les unes à côté des autres. Une maison peut accueillir quatre groupes. Il y a un chemin entre les plateformes des deux côtés qui sont utilisées comme aires de repos, avec des nattes étendues et des oreillers par-dessus. Les couvertures sont pliées sur les bords des lits de fortune.

    Une fois les sacs à dos rangés, les enseignants laissent les élèves de chaque maison se laver, un bâtiment à la fois.

    Seeiw se met dans la file d'attente et suit Kung. Tout le monde se tient de front devant le puits en ciment rempli d'eau à ras bord. Il touche l'eau avec sa paume et a des frissons. C'est terriblement glacial. Seeiw jette un coup d'œil à ses camarades et soupire. Pourquoi tout le monde est-il si bien bâti alors qu'ils ont tous le même âge ? Seeiw n'est pas du tout comme ça. Son corps n'est pas désirable. Pas de muscles. Que des os.

    — Eiw, comment se fait-il que ta peau soit si claire ? demande son camarade à côté de lui. 

    Il est dans la même classe, mais dans un groupe différent. Seeiw ne se souvient pas s'ils ont déjà échangé un mot.

    — Ah... Je ne sors pas beaucoup.

    — Ta peau est plus claire que celle de ma sœur. 

    Les yeux du camarade de classe s'écarquillent. Il s'approche et lui prend le bras. 

    — Tu ne fais pas de sport à l'extérieur ?

    — Non… 

    Seeiw fronce les sourcils. Il veut retirer son bras, mais la prise est ferme.

    — Tu n'as aucune trace de bronzage.

    — Je vais me laver. Lâche-moi, dit le garçon. 

    C'est déjà assez horrible de devoir porter seulement un caleçon pour se laver avec les autres. Il veut en finir rapidement et partir. Seeiw fronce les sourcils lorsqu'il entend une voix familière et que le plus grand garçon s'interpose entre eux.

    — Désolé, dit Cake. Laisse-moi me glisser ici. Il y a trop de monde là-bas.

    Le camarade de classe répond par un haussement d'épaules. Il se lave avec sa louche et secoue un peu la tête à cause du froid.

    Cake soupire avant de reporter son regard sur Seeiw. 

    — Vas-y. 

    Il ne peut vraiment pas rester seul.

    Seeiw acquiesce. 

    — Je sais, dit-il en se forçant à mettre de l'eau dans la louche. 

    Il s'en verse plusieurs fois sur la tête.

    C'est la pire des tortures pour quelqu'un qui aime les bains chauds !


    — Tiens. J'en ai acheté une pour toi. 

    Une tasse de chocolat chaud en papier est tendue à Seeiw. Ce dernier, qui vient d'enfiler son pyjama, l'accepte et lève les yeux pour voir Toffee qui lui sourit encore.

    — Hmm, merci, Fee. C'est combien ?

    — Laisse tomber. Ce n'est pas grand-chose. Tu pourras m'offrir une boisson gazeuse la prochaine fois.

    Seeiw sourit. Il boit une gorgée de chocolat et expire. 

    — J'ai chaud maintenant.

    — J'ai vu Kung au snack. Il a dit que tu tremblais après avoir pris ton bain.

    — L'eau était glaciale.

    Toffee rit. 

    — C'est vrai. Il n'y a pas de chauffe-eau.

    — Oui.

    — Où est Cake ?

    — Il se promène avec son ami, je crois. Il a dit qu'il y avait de grands arbres là-bas, dit Seeiw en sirotant son chocolat. Il va encore se salir après s'être lavé. 

    Cake est malicieux.

    — Ça va aller. Il fait beau.

    — Je préfère rester ici.

    — Les gars de notre groupe nous ont demandé de jouer à un jeu ensemble. Quelqu'un a apporté le Monopoly. Tu veux participer ?

    — Quelqu'un l'a apporté ici ?

    Toffee acquiesce. 

    — Oui. C'est hilarant.

    — Ton groupe, ils sont tous de notre classe ?

    — Seulement deux. Les deux autres sont de l'autre classe. Il n'y aura que mon groupe.

    — Oh, oui... ?

    — Tout va bien se passer. Jouons ensemble puisque les professeurs nous laissent nous reposer. 

    Le garçon qui veut jouer ajoute rapidement : 

    — Nous ne sommes que six.

    — … 

    — Viens.

    — Je ne resterai pas longtemps.

    Sur ce, Toffee sourit et hoche la tête à plusieurs reprises avant d'entraîner Seeiw hors de la maison.

    Ils jouent d'abord au Monopoly, mais après deux tours, un camarade de classe a l'idée de raconter une histoire. Et l'histoire du camp scout n'est rien d'autre que cela...

    — La maison avait une poutre en bois parce que le plafond était haut et ouvert. 

    Au moment de l'apogée, tout le monde se tait, écoutant attentivement l'histoire. L'atmosphère n'en est que plus effrayante.

    — Quelqu'un devait dormir sous la poutre.

    Seeiw ne comprend pas pourquoi il doit baisser la voix lorsqu'il raconte une histoire effrayante. Le bruit des feuilles qui bougent ne fait qu'ajouter à l'effroi. Seeiw déglutit, sa gorge s'assèche. Il serre ses poings moites. Des frissons lui parcourent la nuque et lui donnent envie de pleurer.

    — Quand tout le monde s'est endormi la nuit, la personne allongée sous la poutre est toujours éveillée.

    Seeiw serre les lèvres.

    Il ne veut pas écouter, mais il a peur de s'éloigner.

    Que doit-il faire ?

    — Quand il a levé les yeux, il a vu une paire de jambes pâles suspendues à la poutre.

    À ce moment-là, le garçon qui a terriblement peur des fantômes se lève. Toffee tourne la tête. Remarquant les yeux inhabituellement rouges de son ami, il se lève lui aussi, choqué. 

    — Tu t'en vas, Eiw ?

    — J'ai sommeil.

    — Je t'accompagne.

    Seeiw acquiesce. Il a une envie folle de dormir.

    Alors qu'il s'apprête à aller se coucher, Cake surprend Seeiw en train d'entrer dans la maison et le regarde jusqu'à ce que leurs yeux se croisent. Lorsque Seeiw s'apprête à pleurer, Cake s'approche immédiatement de lui.

    Seeiw serre les lèvres et regarde la poutre en bois au-dessus de lui. L'histoire de tout à l'heure se répète dans sa tête.

    — Qu'est-ce qui ne va pas, Eiw ?

    — … 

    Le garçon effrayé lève les yeux. 

    — Les gars racontaient une histoire de fantôme...

    — Une histoire de fantôme ? demande Cake en fronçant les sourcils. Pourquoi tu as écouté ?

    — Je ne voulais pas, mais j'avais peur de rentrer seul.

    — Hein ? Pourquoi tu ne l'as pas dit à Fee ? 

    Cake les a vus assis ensemble quand il est passé.

    — … Je ne voulais pas les interrompre.

    — Tu es encore une fois inutilement prévenant.

    Seeiw fronce les sourcils. 

    — … 

    Peut-il ne pas le gronder maintenant ? Il se sent très mal.

    — Échange ta place avec celui qui dort à côté de moi.

    — Non. Je ne veux pas le déranger.

    — C'est bon. Je vais lui parler, dit Cake, sans laisser Seeiw discuter. 

    Il frappe le garçon du même groupe dont la place est à côté de la sienne et lui demande d'échanger avec Seeiw. Le garçon n'y voit pas d'inconvénient et accepte. Cake porte donc l'oreiller, la couverture et le sac à dos de Seeiw sur le tapis à côté du sien.

    Au bout d'un moment, leur professeur vient à la maison pour s'assurer que tout est en ordre. Elle leur dit d'aller dormir et éteint la lumière. La maison est plongée dans l'obscurité.

    Seeiw se couvre avec la couverture de la poitrine aux pieds, se sentant en danger car ses yeux ne se sont pas adaptés à l'obscurité.

    — Eiw.

    La voix fait bondir le cœur de Seeiw. Il se tourne vers Cake après s'être ressaisi. 

    — Hmm ?

    — Tu ne dors toujours pas ? demande doucement Cake, en parlant à voix basse pour ne pas déranger les autres.

    — Non.

    — Tu as peur ?

    — … Oui.

    Ils se regardent dans le noir. Le plus grand des garçons lève le bras, montrant l'espace sous la couverture. 

    — Qu'est-ce que tu penses de ça ?

    Sans répondre, Seeiw se glisse à l'intérieur et enfouit son visage dans la poitrine de Cake.

    Ce dernier glousse et murmure :

    — Bonne nuit.

    — Ouais. Bonne nuit, répond le garçon. 

    La peur qui s'est emparée de son cœur s'estompe peu à peu. Ses yeux se ferment lentement et il entre dans le pays des rêves.


    Seeiw est le premier à se réveiller le matin. Il se lève plus tôt que d'habitude parce qu'il est matinal et qu'il ne connaît pas l'endroit. Seeiw enfile des vêtements décontractés et se lave pendant que les autres dorment à poings fermés. Il revient à la maison au moment où leur professeur les réveille pour qu'ils courent en guise d'exercice matinal.

    Seeiw fronce les sourcils. Il déteste courir. Il déteste que son cœur batte trop vite, qu'il soit essoufflé et qu'il ait des crampes d'estomac. Le camp scout est la seule raison pour laquelle il doit faire de l'exercice le matin, contre son gré.

    Il a encore plus envie de pleurer lorsqu'il doit se réunir avec le groupe après le petit déjeuner pour la course d'obstacles.

    L'activité qu'il déteste tant...

    — Tu as l'air de bonne humeur, dit Seeiw au garçon qui vient de s'installer à ses côtés. 

    Un sourire de satisfaction se dessine sur son visage.

    Le plus grand rit.

    — J'adore les parcours d'obstacles. Mon préféré, c'est de grimper aux cordes qui traversent la rivière.

    Seeiw se retourne et voit les garçons de son groupe se tenir à la corde et saisir l'autre corde à deux mains. En équilibre, ils font lentement chaque pas pour traverser la rivière de l'autre côté. Pendant ce temps, les superviseurs militaires secouent les cordes pour les faire tomber. Il est déjà difficile de garder l'équilibre, mais il faut aussi s'accrocher fermement à la corde pour qu'elle ne glisse pas.

    — Si tu as mal aux mains, lâche la corde et tombe, suggère Cake.

    — Je ne veux pas tomber dans l'eau.

    — La corde va te couper les paumes comme l'année dernière.

    — Je ne sais pas pourquoi nous devons grimper à la corde chaque année.

    Cake rit.

    — C'est amusant.

    — Tu es fort. 

    Seeiw fronce les sourcils et regarde Kung devant lui. 

    — Kung, ça te plaît ?

    — Je m'en fiche. Je veux juste en finir, dit le garçon aux cheveux bouclés, en regardant Seeiw dans les yeux. Suis-moi. Je vais m'occuper de la secousse, dit-il à Seeiw, avant de reporter son regard sur le garçon à côté de lui. Tu restes derrière lui.

    Cake acquiesce et regarde Kung grimper le long des cordes. Lorsqu'il est à environ deux épaules, Cake pousse Seeiw doucement pour qu'il démarre. Il ne peut s'empêcher de sourire devant la posture adorablement maladroite du garçon plus petit. Ses mains sont si petites qu'elles couvrent à peine l'épaisse corde, et son corps oscille d'avant en arrière, en déséquilibre. Cake trouve le bon moment pour suivre Seeiw et l'aider à supporter les secousses des superviseurs.

    Bien que ses amis bloquent les secousses, Seeiw n'est pas encore assez fort. C'est pourquoi le garçon, dont les mains sont rougies par la prise, est le premier du groupe à tomber dans l'eau. Seeiw refait surface immédiatement et fait la moue, ce qui fait sourire Cake. Cake fait alors semblant de faire un faux pas et de tomber.

    Le plus grand des garçons relève ses cheveux et sourit à Seeiw en fermant les yeux. 

    — Je suis tombé.

    Seeiw rit.

    — Tu as fait exprès de tomber.

    — Pour que tu ne sois pas seul. 

    Cake sourit et passe un bras autour de la taille de Seeiw, qui a du mal à flotter. 

    — Ne te frotte pas les yeux. Ils vont devenir rouges.

    — L'eau pique.

    — Nage jusqu'au rivage et lave-toi rapidement.

    Seeiw nage lentement jusqu'à l'autre rive, suivi par Cake, et un superviseur le tire vers le haut. Alors que Seeiw s'apprête à se laver, Cake, qui le suit, s'exclame à haute voix. Seeiw se retourne et court vers lui.

    — Cake ! 

    Choqué, Seeiw cherche une blessure sur son corps jusqu'à ce que ses yeux tombent sur une longue égratignure sanglante sur sa jambe. Seeiw fronce les sourcils et vérifie. 

    — Comment tu t'es fait ça ?

    — Quelque chose m'a griffé sous l'eau. 

    Cake ferme les yeux. Ça fait vraiment mal.

    — Emmène ton ami se faire soigner, dit le superviseur sur le côté. Allez à la cabine sous l'arbre. Il y a une trousse de premiers secours. Le professeur s'en occupera.

    Seeiw acquiesce et conduit Cake comme on le lui a demandé. Après avoir nettoyé la blessure, Cake s'assoit et laisse le professeur le soigner. Il s'avère qu'il ne peut participer à aucune activité aquatique. Le résultat est décourageant pour le garçon plus petit.

    — C'est parce que je suis tombé dans l'eau.

    Cake hausse les sourcils. 

    — Quel est le rapport avec ça ?

    — Si je n'étais pas tombé, tu ne serais pas tombé.

    — C'est moi qui ai sauté, dit le garçon blessé en tapotant le front de Seeiw. Tu réfléchis trop.

    — … Tu es blessé.

    — Heureusement que ce n'est pas toi.

    — … 

    Seeiw presse ses lèvres l'une contre l'autre, les joues en feu. Il ne comprend pas pourquoi il n'arrive pas à croiser le regard de Cake ces derniers temps. Il se sent mal à l'aise, comme lorsqu'il a couru ce matin. Son cœur s'emballe comme lorsqu'il fait de l'exercice, cette activité qu'il déteste tant.

    Voyant l'expression de Seeiw, Cake rit et lui pince doucement le nez. 

    — C'est juste une égratignure.

    La différence, c'est que Seeiw ne déteste pas cette sensation… 


    Après le feu de joie, Seeiw rentre à la maison. Il a beau essayer, il ne trouve pas le garçon qui a dormi à côté de lui la nuit dernière. La dernière fois que Seeiw a vu Cake, c'était avant les représentations. Il se met en pyjama et attend que les autres se couchent les uns après les autres. Pourtant, Cake ne s'est pas montré.

    Où est-il ? Pourquoi inquiète-t-il Seeiw de la sorte ?

    Seeiw fronce les sourcils, imaginant toutes sortes de scénarios terribles. Avant qu'il ne décide de faire quoi que ce soit, le garçon qui est parti depuis des heures ouvre la porte au moment où le professeur vient les voir et éteint la lumière. Cake se dirige directement vers sa natte. Leurs regards se croisent dans l'obscurité, puis Seeiw se renfrogne.

    — Hmm ? Tu es encore debout ? Cake sourit, grimpe et s'assoit à côté de lui. Tu as dit que tu étais fatigué aujourd'hui.

    — Tu étais où ? 

    — Hmm ?

    — Tu ne m'as pas dit où tu étais allé. J'étais inquiet.

    Cake sourit. 

    — Je suis désolé. J'étais au téléphone. Le signal était mauvais.

    — Avec ta famille ?

    — Non. 

    Le plus grand des garçons secoue la tête. 

    — J'ai appelé Rin.

    — ... Oh.

    — Je ne l'ai pas appelée hier. Elle m'a manqué.

    Aïe...

    Seeiw fronce les sourcils avec une douleur dans la poitrine.

    Cake lève les sourcils et demande au garçon qui ne bouge pas. 

    — Tu es fâché ? Je suis désolé. J'essayais de trouver le signal.

    — Je ne suis pas fâché.

    — Allons nous coucher.

    — … Oui.

    Seeiw s'allonge et se tourne vers le plus grand des garçons, qui lui ouvre les bras comme hier. 

    — Tu veux un câlin ?

    — … 

    Mais Seeiw ne s'approche pas tout de suite de lui. 

    — Hmm, non.

    — Pourquoi ?

    — Je n'ai plus peur, répond le garçon. Bonne nuit. 

    Il tourne le dos et entend Cake répondre à son tour.

    Seeiw ne comprend pas ce qu'il ressent en ce moment.

    Mais ce sentiment... il le déteste.



  • Commentaires

    1
    Jeudi 2 Novembre 2023 à 00:39

    Merciiiiii pour se chapitre tj aussi incroyable cette histoire 

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