• Chapitre 6

    Chapitre 6
    Secret Feeling [1/2]

    New est ordinaire, il est comme tous les autres camarades de notre lycée. Il évolue avec son petit groupe d'amis sans faire d’histoire et sans chercher à être populaire. Il se fond dans la masse et pourtant, chaque fois qu’il est présent dans la foule, je ne vois que lui, comme s’il était plus lumineux que les autres. Je ne m’explique pas pourquoi je le cherche toujours des yeux. Pourquoi je suis heureux quand je me rends compte qu’il me regarde ? Et surtout, pourquoi quand Sing l'invite à passer la soirée avec nous, mon coeur fait un salto arrière avant de fébrilement reprendre sa course ?

    J’ai bu moins que d’habitude et pourtant, je ressens une sensation d’ivresse intense à chaque fois qu’il sourit ou que son rire se fait entendre. Je ne comprends pas l’attraction qu’il représente et j’essaie d’en faire abstraction en écoutant les histoires de mon meilleur ami. Plus tard dans la soirée, personne ne semble faire attention à lui quand il quitte le salon en tanguant et je m’inquiète, je n’aime pas le voir s’éloigner de moi dans cet état. 

    J’hésite un moment, finissant mon verre comme pour me donner du courage et alors je finis par me lever et aller le rejoindre à l’extérieur. Est-ce que c’était une erreur ? Je n’en suis pas certain, en fait, pour le moment j’ai la tête vide et je suis juste incapable de penser à autre chose que ses lèvres charnues bataillant contre les miennes, au picotement que je ressens quand ses doigts touchent ma peau et à la lueur dans son regard qui me tord le ventre quand nos regard se croisent.

    Pourtant, dès qu’il quitte la voiture, la question revient et tourne en boucle dans ma tête. J’ai encore le goût de ses lèvres sur les miennes, je sens encore la chaleur de son corps collé au mien et je dois me faire violence pour ne pas lui courir après et l’embrasser encore fiévreusement sur le pas de sa porte. Pourtant, je me demande seconde après seconde si ce qui vient de se passer, aussi bon soit-il, n’était pas une erreur.

    — Tayyyyyyyy !!

    Je ferme les yeux, pour une fois soulagé que la voix geignarde d’un Sing bourré me ramène les pieds sur Terre. 

    — Je veux être amoureux moi aussi.

    Je sursaute à ses paroles, regardant nerveusement en direction de la maison de New, mais il est rentré depuis longtemps maintenant. 

    — Dors, Sing.

    Il marmonne quelques mots avant de retourner dans son sommeil d’ivrogne et je pousse un long soupire avant de le ramener chez lui. Je suis étonné quand, en arrivant enfin chez moi, je trouve ma mère en train de regarder la télévision. Je ne suis pas vraiment proche d’elle, mais, c’est ma mère, elle aura sûrement les bonnes réponses à me donner.

    — Maman… je peux te poser une question ? demandé-je, mais ma mère détourne à peine le regard de l’écran, se contentant de me faire un léger signe de tête. Qu’est-ce que tu penses de… un garçon qui aime un autre garçon ?

    — C’est juste… un effet de mode ou de la curiosité, je pense. Regarde comme une femme et un homme ensemble c’est beau, explique-t-elle avant de se figer pour se tourner vers moi. Pourquoi ? Tu aimes un garçon ?

    Je m’affole quand ses yeux se mettent à me scruter, soupçonneux. Je ne suis pas amoureux de New, elle a raison, j’ai juste eu un moment d’égarement, à cause de l’alcool et… c’est tout.

    — Non ! Non, bien sûr que non. C’est un ami qui se posait la question, alors je voulais… avoir ton avis.

    Elle hoche lentement la tête, satisfaite, avant de replonger dans son drama et je file sans demander mon reste dans ma chambre.

    Je suis un lâche, c’est tout ce que j’arrive à penser quand je fuis le couloir où j’ai abandonné New. Il a tenté de garder le sourire, mais j’ai vu que mon rejet lui a fait mal. Je n’arrive pas à expliquer pourquoi il semble si blessé, j’ai l’impression que tout tourne dans ma tête et j’ai juste besoin de m’éloigner. Je rentre dans la classe et me laisse tomber à ma place avant de me frotter vigoureusement les cheveux. Je me mords la lèvre et lutte contre l’envie de retourner le voir, de le prendre dans mes bras et de tout faire pour effacer la douleur que j’y ai lu.

    — Hey Tay, tu as la gueule de bois ou quoi ?

    C’est un Sing tout pimpant malgré son état de cette nuit qui me sauve la vie. Je me redresse et soupire de soulagement, avec lui dans les parages, je sais que je ne penserai plus à ce trouble stupide qui me tord le ventre. Je dois juste oublier et ne plus penser à New. 

    — Je me disais que l’on devrait inviter New plus souvent, il est super drôle en fait.

    Ma mâchoire se crispe et finalement, j’ai bien envie de l’étrangler tout de suite cet abruti. 

    — Non !

    Il me regarde, surpris, généralement, je ne suis pas obligé de faire des éclats de voix. Heureusement, l'arrivée du professeur m’empêche d’expliquer ma réaction. Malheureusement, je ne suis que trop conscient du fait que New n’est pas venu en classe et mon coeur se serre douloureusement à cause de l’inquiétude que je tente de faire taire en vain.


    Ma curiosité ou mon envie d’être à la mode comme le pense ma mère, me suit finalement depuis bien trop longtemps. Malgré ce que je veux, je n’arrive pas à oublier notre baiser, il m’obsède et je ne me suis senti bien que les fois où l’on finissait par se retrouver dans un coin sombre à s’embrasser jusqu’à en perdre haleine. J’aime autant que je déteste ces soirées. Je les aime car je sais qu’il sera là, sa présence m’apaise, me donne la sensation d’être à ma place et quand enfin on finit par craquer, par s’abandonner à la tension qui règne entre nous, j’oublie la réalité. Je les déteste, car vient toujours le moment où la réalité reprend ses droits, où je me rends compte que c’est impossible, qu’un homme doit être avec une femme et alors irrémédiablement, je lui fais du mal.

    J’essaie de trouver la femme qui me fera oublier mon trouble, qui me permettra de retrouver la tranquilité d’esprit. Seulement, chaque fois que l’une d’elle pose sa bouche contre la mienne, c’est fade, c’est terne et je ne peux pas m’empêcher de les comparer avec lui. Que ce soit ce qu’il me fait ressentir ou bien juste son physique. Je sais que c’est horrible, je me sens comme un monstre à chaque fois que je le fais, mais c’est plus fort que moi. 

    J’essaie de ne pas le regarder, de ne pas faire attention à ce qui lui arrive, seulement, une fois encore, je ne me maîtrise pas. Que ce soit la jalousie que je ressens à chaque fois que Ton s’approche trop près de lui ou bien l’envie de le consoler comme la fois où il s’est effondré après le départ de Krist. Je veux être là pour lui, mais chaque fois, les mots de ma mère et la peur du regard des autres me retiennent et m’en empêchent.

    Je sens son regard sur moi et je resserre mon étreinte autour de l’épaule de la fille qui passe du temps avec moi. Je la tiens fermement, comme un rempart contre l’envie de me lever et d’aller lui parler. Je dois rester concentré sur Sing et ce qu’il raconte, même si la tentation de me tourner vers lui est grande. Je me répète sans cesse que c’est pour voir si mon trouble est passé, mais la vérité, c’est juste parce que je veux pouvoir me plonger dans son regard même pour une poignée de secondes. Il me manque terriblement et plus le temps passe loin de lui, plus mon coeur me semble lourd.

    Son exclamation soudaine fait tomber toutes mes bonnes résolutions et je le regrette aussitôt. Ton et lui se regardent droit dans les yeux, elle lui tient la main et je sens une boule de colère me serrer la gorge. J’ai envie de me lever, de les rejoindre et de prendre moi-même cette main. New tourne la tête à la recherche de quelque chose et nos regards se croisent, il semble surpris et reporte rapidement son attention sur celle qui semble être sa petite amie. 

    — Qu’est-ce que tu as Tay ? On dirait que tu vas tuer quelqu’un.

    La voix plutôt hésitante de Sing s’élève et je sens ma mâchoire se crisper malgré moi. Je me lève sans répondre, j’attrape la main de cette fille dont j’aurai oublié l’existence dans peu de temps et je fuis l’image de New et Ton formant un couple heureux. Une image qui veut dire qu’il m’a oublié, que je suis le seul à me prendre la tête avec ce que je peux ressentir chaque jour et qui de toute façon n’a aucune importance.

    Je soupire alors que le bus reste désespérément garé alors que l’heure de départ est dépassée depuis bien longtemps. Pourtant, j’ai vu Sing discuter avec le chauffeur à plusieurs reprises et je ne suis pas rassuré sur ce qu’il est en train de mijoter. J’ai vraiment besoin de cette sortie, de m’éloigner de lui, de prendre l’air et de m’épuiser physiquement et peut-être enfin trouver une réponse au milieu des bois.

    Alors quand il apparaît soudain devant moi, essoufflé et rouge d’être le centre de l’attention, j’ai l’impression que l’univers se moque de moi. J’essaie de ne pas faire attention à lui, de ne pas sentir sa présence juste à côté de moi, mais c’est difficile, cinq mois que l’on n’a pas été si proche l’un de l’autre et pourtant, je me force à ne même pas le regarder.

    J’ai peur d’ouvrir la bouche et de ce qu’il en sortira, j’ai peur qu’il me rejette à cause de Ton et je finis par craquer, lui demander et la vague de soulagement qui envahit toute ma poitrine me surprend. Je me détends et un instant j’arrête de lutter, savourant juste le bien-être quand nos doigts s'effleurent et je ne cherche pas à en savoir plus, je profite juste du moment.

    Alors que je marche le long du chemin tracé en portant New sur mon dos. J’ai encore les jambes cotonneuses de ce que nous avons fait un peu plus tôt. Et je pense sérieusement à tuer Sing quand je serai sorti de cette forêt. Je sais que la présence de New et notre binôme n’a rien d’innocent. En même temps, je n’ose pas imaginer ce qu’il peut savoir ou ce qu’il sait pour avoir organisé ça. Pour nous avoir pousser à craquer une fois de plus. Je peux sentir le souffle de New contre ma nuque et je n’ai qu’une envie, celle de quitter le chemin encore une fois. De le coller contre le sol et faire plus que de nous frotter l’un contre l’autre. Je tente de repousser les images de lui tremblant, échevelé et gémissant dans mes bras alors…

    Je suis soulagé quand enfin on arrive au point de ralliement, j’ai besoin de m’éclaircir les idées. L’embrasser, le serrer dans mes bras, on l’a tellement fait au cours des années, que cela ne me trouble plus d’y penser. Mais là, c’est différent, c’était plus puissant et je n’arrive pas à contrôler les battements de mon cœur qui ne sont toujours revenus à la normale. J’ai un besoin physique de lui et j’ai peur de ce que cela veut dire de moi, de ce que je suis et de comment les gens vont me percevoir s’ils venaient à l’apprendre. 

    Je le dépose auprès des infirmiers, un instant je veux lui parler, lui demander que l’on se retrouve plus tard. Pour en discuter, pour faire l’amour, pour… tout s’embrouille dans ma tête et quand il se penche pour regarder sa cheville je sens le rouge me monter aux joues. Je prends rapidement la fuite quand le suçon que je lui ai laissé et qui trône fièrement sur son cou semble me narguer. Je me force à ne pas courir, juste à marcher vite et à rejoindre l’abri des arbres.

    Je me laisse rapidement tomber contre un tronc, le souffle court. J’ai l’impression d'étouffer et j’ai besoin de réponse pour ne pas devenir fou. La main tremblante, je sors mon téléphone et réussis à appeler celui qui m’a fichu dans une telle situation. 

    — Comment tu as su ?

    — Tay ? Je… Tout va bien ?

    La voix de Sing qui était enjouée quand il a décroché devient soudain inquiète et c’est peut-être dû aux sanglots que je ne parviens pas vraiment à contrôler et qui me surprennent autant que lui. 

    — Je vous connais depuis longtemps et… vos regards ne mentent pas.

    — Alors tout le monde est au courant ?

    Ma voix finit en plainte, ma tête tombe en arrière contre le tronc et je ferme les yeux très fort pour ne pas voir les bois se mettre violemment à tourner. Si ma mère venait à l’apprendre, je peux déjà imaginer son expression déçue sur son visage et je peux entendre son discours, un homme doit aller avec une femme, le reste n’est qu’une passade.

    — Quoi ? Tay, attends, ce n’est pas ça, commence-t-il, puis sa voix se fait soudain lointaine et je comprends qu’il chuchote à Ton avec qui il était en duo. Où es-tu ? Je viens te retrouver, d’accord ?

    Je lui explique du mieux que je peux où je me trouve, mais je ne suis pas sûr qu’il réussisse à me retrouver. Je ne me souviens même pas d’avoir raccroché, mais au bout d’un long moment, le bruit d’une branche qui craque me fait sursauter et il est là.

    Il ne parle pas, il se contente de me rejoindre et de s'agenouiller près de moi pour me prendre dans ses bras. Habituellement, je l’aurais repoussé en l’insultant, lui disant que je n’ai pas besoin de lui pour aller bien. Un mensonge, comme tant d'autres dans ma vie, car j’ai besoin de lui, de son étreinte et de son attention pour ne pas complètement craquer et perdre pied.


    Sur les conseils de Sing, j’ai tenté de discuter à nouveau avec ma mère. Il pensait sérieusement qu’elle n’était pas contre l’homosexualité, mais juste qu’elle ne se rendait pas compte des mots qu’elle employait. Si elle s’est montrée moins véhémente, elle n’en est pas moins restée sur ses positions. Un couple d’hommes n’est pas sérieux, c’est juste quelque chose d'éphémère, de la curiosité qui sera vite oublié quand LA femme arrivera dans la vie des deux.

    Je n’ai pas eu le courage de la contredire, de lui avouer que peut-être j’étais un de ces hommes-là. Je ne voulais pas entrer dans de longs discours stériles sur ce que je ressens vraiment au fond de moi. Cependant, j’ai arrêté de sortir avec des filles, je ne voulais plus les utiliser pour tenter d’oublier. Sing a eu de sages paroles ce jour-là et il avait raison, ce n’est pas en me cachant derrière une femme que mes sentiments disparaitront. 

    Ma relation avec New n’a pas changé, mais depuis cette sortie en forêt, on fait toujours en sorte que rien de physique n’arrive entre nous. De toute façon, on n’a pas vraiment le choix, on se côtoie plus souvent qu’avant à cause de Ton et Sing qui ont entamé une histoire. J’ai toujours un sourire amer quand je pense que j’imaginais la jeune femme en couple avec New.

    C’est d’ailleurs à cause de ces deux-là que je me retrouve dans cette rue à la nuit tombée. Ils vont se marier dans quelques semaines et je dois faire divers achats en tant que témoin du futur marié. Je ne fais pas réellement attention aux gens autour de moi, j’ai le nez plongé sur la liste bien trop longue des choses que je dois régler quand un rire et une voix s’élèvent sur ma droite et je me retrouve brusquement figé sur place.

    Je relève brutalement la tête et j’oublie tout, le mariage, la liste, le ciel sombre et menaçant. J’expire tout l’air présent dans mes poumons et j’ai la sensation que je viens de prendre un violent coup dans l’estomac. New est juste là, il sort d’un motel accroché au bras d’un homme de notre âge. Je ressens un mélange de tristesse, de colère, de jalousie et d’envie quand il vole un baiser à ces lèvres que j’ai tant embrassé. Ils ne regardent pas autour d’eux, ils se fichent que l’on puisse les voir, ils sont amoureux. Cette constatation me brise le cœur, je ne veux pas qu’un autre puisse le toucher, je ne veux pas que New en aime un autre, je…

    Je fais demi-tour sans demander mon reste, tant pis pour la liste, tant pis pour le mariage, je ne veux pas voir les joues roses de New alors qu’il murmure sûrement des mots d’amour à un autre. Je mords durement ma lèvre inférieure pour ne pas craquer, pour ne pas montrer ma détresse, seul Sing m’a déjà vu dans cet état et comme le dit si bien ma mère, un homme c’est fort, ça ne pleure pas, ce sont les filles qui pleurent. 

    Je suis assis au comptoir d’un bar quelconque, je suis entré dans le premier que j’ai croisé et j’ai commandé un verre d'un alcool fort au goût atroce. Je me dis bêtement que si je bois assez alors je pourrai oublier tout ce qui vient de se passer et qui semble imprimé derrière ma rétine puisqu’à chaque fois que je ferme les yeux, j’ai l’image du couple en train de s’embrasser et je sens la nausée me saisir. 

    — Phi tout va bien ?

    Je tourne la tête hagard, j’ai peut-être bu plus qu’un verre, en fait, c’est même certain car tout tangue quand je tourne la tête vers la voix qui vient de me déranger. Il me faut un temps pour reconnaitre la jeune femme. 

    — Nong Jane.  Pourquoi ça n’irait pas ?

    Elle et moi, on travaille ensemble, elle me court après depuis le moment où elle m’a croisé, mais je l’ai toujours repoussé.Je vide un nouveau verre cul sec, ravalant la bile qui me remonte à la gorge en repensant à pourquoi je repoussais la jeune femme, à ce que j’avais bêtement espérer alors que lui s’envoyait en l’air avec ce mec. Ma machoire se crispe malgré moi et je sais que je n’ai pas le droit d’être en colère, pas après l’avoir traité de cette manière, pas alors que je suis incapable de mettre des mots sur ce que je ressens. 

    — Tu veux qu’on aille faire un tour ?

    Elle bat des cils en caressant lentement mon avant bras. Un instant j’ai envie de la repousser, de lui dire que ce n’est pas elle que je veux et l’accès de rage me force à fermer les yeux. Mauvaise idée, car de nouveau la scène se joue dans ma tête et j’ai le cœur au bord des lèvres. 

    — Allons-y.

    Je paye rapidement les consommations avant de l'entraîner chez moi. Je sais que je suis en train de faire une connerie. Je n’ai pas envie de faire ça, mais j’ai besoin d’oublier, même si je sais que ça n'arrangera rien, bien au contraire. 

    Depuis ce soir-là, j’ai vraiment fait le con, j’ai repris mes vieilles habitudes, sortir avec autant de femmes que possible, les présenter à Sing, Ton et New et souffrir en voyant la tristesse dans son regard. Nong Jane est celle qui revient le plus souvent à mon bras et au fil des mois, elle devient même la seule. Je ne l’aime pas, même si j’ai de l’affection pour elle, mais ma mère l’adore, alors je reste à ses côtés, après tout, c’est ce qu’un homme doit faire, trouver une femme, avoir des enfants et travailler sans trop se poser de questions. Aimer un homme, c’est juste une lubie, quelque chose qui n’est pas naturel. 

    — Alors quand est-ce que vous allez vous marier ?

    Je sursaute quand la voix de ma mère me fait revenir à la réalité. Malgré moi, New occupe toujours toute la place, je n’arrive pas à l’enlever de ma tête. Je regarde les deux femmes et je ne comprends pas comment la discussion a pu passer des vacances que Jane voudrait que l’on prenne ensemble à un mariage. 

    — Quoi ?

    Je me sens stupide, encore plus quand, la main tremblante, Jane serre la mienne comme si elle attendait quelque chose. Comme si cette question était un signal pour moi, mais je n’arrive pas à comprendre ce que je dois faire.

    — Je ne suis plus toute jeune maintenant j’aimerais voir mon fils se caser, s’installer et avoir des enfants.

    — Euuuh... oui, d’accord.

    Je suis complètement largué, je ne suis pas sûr de vouloir me marier, Nong Jane et moi ce n’est pas vraiment une histoire sérieuse et encore moins stable, il y a encore deux jours, elle est partie en claquant la porte en hurlant que notre histoire était finie. Elle est revenue le soir en larmes me suppliant de ne pas l’abandonner et…

    — Vraiment, tu veux que l’on se marie ?

    Sa voix est chantante et je me retrouve juste capable d’ouvrir la bouche sans réussir à parler. Est-ce que je suis tombé dans la quatrième dimension ? Je veux lui dire que je ne me sens pas prêt, que notre couple n’est pas assez fort, que c’est tout sauf une bonne idée.

    — Dans trois mois, ce serait l’idéal, il n’y a rien de mieux que les voyages de noces au printemps.

    Est-ce que ma mère est déjà en train d’organiser mon mariage ? Ce n’est pas la quatrième dimension, c’est un cauchemar. Je me lève brutalement avant de m’excuser, je dois trouver comment me sortir de là. Je quitte la table pour me diriger vers le petit bar ou je me sers un verre que je bois cul sec avant de m’en resservir un aussi sec. 

    L’alcool, c’est pour me donner du courage, je dois faire face à ma mère, à ma copine, repousser cette idée. Seulement quand je reviens vers la table, elles lèvent les yeux vers moi, des yeux pleins d’étoiles, de bonheur, de normalité, un homme épouse sa copine, donne des petits enfants à sa mère, c’est dans l’ordre des choses. Je dois me faire une raison, New n’est qu’un rêve, une lubie.

    Jane se lève et vient me rejoindre, prenant ma main, ignorant ma grimace et mon air blême, elle est sur un petit nuage. 

    — Alors on va se marier, pour de vrai ?

    C’est ma porte de sortie, le moment de dire que c’est trop tôt.

    — Euuuh.

    Ma mère est beaucoup plus rapide que moi, comme si elle avait déjà parfaitement préparé ce moment depuis des années. Elle se lève à son tour, sort une boîte carrée d’un tiroir et me la tend.

    — Regarde, j’ai même la bague de fiançaille de ton arrière grand-mère, je suis sûre qu’elle lui ira parfaitement.

    J’avale difficilement ma salive, prends la boîte comme si j’avais soudain quitté mon corps. 

    — Euuh… ouais on va se marier ?

    Je souris même si au fond j’ai envie de hurler. J’ai l’impression que c’est quelqu’un d’autre qui prend la bague à l’aspect fragile avant de lui passer au doigt. Qu’est-ce qui vient de se passer ? Tout est allé beaucoup trop vite, je n’arrive pas à comprendre et boire ce deuxième verre d’alcool ne m’aide pas à m’éclaircir les idées.

    — Phi, tu ne devrais pas trop boire, on doit aller retrouver les autres.

    Mon cœur se serre quand j’y pense, je n’ai pas envie d’y aller et c’est peut-être la raison pour laquelle je finis par faire l’amour avec elle. Juste pour retarder le moment où je devrai lui faire face, où je devrai faire face aux conséquences de ces fiançailles.



  • Commentaires

    1
    Mardi 14 Décembre 2021 à 15:12

    Trop bien d'avoir fait l'histoire vue par Tay cool j'adore!! En plus, on n'imaginait pas du tout ça vu comme il agissait! Et pareil, je ne me doutais pas que Sing savait! 

    Bises <3

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