Chapitre 17 - 1ère partie

Je ne sais pas du tout pendant combien de temps nous sommes restés dans les bras l’un de l’autre, laissant nos émotions prendre le dessus sur la logique. Khai n’a pas parlé ou ne m’a pas dit d’arrêter de sangloter. Il est juste resté immobile pendant plusieurs minutes. Ce n’est que lorsque nous nous éloignons l’un de l’autre que je vois ses yeux rouges.

Il ne pleure pas, mais ça me blesse plus que s’il pleurait et m’engueulait jusqu’à ce qu’il soit satisfait.

“Je… ne pensais pas que ça tournerait de cette façon.” Je n’ai pas d’excuse, alors je ne le nierai pas.

“Je comprends.”

“...”

“C’est parce que je suis un vrai connard, pas vrai?” C’est pour ça que vous n’êtes pas venus.” Après avoir dit ça, un mince sourire apparaît sur son magnifique visage, un sourire rempli de douleur qui m’écrase de culpabilité.

“Non, c’est juste un malentendu… Too et Bone ne voulaient pas faire ça. Tout est de ma faute.” Mes larmes sont à deux doigts de recouler. Khai tend la main pour essuyer mes larmes, son visage sans expression.

Ce n’est pas lui. Ce n’est pas le Khai que je connais.

“Ce n’est pas de ta faute. J’étais prêt à attendre.”

“...” Tous les mots restent coincés dans ma gorge. Je ne sais même pas comment me comporter à cet instant.

“Avec qui es-tu venu ici?” demande-t-il de sa voix profonde.

“Je suis venu seul.”

“Ah ouais? Alors conduis prudemment. Si nous ne partons pas demain, je pense que je devrais rentrer chez moi aussi.” Il ramasse son sac à dos, le met sur ses épaules, et ramasse ses autres affaires. Je profite de cette opportunité pour attraper son étui à guitare.

“Rentrons ensemble.” Après plusieurs semaines d’éloignement, j’ai réalisé à quel point c’était douloureux de me forcer à ne pas aimer Khai. Je me suis forcé au point d’en avoir mal partout. C’est comme cela que je trouve une solution?

“Je peux?”

“Tu… peux.” Ma voix tremble incontrôlablement.

“Je peux vraiment rentrer?”

“Tu peux. Tu n’as plus besoin d’attendre.”

Il hoche la tête et me suit en silence. C’est tellement calme… que je me sens terriblement seul.

Khai n’a pas apporté sa voiture. Il a amené toutes ses affaires ici en taxi et a attendu ses trois amis à six heures du matin. Il était tellement excité la nuit dernière, mais maintenant il a l’air complètement désespéré. Évidemment qu’il l’est. On l’a laissé attendre à la gare toute la nuit. Si j’avais été à sa place, j’aurais été tellement en colère que je ne voudrais plus parler à personne.

Après avoir trouvé Khai, j’ai appelé les deux autres Extrêmes et leur ai dit d’attendre dans ma chambre. Et maintenant, je me concentre pour conduire la personne abandonnée à ma chambre après avoir craqué à la gare.

C’est comme… une putain d’émission de téléréalité.

“Tu as faim?” Je me suis dit que Khai n’avait peut-être rien mangé, alors je lui ai posé la question, inquiet.

“Un peu.”

“Qu’as-tu mangé au petit déjeuner?”

“Rien.”

“Et au déjeuner?”

“Un sandwich. Je ne voulais pas aller trop loin parce que vous ne m’auriez peut-être pas trouvé en arrivant. Et vous aviez éteint vos téléphones.” Je me sens coupable à nouveau.

“Alors, allons chercher quelque chose à manger.” Je mets mon clignotant et m’arrête parce que j’ai repéré un stand de nouilles. Je vais l’emmener manger quelque chose d’abord. Son estomac est trop précis. J’ai peur qu’il soit malade s’il est vide.

“Qu’est-ce que tu vas prendre?”

“Commande quelque chose pour moi,” dit-il et il va attendre à la table, le visage pâle, me passant le fardeau de commander son plat préféré.

“Tu es malade?”

“Non, mais tu m’as pardonné?”

“Quand ai-je été en colère contre toi?”

“Chingching.” Je ferme immédiatement la bouche et tourne mes yeux vers le ciel, les voitures, et la lumière pour éviter cette conversation.

Je lui en voulais toujours à ce sujet, mais quand je l’ai trouvé seul à la gare, tout a disparu. Je n’aurais jamais pensé qu’on le planterait comme ça.

“...”

“Tous mes efforts ont été vains.” Je me sens horrible en écoutant cette phrase. Sa voix est remplie de tristesse. Combien de fois avons-nous été blessés par l’amour?

“Ils m’ont dit qu’elle avait commencé. Pourquoi tu ne me l’as pas dit?”

“Tu ne m’aurais pas cru.”

“Je l’ai vu de mes propres yeux. Je ne voulais pas penser que c’était un accident.”

“Ça n’était pas le cas. Quand elle s’est jetée sur moi, je ne lui ai pas rendu son baiser, mais j’étais tellement stupéfait que je ne savais pas quoi faire. Je n’ai pas apprécié ça, je n’ai rien ressenti. J’étais seulement choqué. Avant que je puisse la repousser, tout ce que j’avais essayé de faire jusque là est parti en fumée.”

C’est vrai! Tout est parti en fumée cette nuit-là, tout comme ma confiance en lui.

“C’est ma faute pour m’être mis dans cette situation. C’est ma faute parce qu’après l’avoir repoussée, j’ai pensé que je devais te le cacher car mon égoïsme ne voulait pas te perdre. C’était regrettable que tu sois là, que tu aies été témoin de mon comportement de merde.”

“Si je n’avais pas été là avec Too cette nuit-là, nous serions toujours en bons termes, mais je serais aussi toujours un pauvre idiot.”

“J’ai retenu la leçon, et je ne laisserai plus ça se reproduire. Je ne te mentirai pas parce que c’était horrible. Je me souviens que mon cœur était dans ma bouche au moment où je t’ai vu t’enfuir.”

“Et après tu m’as vu embrasser Bone.”

“Hum.”

“Qu’as-tu ressenti?” Je veux juste savoir… dans le feu de l’action cette nuit-là.

“J’étais tellement en colère que je voulais le tuer. J’étais en colère contre moi aussi. Je ne savais vraiment pas quoi faire.” C’est la première fois depuis des semaines que nous nous remémorons ce qu’il s’est passé cette nuit-là et que nous nous livrons l’un à l’autre. Maintenant que j’ai dit ce que j’avais sur le cœur, je me sens en quelque sorte soulagé. Peut-être que la raison pour laquelle je me suis senti en détresse pendant tout ce temps était que j’avais fermé mon cœur et refusé d’écouter les explications de Khai.

“Voilà vos nouilles.” Un bol de nouilles est apporté à notre table. Sa grande main pousse le bol vers moi, puis il murmure.

“Ajoute l’assaisonnement pour moi.”

“Tu es mon ami ou mon fils?”

“Je veux être celui qui est important pour toi.” J’ai envie de vomir. Je pince les lèvres et ajoute l’assaisonnement dans les nouilles. Khai n’aime pas quand c’est aigre, mais il aime la nourriture épicée, donc je dois ajouter seulement du poivre et de la sauce de poisson.

“C’est fait. Tu peux manger maintenant.”

“Merci beaaaaaaaucoup.” Sa voix s’égaye maintenant qu’il a de la nourriture devant lui. Il dévore le premier bol en une minute. Comme il attend le prochain bol, je pousse le mien vers lui pour qu’il le mange en attendant.

“En fait, il y a beaucoup de choses qui m’ont rendu amer envers toi depuis un moment maintenant.” Et pour évacuer tous ces doutes, je décide de prendre la parole.

“Demande-moi n’importe quoi.”

“Le jour où tu as auditionné la chanteuse, j’ai entendu nos amis vous taquiner, toi et cette junior. Je ne m’en rappelle pas clairement, mais un des gars du son a dit que tu l’aimais bien.” Même si je ne pouvais pas voir l’expression de Khai, à en juger par l’ambiance, ils s’amusaient sûrement beaucoup.

“Ce mec du son l’aimait bien, mais il m’a utilisé pour se couvrir.”

“Mais tu ne l’as pas nié.”

“Tu écoutais depuis un bon moment, hein?”

“Ouais.”

“Je n’ai rien dit, mais les autres m’ont vu lui jeter un regard noir.”

“Et pour LINE? Je t’ai vu lui envoyer des messages.”

“Je ne voulais pas que tu t’inquiètes.”

“Tu m’as rendu inquiet parce que tu as choisi de le cacher au lieu de me dire la vérité.”

“Tu veux les lire?” Il prend son téléphone dans la poche de son pantalon.

“Tu as dit que ta batterie était morte.”

“J’ai vu ta batterie portable sur le siège arrière, alors je l’ai utilisée. Si cela peut nous permettre de redevenir comme nous étions avant, fais ce que tu veux.” En fait, je ne veux pas fourrer mon nez dans ses affaires mais la façon dont il a vécu n’est pas du tout rassurante. Si cela peut dissiper mes doutes, alors je n’ai aucune raison de me retenir.

Le contact à l’écran appartient vraiment à Chingching, mais la différence est que ce contact a été bloqué.

L’historique de conversation n’est pas si long. Je fais défiler pour lire à partir de la première phrase avec un sentiment inexplicable…

Chingching

Khai, c’est Chingching

Nous nous sommes rencontrés dans la salle d’audition

K.Khunpol

Ah oui

Chingching

Merci pour aujourd’hui

Si j’ai des problèmes avec l’enregistrement, je peux te questionner?

K.Khunpol

Bien sûr

Chingching

Qu’est-ce que tu fais?

K.Khunpol

Je vais me coucher

Chingching

Ah bon? Alors je vais arrêter de t’embêter

K.Khunpol

D’accord

Leur conversation ce jour-là s’est terminée quand Khai a arrêté de lui répondre. Ils n’ont pas parlé jusqu’au lendemain matin. Chingching lui a envoyé des messages tous les jours, et Khai a donné des réponses courtes et simples comme ‘D’accord’, et je me sens même énervé pour la personne avec qui il discutait.

Jusqu’à ce que…

Chingching

Ton ami a dit que tu m’aimais bien

K.Khunpol

Qui?

Chingching

Mek de l’équipe du son

K.Khunpol

Ah, Mek est celui qui t’aime bien

Pas moi

À ce stade, j’ai l’impression d’avoir manqué quelque chose, ou peut-être que j’étais trop paranoïaque pour voir que les choses n’étaient pas aussi mauvaises que je le pensais.

Je continue de faire défiler leurs messages de presque tout le mois entier. Je connais ses intentions maintenant. Elle devait vraiment aimer Khai, à en juger par son langage et ses messages inutilement fréquents.

Chingching

L’équipe du son va faire la fête aujourd’hui. Tu viens?

Viens s’il te plait. On va bien s’amuser.

Tu n’as pas beaucoup parlé dernièrement. Il y a un problème?

Khai

K.Khunpol

Je ne suis pas libre aujourd’hui. Mais les autres gars y vont

Chingching

Je veux que tu viennes

On a rarement eu l’occasion de s’amuser ensemble

Nous avons travaillé vraiment dur

K.Khunpol

Ching, je pense que…

On devrait arrêter de se parler comme ça

Chingching

J’ai fait quelque chose de mal?

K.Khunpol

J’ai quelqu’un que j’aime. Je le drague

Third, mon ami. Tu te souviens?

Je ne veux pas que Third s’inquiète

Chingching

J’ai compris

Mais Third ne t’empêcherait pas de venir, pas vrai?

C’est le jour de l’équipe du son. Tu ne veux pas venir?

C’est toute leur conversation. Même si Khai n’a pas répondu à son dernier message, il est quand même allé faire la fête avec l’équipe du son. Je commence à assembler les pièces qui ont causé notre malentendu ce jour-là.

“Tu aurais dû me parler plus tôt,” dis-je doucement.

“Je veux te le dire depuis longtemps, mais tu ne m’en as pas laissé l’occasion.”

“...”

“Nous nous sommes battus pendant des semaines. Tu étais proche mais tu semblais si loin, en plus tu as coupé les ponts avec moi.”

Parce que ça a vraiment fait mal à ce moment-là. Ça faisait tellement mal que je ne voulais plus rien écouter. Mes amis n’arrêtaient pas de me réconforter en me disant que ce que j’avais vu n’était pas réel. J’ai choisi de les écouter sans penser à écouter les explications de Khai.

Maintenant je sais que c’était vraiment une mauvaise idée.

“Je suis désolé.”

“Ce n’est pas de ta faute, Third. C’est moi qui ai tout gâché, tu te souviens?”

“Je suis désolé de ne pas t’avoir fait confiance, et je suis désolé de t’avoir laissé tomber aujourd’hui.”

“Hum… Vous avez tous éteint votre téléphone. J’étais inquiet. J’ai cru qu’il s’était passé quelque chose.”

"Tout le monde va bien. En fait, je ne voulais pas te voir.”

“Droit au but, putain. Et pour Too et Bone? Ne me dis pas qu’ils me détestent, eux aussi.”

“Non. Too voulait me tenir compagnie. Bone pensait que je venais, alors il voulait nous donner une chance d’arranger les choses, mais du coup…”

“On m’a pris pour un idiot. Merci beaaaaaaaaaucoup.” Il fait claquer sa langue bruyamment. En le voyant comme ça, je ne suis plus désolé pour lui. Je veux récupérer mes larmes.

“Penses-y comme à un rêve.” Je peux seulement le consoler.

“Un bon rêve ou un mauvais?”

“Probablement un mauvais rêve, parce que tu as attendu tellement longtemps.”

“Je ne pense pas. Mon mauvais rêve, c’est de vivre sans toi.”

Je suis sans voix. Il n’y a rien pour que je puisse le piquer avec. Mes mains sont vides. Je ne peux pas me tortiller, sinon il saura que je suis timide.Est-ce que j’ai un trouble bipolaire? J’étais distant avec lui à l’instant.

“Tu es timide?”

“Non.”

“Bien, parce que j’ai menti.”

“Connard.”

“Mais si on finit ensemble, je présenterai mes respects au café noir et au M-150 pour m’avoir permis de rester à la gare jusqu’à ce que tu arrives.” Ce sont nos boissons énergisantes pendant la période des examens.

“Tu as dit que tu n’étais allé nulle part.”

“Je suis allé aux toilettes, donc je les ai achetées en chemin. Je ne me serais pas levé si je n’avais pas eu besoin d’aller faire pipi. Tu sais quoi? J’avais l’air d’un acteur principal avec une caméra braquée sur moi tout le temps.”

“Tu essayes de me réconforter ou de me faire me sentir mal?”

“Rien de tel, mais au prochain voyage…”

“Hm?”

“Recommençons avec le prochain voyage.”

“Hum.”

“Tu as dit que tu voulais faire un film fantastique pour ton projet final de quatrième année. Je n’ai pas pensé au mien mais une idée m’est venue quand je t’attendais sur le quai.” Le troisième bol de nouille est déposé sur la table. Khai resserre sa prise sur ses baguettes et enfonce les nouilles dans sa bouche sans attendre.

“Quel genre de merde t’est venue?” Je préfère écouter ton idée plutôt que de te regarder te goinfrer.

“Je veux raconter l’histoire d’un homme qui attend son amour sans savoir quand cette personne viendra, mais ensuite, il est assassiné. Il se réveille une nouvelle fois sur le quai et est tué et la scène se répète.”

“Crétin, c’est Edge of Tomorrow.”

“Mon intention n’est pas de copier le film, mais de te rappeler que tu as fait attendre quelqu’un pour toi à plusieurs reprises.”

“Tu es odieux.”

“J’ai enregistré ma voix. Tu veux l’écouter?”

Maintenant, je me demande combien de langues a utilisé Khai pour m’insulter. Il a été abandonné pendant toute une journée, alors il doit avoir de la rancune. Je crie lorsque je vois dix enregistrements. Pourquoi a-t-il fallu qu’il m’engueule autant?

“Tu as voulu me tuer? Il y en a vraiment beaucoup.”

“J’avais beaucoup de choses en tête.”

Je rassemble mon courage et lance le premier enregistrement, jetant un coup d'œil à la personne qui mange sa nourriture. Khai agit nonchalamment, donc je porte mon attention sur les enregistrements de son téléphone.

Le premier enregistrement:

[Huit heures, l’heure à laquelle on est censé se retrouver. C’est bondé ici. Je vous attends au quai 7. Dépêchez-vous les gars. Nous allons manquer le train.]

Le deuxième enregistrement:

[Neuf heures. Je ne sais pas si leurs réveils sont cassés ou quoi parce que j’attends depuis deux heures maintenant et ils ne se sont toujours pas montrés. Ils ont annoncé notre train. Il est en train de partir, là. Honte à vous les mecs… Vous avez raté le train.]

Le troisième enregistrement:

[Espèces de connards, il est dix heures maintenant. Où êtes-vous, putain? Répondez au téléphone.]

“Tu as beaucoup juré.”

“Il faut bien se défouler.”

Le quatrième enregistrement:

[Onze heures. Il n’y a aucun signe de mes camarades. Devrais-je partir et prendre du recul?]

“Pourquoi tu n’es pas parti alors?”

“Si tu étais venu et ne m’avais pas vu, j’avais peur que tu sois blessé.”

“Ça ne t’a pas blessé davantage d’attendre comme ça?”

“Si quelqu’un doit être blessé, que ce soit moi.”

Le cinquième enregistrement:

[Il est exactement midi. Mon estomac grognait fort, donc j’ai dû manger le sandwich que j’avais apporté. Il y a un problème, les gars? Vous avez crevé un pneu? Je m’inquiète…]

Le sixième enregistrement:

[Treize heures. Je me fiche de savoir si on va rater le train ou quel train va partir. Tout ce qui m’importe, c’est si vous allez vous montrer ou pas.]

J’écoute tous les enregistrements. Khai a enregistré ses pensées et sa situation à chaque heure. L’attente est une torture, je le sais bien. Je pense que la personne qui a enregistré ça a dû se sentir terriblement mal à l’aise parce qu’elle est restée seule.

A partir de dix-huit heures, il n’y a plus d’enregistrement que je puisse écouter.

“La batterie était morte,” dit-il de sa voix profonde, sachant à quoi je pense.

“Ah ouais? Elle est morte parce que tu as fait des enregistrements.”

“Non, j’ai passé beaucoup d’appels jusqu’à ce qu’il s’éteigne.”

“Tu as dit que tu ne m’avais pas appelé.”

“Je t’ai appelé une fois. Quand j’ai vu que tu avais éteint ton téléphone, j’ai arrêté de t’appeler parce que je ne voulais pas te déranger. J’ai appelé nos amis de la faculté pour demander après toi à la place, mais personne ne savait où tu étais. J’avais trop peur qu’il te soit arrivé quelque chose. Tu sais, quand j’attendais, j’avais peur qu’on m’ait posé un lapin. J’étais tellement en colère.”

“...”

“Mais après, j’ai été plus inquiet pour vous, les gars. J’avais peur que quelque chose de mal arrive. J’avais peur de tout. Avant que je ne m’en rende compte, un senior m’a appelé et m’a dit qu’il vous avez vu, Bone et toi, au centre commercial. Je me suis senti soulagé et je me suis dit que vous alliez bientôt arriver, donc j’ai continué à attendre.”

“Merde, tu t’es menti à toi-même.”

“C’est vrai. Tu sais ce que je t’aurais dit si ma batterie n’avait pas été déchargée?”

“Tu m’aurais probablement engueulé, genre… tu aurais dit les mots les plus blessants que tu aies jamais utilisés.” C’est ma supposition. Khai savait depuis le soir que la raison pour laquelle je n’étais pas venu n’était pas un accident ou une urgence, mais que je ne voulais tout simplement pas venir.

“Alors écoute le onzième message.”

“...”

“Third, espèce de connard!”

“...”

“C’est un soulagement que tu ailles bien. Je vais t’attendre ici.”

Il tend sa grande main pour caresser affectueusement ma tête et sourit. Il s’avère que c’est moi qui me sens coupable. C’est comme si le karma m’avait rattrapé.

Et je sais que…

Par attendre ici, il ne veut pas dire dans un lieu, c’est un sentiment.

“Khai, tu sais comment je me suis senti quand Bone a frappé à ma porte et m’a dit qu’il n’était pas parti avec toi?”

“Tu as pensé que je le méritais?” Je secoue la tête.

“J’ai eu mal.”

“...”

“Dans ma tête, je continuais à te dire de rentrer chez toi, j’aurais voulu que tu ne m’attendes pas.”

“Mais j’ai continué à t’attendre, en espérant que même si nous ne partions pas en voyage ensemble, nous pourrions au moins rentrer ensemble à la maison.”

“Tu as attendu vraiment longtemps avant que je n’arrive.”

“Uh-huh.”

“Tu veux rester dormir chez moi ce soir?” Je ne l’invite pas, je demande juste…

“J’attendais que tu le dises. Allons chez toi dès que j’aurai fini de manger. J’ai tellement envie de dormir.” Khai mange plus vite que d’habitude, bien qu’il ait toujours mangé vite. Dès que nous avons payé notre repas, nous nous rendons à mon appartement où nos amis, Too et Bone nous attendent.

Après avoir ouvert la porte, Khai est chaleureusement accueilli par ces deux amis qui lui sautent dessus et enroulent étroitement leurs bras autour de son cou.

“Khai, imbécile, on est désooooooooolé.”

“Lâchez-moi, connards. Argh! Lâchez-moi!” Je regarde la grande silhouette se débattre pour se libérer. Ces voyous le trainent jusqu’au salon et sautent sur lui, son grognement résonnant dans la pièce.

Ces trois-là aiment la violence. Je me demande un peu pourquoi Khai doit être sévèrement attaqué en compensation du fait qu’on lui a posé un lapin. Il leur faut presque une demi-heure pour se réconcilier - se frappant les uns les autres pendant quinze minutes, et s’engueulant les uns les autres pendant quinze autres minutes. Finalement, il s’asseyent et ont une véritable conversation.

Nous devons remercier notre ami à la fac d’avoir contacté Bone car après avoir allumé son téléphone, il a appris la douloureuse vérité, nous avions laissé notre ami attendre à la gare pendant plus de dix heures.

“Donc, tu n’es plus en colère contre nous, pas vrai?” demande Bone en souriant.

“Qu’est-ce que je dois dire, connard? Si tu veux me laisser tomber, alors appelle-moi. C’est une torture pour la personne qui attend.”

“On a envoyé Third pour sauver la journée. Il était vraiment inquiet pour toi.”

“Quand ai-je été inquiet?” je hurle. Ces trois-là se confient les uns aux autres, mais ils ont fini par m’impliquer.

“Awwww, quand il a su que je n’étais pas parti avec toi, il a sauté dans sa voiture et est immédiatement parti à la gare. C’est vrai! Pas inquiet du tout.”  Le sarcasme et les moqueries sont ancrés au plus profond du caractère de Bone. Mes pieds me démangent de frapper un idiot.

“Vous n’allez pas partir les gars? Il est déjà plus de quatre heures du matin.”

“Aw, Third, tu essayes de nous jeter dehors pour pouvoir avoir un doux moment avec Khunpol?”

“C’est pas drôle, Too. J’ai trop sommeil. On parlera plus tard demain.”

“Très bien, on va aller se coucher maintenant. Vous deux… ne vous sautez pas encore dessus. Ça va gâcher notre excitation.” Connard! Je râle sur Too et Bone en les suivant jusqu’à la porte d’entrée. Le silence retombe quand il n’y a plus que Khai et moi dans la pièce. Nous nous regardons maladroitement l’un l’autre.

“Je vais changer mon t-shirt.”

“Mets ton short.”

“Quel genre de pensées perverses as-tu?”

“Quoi? J’ai peur que l’odeur des nouilles ne colle à ton pantalon.” Son expression est tellement coquine. Je serai vraiment stupide si je le croyais.

“Je vais m’en occuper moi-même.” 

“Change-toi ici. On gagnera du temps.”

“Va te faire foutre.”

“Tu peux porter un short? J’aime quand c’est sexy.”

“Je n’en ai pas.”

“Un short de foot alors.”

“Je vais me coucher, pas jouer au foot. Va prendre une douche. La serviette est dans le placard,” dis-je et je lui jette un regard noir pour qu’il se taise. Attendez! Quand je l’ai retrouvé à la gare, il ressemblait à un chien abandonné, mais maintenant, c’est devenu une personne complètement différente.

“Tu veux encore prendre une douche avec moi? Je peux te frotter le dos.” Imbécile! Notre amour va-t-il vraiment marcher? Je ne pense pas, à cause de l’appétit sexuel de Khai.

“Dégage tout de suite. Quelle plaie.”

“D’accord, d’accord.”

“Ne prends pas trop de temps, tu vas rétrécir,” dis-je en rigolant.

“Admets simplement que tu es inquiet que mon zizi ne bande pas.” Sa réponse me prive de toutes mes blagues, comme d’habitude. La décence peut s’en aller, montre-toi si tu es un pervers.

Dix minutes plus tard, la grande silhouette sort de la salle de bain dans mes vêtements. Il éteint respectueusement la lumière et saute dans le lit sans me demander mon avis, à moi, le propriétaire du lit. Il me prend même dans ses bras, me serrant étroitement sans le moindre souci.

“C’est trop serré. Tu peux dormir correctement?”

“Eh bien, je suis heureux. J’ai cru que j’allais devoir passer la nuit à la gare.”

“J’aurais dû te laisser là-bas.”

“Et quelqu’un aurait pleuré jusqu’à s’endormir.”

“Je n’en étais pas au point d’éclater en sanglots à chaque seconde.” Même si ce qu’il disait était proche de la réalité. L’attitude cool que j’avais avant a complètement disparue.

“D’accord, tu es trop fort et tellement cool, alors sois mon traversin ce soir. J’aime me frotter à mon traversin.”

“Espèce d’enfoiré.”

“Il y a beaucoup de choses que j’aime que tu ignores. Je devrais les écrire dans mon scénario pour le projet final de quatrième année, quelque chose comme se frotter aux coussins, se frotter sur le sol, la technique pour construire un monde merveilleux avec nos mains, l’astuce pour mater les seins des filles.” C’est quel genre de connaissances ça? Est-ce que je dois vraiment me faire draguer par quelqu’un comme lui? Sans compter que c’est moi qui l’ait aimé en premier.

“Khai, tu peux arrêter de dire des merdes comme ça? Je vais vomir.”

“Tu veux connaître ma période de confusion avant que je ne tombe amoureux de toi?”

“Conneries.”

“T’aimer n’est pas une connerie.”

“Fais ce que tu veux.”

“Quand j’ai découvert que tu m’aimais, j’ai eu l’impression d’avoir une perte d’audition soudaine, je n’en croyais pas mes oreilles. Je ne pouvais pas le supporter, j’étais confus, furieux, j’avais toutes sortes de sentiments. J’avais parfois envie d’aller vers toi et de te dire de ne pas m’aimer parce que je ne pouvais pas m’occuper d’une chose importante.” Il me parle de ses sentiments passés un par un, mais je savais déjà que Khai s’était senti comme ça.

Et donc, je ne discute pas ou ne lui demande rien, j'écoute juste ses vrais sentiments en silence.

“J’ai même perdu mon portefeuille. J’ai détruit beaucoup de motos avant Chawee. Ce ne serait pas différent avec ton cœur. Si tu me le donnais, je le briserais en morceaux de mes propres mains un jour.”

“Et alors quoi s’il est brisé?”

“J’étais une telle ordure à l’époque. Serais-tu vraiment prêt à le laisser se briser?”

“Je m’étais préparé à être blessé. Même si je savais que tu me briserais le cœur un jour, c’était mon problème. Si je pouvais t’aimer, je devais être capable de me guérir de la douleur. C’est ce que j’ai toujours pensé. Mais maintenant…” Les choses ne sont plus pareilles. Mon mécanisme de défense ne consiste pas à me guérir après de mauvaises expériences. Il s’agit de m’empêcher d’être blessé. Et quel est le résultat?

… Je ne peux pas le faire de toute façon…

“Mais maintenant, je me donne à fond pour gagner ton cœur pendant que tu hésites encore.” suppose Khai.

“Je n’hésite pas. Je ne te fais pas confiance.”

“J’essaye de faire mes preuves.”

“En écrasant les lèvres de cette fille? Je t’ai pardonné parce que tu ne partageais pas ses sentiments. C’est pour ça que je t’ai donné une chance, sinon on en aurait fini. Je ne sais même pas si on pourrait encore être amis.”

“Je suis chanceux d’avoir encore une chance. Merci, Third.”

“Tu n’as pas à me remercier pour ça.”

“Si. Au moins, j’ai toujours une chance de t’aimer.”

Et ensuite, Khai blablate sur toutes les filles du passé pendant presque une heure comme un enfant excité. Je suis plutôt bon puisque je me suis forcé à l’écouter jusqu’à maintenant.

“Tu as sommeil? Va dormir si c’est le cas. Tu n’es pas obligé d’écouter,” me demande-t-il comme s’il pouvait lire dans mes pensées. Ses bras lourds me serrent toujours sans aucune intention de me laisser partir.

“Je n’ai pas sommeil.” Mais ma voix est étouffée et mes yeux somnolent. Pourquoi? Pourquoi est-ce que je me force à écouter ces conneries?

“Dors. Ne mens pas.”

“Je n’ai pas sommeil.”

“Sérieusement?”

“Hum.”

“Honnêtement, tu veux en savoir plus sur mes amours précédents ou plutôt sur mes histoires passées?”

Médium! Mais c’est… probablement la deuxième.