• Chapitre 9 - Dreamcatcher

    Chapitre 9

    Je ne sais pas pourquoi, mais depuis qu’il m’en a parlé, je veux retrouver cette fameuse cabane. Alors comme Ohm n'avait rien de prévu de spécial, depuis trois jours on inspecte les alentours du bras de rivière à sa recherche. 

    Chaque matin on prépare un sac avec de la nourriture et des fruits et on s'aventure parmi les arbres géants. Ohm se moque un peu de moi à chaque fois que l'on croise une bestiole bizarre et que je me cache derrière lui.

    La plupart du temps, ils sont inoffensifs, mais parfois, même Ohm s'arrête et patiente le temps que l'insecte ou l'animal ait le temps de fuir.

    On marche tranquillement, main dans la main en parlant de tout et de rien, apprenant à nous connaître par la même occasion. 

    Malheureusement à part rentrer le soir éreintés et piqués par les moustiques, pour le moment on a rien trouvé qui ressemble de près ou de loin à une cabane.

    — Qu'est ce que tu voudras faire si on ne la trouve pas ?

    Ohm me questionne tout en avançant vers l'une des parties de la zone que l'on a pas encore explorée. Je pince mes lèvres, je ne comprends pas pourquoi je ressens ce besoin presque viscéral de trouver ce souvenir heureux de Ohm.

    — Je ne sais pas… je ne sais même pas pourquoi je veux la trouver. Tu dois me trouver ridicule.

    Il soupire bruyamment avant de m'arrêter en serrant ma main un peu plus fort et une seconde j'ai l'impression que j'ai fait une bêtise. 

    — Tu n'es pas ridicule. Ne pense pas ça Nanon. Même si on ne sait pas encore pourquoi on la cherche, je suis sûr qu'il y a une explication… et puis j'aime me promener avec toi en te tenant la main.

    Il passe sa main dans mes cheveux en souriant avant de se pencher pour me voler un baiser. Un sourire fin apparaît sur mes lèvres comme à chaque fois qu'il fait ce genre de chose depuis trois jours. 

    — Tu as raison, je ne suis pas ridicule et… on va la trouver cette cabane.

    Je suis repris d'une énergie soudaine, je sais que l'on va réussir et j'ai hâte d'y arriver. Sans attendre je me remets en route, le tirant derrière moi et il se laisse faire en riant.

    Il nous faut encore pas loin de vingt-cinq minutes de recherche pour enfin la trouver au détour d'un buisson. L'arbre qui l'accueille est tout biscornu, elle se trouve à deux pas de la rivière que l'on entend parfaitement couler.

    Seulement, elle est un peu à l'écart de la petite berge où on était trois jours plus tôt et surtout, elle est camouflée par tout un tas de buissons qui ont repris leur droit maintenant que les deux enfants ont cessé de jouer ici.

    La plate-forme se trouve à environ deux mètres du sol et c'est grâce à plusieurs branches bien placées que l'on peut grimper. Ohm passe en premier, rapidement et en quelques mouvements sûrement gardés de son enfance, il se retrouve en hauteur.

    Il lui faut quelques minutes pour tester la solidité de la vieille structure avant qu'il ne se tourne vers moi en souriant.

    — C'est bon tu peux monter.

    Je lui tends en premier le sac qui contient notre repas. Il l'attrape et le pose au sol sans attendre avant de se tourner vers moi. La structure n'est pas très haute, mais je n'ai jamais grimpé aux arbres. Ohm a compris que je veux essayer de me débrouiller seul, il se contente de m'observer alors que je pose mon pied sur la branche la plus basse.

    J'hésite un peu, je prends mon temps, mais j'y arrive, je mets une main sur la surface de la plate-forme et tente de me hisser. J'ai un peu de mal et j'ai un petit sourire en coin quand une main apparaît dans mon champ de vision. Je l'attrape fermement et Ohm me tire vers lui, quelques secondes plus tard je suis debout dans ses bras dans les restes de la petite cabane.

    — Salut toi.

    Il passe ses bras autour de ma taille en m'attirant contre lui. J'ai un petit rire en passant mes bras autour de son cou et on se fait un câlin tout simplement.

    — Merci.

    Le menton posé sur son épaule, je regarde droit devant moi alors que mes doigts caressent lentement la base de sa nuque.

    — Pourquoi tu me remercies ?

    Je lève les yeux au ciel quand il me pose la question l'air de rien. Je recule doucement pour pouvoir le regarder droit dans les yeux. Dire qu'il y a quelques semaines, j'étais incapable de soutenir son regard et maintenant j'aime me perdre dans ses grands yeux sombres. 

    — Tu sais très bien pourquoi je te remercie. Sans toi je serais encore enfermé dans le noir 

    La joie se peint sur son visage, mais il se contrôle et reste très sérieux. Il m'embrasse à plusieurs reprises et mon cœur s'emballe de plus en plus.

    — Moi je suis persuadé que même sans moi tu aurais réussi à remonter la pente. Tu es fort Nanon.

    Il n'a peut-être pas tort, seulement je doute que j'aurais réussi si vite à reprendre confiance. Mon visage s'est légèrement assombri et quand il m'entraîne pour que l'on s'assoie, je ne résiste pas, plongé dans mes pensées.

    On est installés au bord de la plate-forme, les pieds dans le vide et d'ici on peut apercevoir la rivière qui s'écoule entre les arbres. Le silence s'éternise, mais il n'est pas désagréable et permet de mettre mes idées en place pour lui expliquer ce que je ressens.

    — Je ne suis pas si fort que ça tu sais.

    En tout cas moi je ne me sens pas fort du tout, au contraire. J'ai l'impression que je pourrais m'effondrer et retourner à mon état de petite chose fragile et apeurée d'un claquement de doigt. Sa main se pose sur la mienne et la serre légèrement pour m'inciter à continuer.

    — Je voulais mourir après ce… cette nuit-là. Je me serais sûrement laisser partir, c'est Chimon qui m'a maintenu la tête hors de l'eau pendant des mois. 

    C'est étrange de me remémorer ce passage de ma vie, sans ressentir les prémices de l'angoisse. Je tourne ma main pour attraper la sienne, les pose sur ma cuisse et les observe alors que nos doigts s'entrelacent.

    — J'ai vraiment réussi à trouver un endroit où j'ai pied quand je t'ai rencontré. Tu m'as intrigué à venir tous les soirs, je ne comprenais pas. Au début, je pensais que toi aussi… et puis j'ai décidé de te faire confiance.

    C'est étonnement facile de me confier à lui, de lui expliquer que même si je suis fort comme il le pense j'ai eu besoin de tout leur soutien possible pour m'en sortir.  

    — Ta présence, ta prévenance et… tes étreintes me permettent d'avancer un peu plus chaque jour.

    J'ose enfin lever les yeux vers lui. Il a un petit sourire tendre sur les lèvres et son regard est rempli d'amour. Mon corps se réchauffe et mon ventre se contracte brusquement. Sa main libre me caresse tendrement les cheveux et je laisse échapper un petit soupir de bien-être alors que la tension qui s'était accumulée dans mes épaules en parlant de tout ça disparaît petit à petit.

    — Avoir besoin d'une main tendue ou de dix pour se relever ne fait pas de toi quelqu'un de faible. Au contraire, c'est difficile d'accepter le fait de ne pas réussir seul et de laisser quelqu'un être ton pilier.

    — Ohm, embrasse-moi.

    Il me vole des baisers depuis que je l’ai autorisé à le faire, mais c’est sûrement l’une des premières fois que je lui demande si clairement d’avoir ce genre de geste. Il ne me fait pas répéter, il ne me taquine pas, comme il l’aurait fait en temps normal. Au lieu de ça, il lâche ma main pour la passer autour de mes épaules et me rapproche de lui. Il a toujours des gestes lents, me laissant tout le loisir de reculer si jamais je change d’avis.

    Ses lèvres trouvent les miennes et je ferme les yeux pour ressentir pleinement chaque sensation que sa bouche bougeant contre la mienne déclenche en moi. C’est toujours plein de douceur et de retenue, mais je me laisse complètement aller, ses baisers qui m’effrayaient au début, me rassurent maintenant. 

    J’ai l’impression qu’il me fait passer tous ses sentiments à travers ses lèvres, une véritable déclaration d’amour à chaque fois. Je savoure le moment, me demandant malgré tout, si je paniquerai encore si l’on venait à s’embrasser comme on l’a fait trois jours plus tôt. Ma bouche s’entrouvre lentement, ma langue s’avance, mais je me reprends au dernier moment et si Ohm s’en rend compte, il ne montre rien.

    Il est le premier à reculer, il ne veut jamais que ça dure trop longtemps et je sais qu’il a peur de perdre le contrôle. Moi je reste un instant les yeux fermés a savourer encore un moment la sensation chaleureuse de ses lèvres sur les miennes. 

    — Tu veux que je lise un peu ?

    J’ouvre les yeux et lui fait un grand sourire avant de hocher vivement la tête. Sans attendre, il ouvre le sac qui contient notre repas, mais aussi le livre qu’il me lit en ce moment. Petit à petit, il a fini par abandonner les récits d’horreur et depuis quelque temps, il me fait découvrir des romans d’aventure et de fantasy.

    — Il y eut des fusées comme une volée d'oiseaux scintillants aux voix mélodieuses. Il y eut des arbres verts aux troncs de fumée noire : leurs feuilles s'ouvrirent comme un printemps qui s'épanouit en un battement d'aile, et leurs branches incandescentes firent pleuvoir des fleurs chatoyantes sur les hobbits éberlués, disparaissant avec un doux parfum au moment de se poser sur leurs visages levés vers le ciel. Il y eut des fontaines de papillons étincelants qui partirent voleter vers les branches d'arbres; il y eut des piliers de flammes colorées qui s'élevèrent et se changèrent en aigles, en navires voguant sur les mers, ou en phalange de cygnes volants; il y eut un orage pourpre et une averse de pluie jaune; il y eut une forêt de lances argentées qui se dressèrent soudain avec un hurlement semblable à celui d'une armée assiégée, et qui retombèrent dans l'Eau avec un sifflement de mille serpents ardents.

    Sa voix s’élève rehaussée par le bruit de l’eau qui coule plus loin. J’aime tellement quand il me lit des histoires, mais je sais que ce que j’aime le plus c’est le son de sa voix si douce, qui éloigne la peur, l’angoisse et les souvenirs. Je suis certain qu’il pourrait me lire une notice de montage pour un moteur de voiture, le résultat serait le même. Ma tête s’appuie sur son épaule et je me laisse happer par le récit. Je n’ai aucun mal à imaginer la Comté, ces hommes et femmes bon vivant, menant une vie simple et sans plus gros problème que de savoir ce que sera leur prochain repas. 

    J’aimerais être comme eux, retrouver ces joies simples, me sentir heureux juste d’être en vie et de ne pas avoir peur de tomber sur l’homme qui a gâché ma vie. Je ferme les yeux en m'immergeant dans l’histoire, même si évidemment, toute cette légèreté s’efface petit à petit pour le héros. Je comprends son désarroi, je comprends ce qu’il veut dire et ce qu’il ressent face à l’adversité. 

    Pourquoi lui ? 

    — Je regrette, dit Frodon. Je ne vous comprends pas. Voulez-vous donc dire que vous et les Elfes, vous l'avez laissé vivre après tous ces terribles faits ? Maintenant, en tout cas, il est aussi mauvais qu'un Orque, et simplement un ennemi. Il mérite la mort. – La mérite ! Je crois bien. Nombreux sont ceux qui vivent et qui méritent la mort. Et certains qui meurent méritent la vie. Pouvez-vous la leur donner ? Alors, ne soyez pas trop prompt à dispenser la mort en jugement. Car même les très sages ne peuvent voir toutes les fins. Je n'ai pas grand espoir de la guérison de Gollum avant sa mort, mais il y a tout de même une chance. Et il est lié au sort de l'Anneau. Mon cœur me dit qu'il a encore un rôle à jouer, en bien ou en mal, avant la fin ; et quand celle-ci arrivera, la pitié de Bilbon peut déterminer le sort de beaucoup — à commencer par le vôtre. En tout cas, nous ne l'avons pas tué : il est très vieux et très malheureux. Les Elfes des Bois le tiennent en prison, mais ils le traitent avec toute la bonté qu'ils peuvent trouver dans leurs sages cœurs.

    Je me redresse à la fin du paragraphe en ouvrant les yeux, Ohm se tait et me regarde surpris par mon mouvement un peu brusque. Tout est calme autour de nous et la compréhension que j’ai soudain de ma propre situation et de ce que je ressens à ce propos me chamboule. Ohm pose sa main sur mon épaule, il attend que je prenne la parole et il ne me faut que quelques secondes pour le faire.

    — Plus que vouloir mourir… j’aurais aimé qu’il disparaisse. Je sais que jamais il ne sera puni pour ce qu’il a fait et je… je voulais qu’il souffre et qu’il en meurt.

    Je me sens plus léger d’avoir enfin pu le dire à haute voix. Ohm m’entoure de sa présence, me serre contre lui, je savoure l’étreinte et je suis fier de ne pas pleurer, de ne pas m’effondrer une fois encore à cause de cette ordure. 

    — La loi ne le punira peut-être pas, mais la vie s’en chargera. Je te le promets, tu seras vengé un jour.

    Je l’observe, mon ventre se tord quand je sens tout l’amour et toute la tendresse qu’il m’envoie. J’ai peur de ne jamais passer le cap de ses petits bisous doux que l’on échange à longueur de journée, mais je sens que l’envie de plus, de vivre vraiment s’éveille de plus en plus souvent en moi.

    Lui ne fera rien de plus tant que je ne l’autoriserai pas à le faire, j’ai envie qu’il m’embrasse à nouveau avec force, seulement, je me réfrène. J'ai peur de ce que je ressentirais et je ne veux pas le repousser encore une fois. Non en vrai, je me mens à moi-même. J’ai peur d’aimer ça, d’en vouloir plus et de ne pas réussir à gérer tout ce qui a attrait aux relations physiques. 

    — À quoi tu penses ? 

    Je me mets à rougir furieusement quand Ohm se montre curieux. Je ne peux pas lui expliquer que peut-être je commence à envisager de me laisser aller entre ses bras, c’est impossible. De toute façon, même si j’ai eu des envies ou que je suis excité par sa présence, je n’ai jamais réellement d’érection et…

    Mon corps se tend, je suis en train de me mettre la pression et je me sens complètement dépassé par mes propres pensées. Je m’éloigne de lui pour essayer d’y voir plus clair, mais c’est encore pire, car mon corps veut retrouver la chaleur qu’il dégage. 

    — Nanon ? Ne le laisse pas gagner, tu…

    — Ce n’est pas ça… c’est… je n’arrive pas à l’expliquer. Tu…

    Sa main se pose d’un coup sur ma nuque et la masse doucement quand il voit que je commence à paniquer. Je ferme les yeux en soupirant, laissant sa présence m’apaiser.

    — Ne te mets pas la pression pour nous, laisse-toi le temps d’avancer à ton rythme. Je suis très heureux de ce que tu m’offres chaque jour mon cœur.

    — Comment tu sais à quoi je pense ?

    Mon cœur s’affole, il savait que je pensais au sexe, que je pensais au sexe avec lui. Mes joues chauffent de plus en plus et je voudrais me cacher. C’est d’ailleurs ce que je finis par faire, en posant ma tête contre son épaule alors qu’il rit doucement.

    — Parce que c’est quelque chose de normal… à laquelle je pense beaucoup aussi. 

    J’avale ma salive bruyamment et frémis quand sa main se pose sagement sur ma cuisse. Je suis gêné par le tour que prend la conversation, mais en même temps, j’ai besoin de savoir ce qu’il en pense, de savoir que tout est normal et que je ne fais rien de mal.

    — J’ai envie de plus avec toi Nanon et j’y pense souvent. À notre âge, le sexe n’est pas anormal, y penser et en avoir envie encore moins. Donc tu peux y réfléchir, chercher à savoir ce que tu veux, ça ne veut pas dire que tu dois le faire tu comprends ?

    Je hoche vivement la tête, toujours caché et rouge comme une pivoine. Parler de sexe, je le faisait souvent avant, même si je n’avais pas trouver quelqu’un avec qui pratiquer, j’étais comme tout le monde, j’avais une imagination très fertile et beaucoup d'envie. Sa main ébouriffe mes cheveux et coupe court à mes pensées quand il me force à me redresser pour me regarder. 

    Un éclair de désir passe dans son regard et je ne comprends toujours pas ce qu’il peut voir chez moi. Il s'éclaircit rapidement la gorge avant de prendre le sac pour y ranger son livre et sortir le repas.

    — Mangeons et rentrons, comme ça on pourra préparer le reste de nos vacances d’accord ?

     

    Je suis resté un moment gêné par mes propres pensées et la conversation que l'on a eue. Cela dit je me sens un peu apaisé par rapport à tout ça, je dois laisser faire les choses et ne pas chercher à me forcer. Le repas s'est passé dans le calme, j'ai savouré chaque miette du repas préparé par Ohm. 

    Pas une seconde je me suis posé la question de savoir ce qu'il avait pu mettre dedans, je lui fait confiance. Je ne mange toujours pas de grosse quantité, mais je mange avec appétit et presque avec plaisir. Je ressens déjà les bénéfices de ses petits repas, je me sens en meilleure forme et je me fatigue moins vite. 

    — Viens, rentrons.

    Après avoir mangé, on est restés encore un moment à observer le paysage, ma tête posée sur son épaule. J'étais pas loin de m'assoupir quand sa voix m'a fait sursauter.  Je tourne le visage vers lui avant de hocher la tête en faisant un petit sourire.

    Il m'aide à descendre de notre perchoir puis on reprend main dans la main la direction de la maison. Je me tourne une seule fois pour apercevoir une dernière fois les vestiges de la cabane avant qu'elle ne disparaisse derrière les fourrés. Je ne sais pas comment m'expliquer mais je me sens apaisé et calme comme si me trouver dans un endroit où Ohm avait été heureux dans le passé m'a fait retrouver la paix.

    — Le village n'est pas très grand, mais on pourrait aller le visiter demain. Qu'est ce que tu en penses ?

    Maintenant que l'on a trouvé la cabane, il faut aller de l'avant, continuer à avancer et essayer de découvrir de nouvelles choses. C'est un peu effrayant combien ces vacances m'aident à faire le point sur ma vie à travers des parallèles aussi doux qu'être en compagnie de Ohm.

    — C'est une bonne idée. Tu crois que l'on pourra passer une journée sur un bateau, aussi ?

    Son sourire s'agrandit et il hoche la tête avant de lâcher ma main pour passer son bras autour de mon épaule.

    — Bien sûr, tout ce que tu voudras.

    Timidement, je passe mon bras autour de sa taille et profite de la chaleur de notre étreinte alors que l'on rentre tranquillement vers la maison en discutant de tout et rien.

    — Tu voudrais qu'on lise quel livre après ?

    Je réfléchis un instant alors que l'on sort du couvert des arbres pour entrer dans le verger. Même si les livres ne me sont plus aussi nécessaires qu'avant pour oublier, j'aime beaucoup écouter Ohm lire. 

    — Une… une histoire d'amour.

    Je n'ose pas le regarder et surtout je m'étonne moi-même de faire ce genre de demande. Depuis un an j'évite à tout prix la romance et là je lui demande de me lire une histoire entière.

    Je trouve soudain l'observation des manguiers très intéressante. Il pouffe de rire, la main qui était posé sur mon épaule vient me caresser les cheveux avant d'appuyer sur ma tête pour m’embrasser la tempe, libérant une nuée de papillons dans mon estomac.

    — Je vais voir ce que je peux trouver alors.

    Je me détends, pouffant à mon tour et je le laisse m'entraîner vers les fraises. Il a compris que j'adorais ça et que j'en mangeais sans me poser de question. 

    Du coup, à chaque fois que l'on passe par le verger, il m'emmène en manger quelques-unes. Je m'accroupis devant l'un des plants de fraises et soulève les feuilles à la recherche de la plus grosse et de la plus mûre. 

    Je trouve enfin mon bonheur et je me redresse en mordant dans une fraise juteuse. Le goût légèrement acidulé sur ma langue est équilibré par le sucre dans le fruit. Je veux que Ohm la goûte aussi, sauf qu'avant de me retourner mon regard tombe sur l'entrée de la maison et le fruit m'échappe des mains.

    Ma respiration se bloque dans ma poitrine alors qu'une femme se tient sur le pas de la porte. Je sais qu'elle ne doit pas représenter un danger, qu'elle doit avoir une bonne raison d'être là. Pourtant l'angoisse me fait brusquement reculer et je sursaute vivement quand je me cogne contre Ohm.

    — Nanon ?

    Ses bras s'enroulent autour de moi pour me retenir et il pousse un petit soupire quand il comprend d'où provient ma réaction. 

    — Nong !!

    La jeune femme sautille sur place en faisant de grands gestes avec ses bras. Son visage est souriant et lumineux et elle nous observe avec bienveillance. Malgré moi, je me mets à trembler contre le torse de Ohm qui aussitôt resserre son étreinte et se penche pour me parler à l'oreille.

    — Je suis désolé Nanon. Ma grande sœur est très curieuse. Elle n'est pas méchante, mais elle ne tient pas en place.

    — Désolé… j'ai été surpris…

    La jeune femme s'est élancée vers nous et je prends une grande inspiration pour me contrôler. Je réalise alors que notre position actuelle n'est pas vraiment amicale et je me raidis. Je tente de quitter ses bras, je ne veux pas qu'il ait de problème avec sa famille par ma faute, mais il m'en empêche.

    — Ne bouge pas. Ma famille est au courant et ils sont heureux pour moi.

    Je me détends, soulagé de ne pas être la cause d'une discorde au sein de sa famille au moment où sa sœur arrive à notre niveau.

    — Nong Ohm ! Pourquoi tu ne m'as pas dit que tu venais ? Si Lhong Sun ne m'avait pas prévenue, je n'aurais pas pu venir te voir.

    — Phi… tu savais très bien que je partais quelque temps avec Nanon.

    Je suis fils unique, alors c'est étrange de les voir échanger l'un avec l'autre, mais c'est assez marrant à voir. Elle se tourne alors vers moi et je ne peux pas m'empêcher de répondre timidement à son sourire.

    — Nong Nanon, je suis vraiment contente de te rencontrer. Je suis Phi Dream, la grande sœur de Ohm. Il me parle tellement de toi depuis des semaines que je ne pouvais plus attendre de… Noooong !

    J'ai la bouche entrouverte sans trop comprendre ce qui est en train de se passer. Phi Dream parlait sans s'arrêter et je me demande même si elle prenait le temps respirer quand soudain Ohm m'a lâché et a jeté sa sœur sur son épaule lui faisant pousser un hurlement strident.

    Il s'est ensuite précipité vers la maison avec son chargement tout en se disputant. Je me mords la lèvre pour ne pas éclater de rire, mais j'apprécie beaucoup les interactions entre les deux.

    — Nanon viens, je vais juste rafraîchir les idées de Phi. 

    — Ohm je t'interdis de faire ça ! Je viens d'aller chez le coiffeur.

    Ils entrent dans la maison et je m'approche lentement un petit sourire en coin, alors que les cris, les rires et les menaces sont bientôt accompagnés de bruits d'eau.

     

    On est tous les trois installés dans le salon, Ohm est à côté de moi, nos mains sont enlacées, mais je ne me sens pas très à l'aise. Peut-être parce que Phi Dream est assise en face de nous, une serviette autour du cou. Son regard passe de l'un à l'autre. Un regard noir envers son frère qui se transforme en un sourire bienveillant et curieux quand elle se tourne vers moi.

    — Arrête Phi… tu le mets mal à l'aise.

    Elle lui répond d'un claquement de langue et du coin de l'œil je vois clairement mon petit ami se retenir de rire. Son pouce se met à me caresser la main et ce petit geste me détend légèrement.

    — Désolée Nong Nanon si je t'ai surpris. Je voulais juste passer du temps avec mon idiot de petit frère et faire connaissance de celui qui réussit à le supporter. 

    Elle croise les bras sous sa poitrine et tacle Ohm tout en se présentant à moi. Je cherche à lâcher la main de celui-ci pour faire un waii à sa sœur, mais il ne me lâche pas. Je n'ai pas d'autre choix que d'emmener sa main avec la mienne pour faire ce geste de respect envers sa sœur.

    — Enchanté Phi et ne t'excuse pas, ce n'est pas grave, je vais bien.

    Je lui fais un petit sourire pour lui montrer que je vais bien. Sa présence ne me gêne pas vraiment, elle a l'air gentille et même s'il marmonne en râlant, Ohm a l'air heureux de la voir.

    — Et combien de temps tu restes ?

    Je me mordille la lèvre pour ne pas rire, mais le voir boudeur comme ça, presque à taper du pied. Me fait découvrir un autre aspect de sa personnalité. Il se montre toujours fort et dans le contrôle avec moi, que je me prends à aimer encore plus cette partie de lui.

    — Je dois repartir pour le travail dans trois jours.

    J'entends clairement le soupir de Ohm et je ne sais pas pourquoi mais même si je ne le vois pas, je l'imagine très bien lever les yeux au ciel.

    — Enfin, je pourrais aussi repartir et appeler maman pour lui dire que je n'ai pas pu me reposer ici car mon cher petit frère a emmené son cher et tendre.

    Aussitôt Ohm se lève en râlant et moi je reste figé, les observant se disputer. Enfin, ce n'est pas vraiment une dispute, mais un échange étrange entre un frère et une sœur. Cela dure plusieurs minutes avant que, battu, Ohm ne se réinstalle en boudant à côté de moi.

    Je n'ose pas le faire en présence de sa sœur, mais j'ai envie de le prendre dans mes bras pour le consoler. Phi Dream affiche, elle, un sourire victorieux et chose étrange, j'ai hâte d'apprendre à la connaître. 

    — Bien alors, je m'installe dans quelle chambre ?

    Je frémis quand elle pose la question, car voilà une chose à laquelle je n'avais pas pensé. Phi Dream est une femme et elle ne peut pas dormir avec l'un d'entre nous. Je tourne la tête vers Ohm qui semble tout autant gêné que moi et mon visage s'enflamme quand je comprends que pendant trois jours on va devoir partager la même chambre.



  • Commentaires

    6
    Dimanche 3 Décembre 2023 à 22:06

    Bah voilà, ça m'a donné envie de manger des fraises et, géniale la sœur XD

    Hâte de lire le prochain chapitre  ;0)

    5
    Lundi 4 Juillet 2022 à 19:09

    Merci pour ce neuvième chapitre <3 passez une excellente semaine.

    4
    Vendredi 1er Juillet 2022 à 00:29

    Merci pour ce nouveau chapitre :)

    Hâte de savoir comment va se passer cette première nuit ensemble :D

    3
    Mercredi 29 Juin 2022 à 21:14

    Oh super ils ont pu faire de longues ballades ensemble et retrouver la cabane..

    Oh, Oh la soeur à l'air super et attention ils vont devoir partager la même chambre

    Hâte de lire la suiteyes

    2
    Mercredi 29 Juin 2022 à 20:14

    J'ai eu envie de me balader dans cette forêt et de manger ces fraises he

    Hâte de lire la suite avec cette histoire de chambre ^^ 

    Merci pr ce chapitre, bises <3

    1
    Mercredi 29 Juin 2022 à 18:34

    merci  pour se nouveau chapitre

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