• 62ème Chaos

    62ème Chaos
    Satisfait

    Et il s'avère que c'est exactement ce que je craignais. Ce bâtard n'a entendu que la moitié de l'histoire.

    Sérieusement. Maintenant il fait la tête alors que son équipe est en tête du classement. Il est vraiment malheureux en ce moment. Et au lieu d'être énervé et de m'ignorer, il est juste énervé et insiste pour me tourner autour encore plus maintenant ! Merde.

    J'aurais dû m'en douter depuis le temps. Phun Phumipat est têtu. Il est du genre à ne pas lâcher prise après avoir mordu quelque chose. Il mord particulièrement fort quand il est de mauvaise humeur. En l'occurrence, les membres du staff nous ont dit que nous pouvions vaquer à nos occupations et aller au lit après avoir terminé les jeux. La première chose que Phun a décidé de faire a été de se diriger vers moi. Il a ignoré tout et tout le monde. Il s'est assuré qu'il n'y avait aucun moyen pour Earn de rester près de moi, et encore moins d'avoir une conversation avec moi. Et je veux dire au sens littéral du terme.

    Ce n'est même pas comme s'il me parlait alors qu'il traîne près de moi ! Il est là, mais il refuse de me parler. Bien sûr, il parle à Joke ou à Nant. Il discute même avec mes amis comme Ohm, Palm et Pong. Il va même jusqu'à parler à Earn et Pete. Il parle à peu près à tout le monde, sauf à moi. Apparemment, je mérite son silence.

    Alors pourquoi tu me tournes autour et tu fais fuir les gens pour qu'ils ne me parlent pas ?

    Enfoiré !

    J'ai envie de le maudire, mais je me retiens. En plus, c'est pas comme s'il voulait me parler. Alors devinez quoi ? Je ne veux pas lui parler non plus. (Ha) Si ça doit être comme ça, alors tant pis. Je me dis que je vais juste essayer d'agir normalement alors que Phun plane anormalement au-dessus de moi, constamment, comme une ombre.

    Je veux dire, rien de tout ça n'est normal ! Il me suit partout ! Il me suit quand je sors pour prendre une douche. La douche ici est en plein air, ce qui signifie qu'il y a une énorme baignoire au milieu et que les gens utilisent des bols plus petits pour y puiser de l'eau et se rincer. C'est un espace public et partagé, donc les gars peuvent montrer leurs atouts s'ils le souhaitent. (Ou le moins beau, mais je n'ai aucune envie de regarder.) Phun se colle à moi de très près puisque ce ne sont pas des sanitaires privés. J'ai un choc quand ce secrétaire du conseil des élèves me bombarde d'eau et me lance un pain de savon. Puis il répète le processus de déverser de l'eau partout pour me rincer. Ensuite, il me chasse d'un revers de la main et m'ordonne de m'habiller.

    Mec, où est le feu ?! Ce Noh ne reculera pas si facilement ! Hahaha. Je continue à jouer avec Ohm et Palm. J'ignore le regard de mort de ceux qui sont à proximité. Mes amis et moi, nous nous en prenons à Pong et l'attaquons avec de l'eau. Et pourquoi on ne le ferait pas ? Apparemment, il savait que cet endroit avait seulement un bain public. (Parce qu'il a appelé un membre du staff et a demandé à l'avance.) Mais il ne l'a dit à aucun d'entre nous ! Il le savait donc il a préparé un caleçon rouge foncé pour le porter sans s'inquiéter. Le reste d'entre nous avons enfilé un boxer vert clair, jaune clair, bleu clair et rose clair. (Nous pourrions tout aussi bien ne rien porter à ce stade.) Il est différent de nous, alors il va l'avoir !

    Enlève-le !

    Ahahaha ! C'est hilarant ! C'est tellement satisfaisant de voir le jeune maître Pong, qui vient de se laver avec son savon parfumé, se rouler sur le sol en ciment. (Je répète ! C'est un sol en ciment au lieu d'un sol carrelé.) Hé hé hé. De loin, on pourrait croire qu'on le tabasse. Franchement, se faire battre est peut-être la meilleure option à ce stade pour lui plutôt que de se faire déshabiller comme ça. Désolé, mon ami. On est tous à peu près nus alors ne crois pas que tu vas t'en sortir si facilement !

    Mes amis et moi faisons un tel vacarme dans la salle de bain alors que nous embêtons Pong. Finalement, Ohm termine la mission en arrachant avec succès le caleçon rouge de Pong ! Ahahaha ! C'est dommage qu'il n'y ait pas de caméras autour. (Qui en amènerait ici de toute façon ?!) On siffle et on applaudit Pong pendant un moment puis on décide de se laver à nouveau puisque l'on s'est roulés par terre.  Je veux dire, le sol en ciment n'est pas vraiment propre. (C'est dégoûtant...) Mais bon, comment se fait-il qu'Ohm termine sa douche si rapidement ?!  Je viens juste de commencer et je le vois déjà partir vers l'endroit où sont accrochés nos vêtements et nos serviettes. Et là je comprends.

    Ce connard ! Il utilise encore ma serviette !

    — Putain, Ohm. T'es sérieux ?! 

    Je lui crie dessus à pleins poumons. Il se moque de moi, apparemment sans se soucier du monde. (Bâtard !) Mais avant que je puisse l'insulter encore un peu, une serviette douce et familière atterrit sur ma tête.

    Phun fait semblant d'être indifférent. Il passe ses doigts dans ses cheveux trempés. Je remarque qu'il bloque mon corps avec le sien. Je fronce les sourcils avant de regarder le caleçon bleu clair que je porte. Oui, le tissu est assez fin mais il n'a pas l'air obscène (surtout comparé au boxer jaune clair de Palm, hahaha). J'accepte rapidement la serviette de Phun sans faire d'histoires.

    Je me sèche soigneusement avec la serviette fraîche de Phun, en veillant à ne pas utiliser tous les endroits secs. Je  lui rends rapidement la serviette, car il porte un caleçon orange clair. Il est tellement trempé qu'on peut en voir tous les détails. Je voudrais lui dire que je ne veux pas que quelqu'un d'autre que moi le voit exposé comme ça, mais je ne veux pas être le premier à rompre le silence entre nous.

    Nous nous habillons tranquillement l'un à côté de l'autre (tout en essayant de cacher le corps de l'autre). Puis nous retournons à notre lieu de vie en silence. Sur le chemin du retour, je ne cesse de jeter un coup d'œil à ma droite pour regarder le visage inexpressif de Phun. Il porte toutes mes affaires dans ses bras. Et je me demande, si je l'avais devancé et que je portais certaines des affaires, est-ce qu'il me tiendrait la main de sa main libre maintenant ?

    Je connais très bien la réponse à cette question.

    On est enfin de retour dans notre chambre. C'est techniquement une chambre, c'est juste que c'est une salle de classe. (Nous sommes dans une école et non un hôtel après tout.) La chambre dans laquelle nous dormons est une immense salle de classe. Elle me rappelle les endroits où vivaient les immigrants sans papiers dans les documentaires que j'ai vus. Comme prévu, tout le monde est déjà couché quand nous rentrons. Nous trouvons rapidement et discrètement nos propres places que nous avions heureusement gardées avec nos sacs à dos. Sinon, nous aurions dormi les uns sur les autres. 

    Je range mes affaires à côté d'Ohm. Il s'étale de la lotion parfumée. Argh, qui essaie-t-il de tromper ? Cette lotion ne va pas l'aider à être plus beau ! Ha ! Je me dis en silence. Je n'ai même pas le temps d'ouvrir la bouche pour parler qu'une main atterrit sur ma tête avec un bruit sourd. 

    — C'est quoi ce bordel ?! Pourquoi tu m'as giflé ?

    Paf ! C'est mon tour, prends ça ! En retour, je reçois une grosse bouteille de lotion sur la tête. Ow, ça fait mal ! Il me fait mal !

    — Je sais que tu disais de la merde sur moi dans ta tête. Je peux le voir sur ton visage, connard.

    Comment il le savait ?! Je veux dire, comment peut-il être une personne aussi horrible ?! Bien sûr, j'ai dit de la merde cette fois, mais si je ne l'avais pas fait ? Enfoiré. Je lui montre mon majeur avant d'ouvrir ma paume pour prendre un peu de sa lotion. Hé hé. J'aime celle qu'utilise Ohm. Elle sent bon. Je lui demande souvent si je peux lui en emprunter quand je traîne chez lui. Je me sens tellement à l'aise avec et je m'endors très facilement. Je n'ai jamais pris la peine de m'en acheter une bouteille parce que c'est très cher. (Tu sais ce que c'est, quand tu n'es pas né aussi beau que moi, tu dois dépenser de l'argent. Tu vois ce que je veux dire ahahaha !)

    — Est-ce que vous allez bientôt dormir ? On doit se lever tôt demain, nous rappelle Palm à proximité. 

    Pong est à côté de ce dernier, mais aussi à côté de Ohm. Je jette un coup d'œil à ma montre et il est plus d'une heure du matin maintenant. Je lui fais un signe de tête et je ferme mon sac à dos.

    — J'éteins les lumières alors, dit Earn puisqu'il est le plus proche de l'interrupteur. 

    Le reste d'entre nous lui adressons un rapide signe de tête avant que la lumière ne s'éteigne. Avant que les lumières ne s'éteignent, j'ai remarqué que Phun était à côté de Joke et Nant. Ils sont de l'autre côté de la pièce. Je ne peux pas m'empêcher de me demander s'il a finalement décidé d'arrêter de me surveiller. Mais peu importe, j'ai tellement sommeil maintenant. Je baille lorsque ma tête touche mon oreiller. (En fait, c'est mon sac à dos, mais je le considère comme mon oreiller.) Je me serais endormi si je n'avais pas...

    Il y a quelqu'un qui se glisse entre Pete et moi ! (Ohm est à ma droite. Pete est à ma gauche et Earn est à côté de lui. Mais qui c'est, bon sang ! Je tourne mon corps pour regarder dans l'obscurité. Je peux voir que c'est...

    … ce bâtard de Phun Phumipat.

    Yo ! J'ai failli crier fort mais une main chaude couvre ma bouche. Je fronce les sourcils et le regarde. Il a ruminé toute la journée mais maintenant il a un doigt sur ses lèvres pour me dire de rester tranquille. Je hoche la tête. Je fronce encore plus les sourcils en regardant autour de moi pour voir si quelqu'un d'autre s'est réveillé et nous a vus.

    C'est probablement la première fois en six heures qu'il sourit (à moi). Du moins, je pense qu'il sourit parce qu'il fait si sombre que je ne peux pas le dire. Peut-être que je me trompe. Je plisse les yeux et j'essaie de regarder plus attentivement quand un bras chaud m'attire dans une étreinte familière.

    Phun me serre doucement, comme il le fait habituellement quand il m'aide à m'endormir. Sa paume chaude me tapote la tête presque par jeu. Il presse ses lèvres contre mon front. Je fais de même pour lui et je m'endors lentement dans son étreinte chaleureuse.

    Je ne sais pas si quelqu'un va nous surprendre demain matin.

    Mais ce n'est pas grave. Parce que tant que Phun est là, je suis en sécurité.

    Je le crois vraiment.

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    — @(#$&*{)(@&^!*)(*_)_(*&^(*)

    Bon sang ! Pourquoi c'est si bruyant ce matin ? J'ai à peine dormi, bon sang. Je fronce les sourcils, les yeux toujours bien fermés, car j'ai l'impression que la lumière du soleil essaie de les faire s'ouvrir.

    — Merde, Noh ! Réveille-toi ! Réveille-toi ! Réveille-toiiiiii !

    Argh ! Je sais qu'il n'y a qu'une seule personne qui essaierait de me réveiller avec ses pieds ! Je m'écarte de lui et je balance mon bras sur la personne à côté de moi, par habitude, puisque j'ai fait ça toute la nuit.

    — Hey !

    Pourquoi diable est-ce qu'il crie ? Attends, ce n'est pas la voix de Phun ! Je sursaute et retire rapidement mon bras avant d'ouvrir les yeux. La victime malchanceuse que je viens d'essayer de câliner, c'est Pete !

    — Noh, tu as pris ma virginité !

    Putain ! Je suis complètement réveillé maintenant et je lui fais un doigt d'honneur même si on n'est pas vraiment proche. (Parce qu'il a décidé de faire le malin avec moi.) Eh, peut-être que c'est ma faute parce que c'est moi qui l'ai câliné en premier ? Haha. Mais Phun ne dormait-il pas à côté de moi la nuit dernière ? C'était un rêve ? Est-ce que j'ai vraiment fait des câlins à Pete toute la nuit ?! Pas du tout.

    Je me frotte les yeux pour me débarrasser de ma somnolence avant d'essayer de scruter la pièce pour trouver où Phun pourrait se trouver. Il s'avère qu'il dort encore profondément à l'autre bout de la pièce. (Putain, pourquoi personne ne l'a réveillé aussi ?!) Et la personne à côté de moi, que j'ai prise pour Phun toute la nuit, s'avère être Pete. Il n'est qu'un innocent spectateur que j'ai fini par enlacer. Heureusement, il a l'air d'avoir récupéré et il est en train de plaisanter avec ses amis. Il ne semble pas être dérangé par ce qui s'est passé. (Je ne le suis pas non plus.) Je me gratte la tête en commençant à croire que la nuit dernière n'était qu'un rêve.

    Argh, oublie ça. Phun est en train de se réveiller parce que nous sommes trop bruyants. Il me fait encore la tête. Il prend sa brosse à dents, son dentifrice et un savon. Il s'arrête à la porte, probablement pour m'attendre. Comme si je voulais y aller avec toi ! Je hausse les sourcils pour le regarder odieusement avant de m'asseoir et d'attendre Palm et Pong pendant qu'ils rassemblent leurs affaires. Je pars avec eux et laisse Ohm derrière moi puisqu'il m'a dit qu'il avait déjà fini sa tâche. (Quand ?) Il veut dormir un peu plus. Ok, peu importe.

    À mon retour, je remarque qu'il manque un morceau à la carte de visite de Palm. Ahahaha ! J'avais presque oublié le jeu des Vampires. Palm a été stupide de laisser son badge dans la chambre. Le vampire l'a eu. (Je ne savais même pas que c'était autorisé !) C'est ce qui arrive quand on est négligent. Hahaha. Qui l'a tué de toute façon ? Je me retourne rapidement pour regarder Ohm. Il me fait un sourire en coin, comme s'il me mettait en garde contre l'imprudence. Un frisson me parcourt l'échine et je me dépêche de mettre mon propre badge autour de mon cou. Je suppose qu'avoir Phun qui me colle à la peau n'est pas si mal. Au moins, ce salaud d'Ohm ne pourra pas m'atteindre !

    Après avoir assisté à ce meurtre horrible (grâce à l'humiliant badge déchiré de Palm, on ne peut s'empêcher de se demander comment ce type a pu survivre moins d'une journée), tous les campeurs se retrouvent sur le terrain de football, juste devant le bâtiment de l'école. Les seniors nous demandent de nous mettre en ligne avec nos couleurs comme si nous étions des collégiens. Phun est maintenant séparé de moi et doit s'asseoir avec les autres badges jaunes. (Naturellement, il m'a lancé un regard noir avant de partir.) Pendant ce temps, je suis avec le groupe des badges rouges. (Encore de la politique ?) Les aînés du collège commencent à nous parler des activités du jour et à nous dire quel groupe sera responsable de quelle partie du projet.

    Puisque nous sommes ici pour planter des arbres, il n'y a pas grand chose d'autre à faire que... planter des arbres. Sauf que nous ne sommes pas exactement en train de faire pousser une forêt parce qu'ils nous font planter des herbes de vétiver (1) à la place. Elles sont censées agir comme une forteresse naturelle et absorber l'eau pour éviter les inondations. Eh bien, ce n'est pas si mal. Ça a l'air simple, on va juste planter des herbes dans de la terre. Je laisse échapper un bâillement en les écoutant nous apprendre à planter des herbes correctement. Je suis déjà en train de m'assoupir et j'entends le rire d'Earn.

    — Tu as sommeil, Noh ? Tu as réussi à dormir la nuit dernière ?

    — Ouais…

    Je commence à repenser à la nuit dernière, maintenant qu'Earn en a parlé. Je pense avoir bien dormi la nuit dernière. Mais comment se fait-il que j'ai eu l'impression de rêver de Phun ? Peut-être qu'en fait, je ne l'ai pas fait ?

    Je me retourne pour le regarder avec une expression endormie sur le visage.

    — Je l'ai fait mais... je veux dormir un peu plus.

    — Haha, vas-y. Je te réveillerai quand on sera prêts à partir.

    Génial, mec ! Je souris et accepte son offre. Puis je pose mon visage contre mes genoux et je m'endors. Merci, mec !

    ...

    — Noh, Noh. C'est l'heure de partir.

    Hein ? Qu'est-ce qui se passe...?

    Je lève ma tête de mes genoux. Je vois d'autres campeurs qui se lèvent pour partir. Je suis le seul à être encore au sol (puisque je faisais la sieste) et maintenant je respire la saleté et l'herbe que les autres campeurs ont épousseté de leurs vêtements.

    — Kof, Kof, Kof.

    Bon sang, les gars ! Ne faites pas une tempête, je suis toujours assis ici !

    Je fais du bruit intérieurement alors qu'une petite serviette est jetée dans ma direction.

    — Merci, Earn !

    Je me couvre rapidement le visage avec et j'en profite pour me lever du sol. Je lève les yeux pour voir... Phun.

    Aw, merde. Je pensais que c'était Earn ! Je suis dans la merde.

    Je reste bouche bée en fixant Phun qui semble faire semblant d'être devenu sourd et de ne pas avoir entendu qui j'ai remercié. C'est mieux comme ça, je suppose ? Je commence à le remercier quand je me reprends. Si je lui parle en premier, je perds, non ? (Nous jouons à un jeu maintenant ?) Je lui rends la serviette (usagée). Phun la reprend sans dire un seul mot. Il refuse de bouger tant que je ne bouge pas.

    Oh, allez !

    — Quelle est la zone des jaune, Phun ? C'est loin ? demande Earn pendant que nous nous y rendons tous les trois. 

    Ça semble être un long chemin à parcourir. En fait, je n'ai aucune idée de quelles zones correspondent à quelles couleurs parce que je dormais quand ils nous l'ont dit plus tôt.

    — Près des cotonniers. Ils ont dit que nous serons près de l'eau également, répond Phun avec un sourire en portant deux pelles sur son épaule. (L'une d'elles est la mienne.) 

    Earn lui sourit en retour.

    — C'est bien. Notre zone est plus en arrière. Je ne pense pas qu'il y ait de l'eau là-bas. Je parie que ça va être chaud. Noh, ça va aller ?

    C'est gentil de m'inclure dans votre conversation. Je cligne des yeux plusieurs fois avant de lever les yeux vers le soleil éclatant. Puis je souris d'un air penaud. 

    — Bien sûr. Je suis un ROTC après tout.

    Et je n'ai fait l'école buissonnière que quatre ou cinq fois. Hé hé hé.

    — Tu es au niveau inférieur, pourquoi tu te vantes ? Attends d'être dans la cour des grands comme nous et tu pourras parler. Pas vrai, Phun ?

    Yo, c'est quoi ce bordel ? J'ai eu de la chance d'atterrir au niveau inférieur, et alors ? Vous êtes juste jaloux tous les deux. Je jette un coup d'œil à Earn mais il arrête de me faire chier. Il est maintenant en train de dire des conneries au sujet d'un soldat qu'ils connaissent tous les deux avec Phun à la place. C'est bien que vous vous entendiez bien, non ?

    Je jette un coup d'œil à ces deux-là pendant qu'ils s'amusent à discuter entre eux et je ne peux m'empêcher de sourire. C'est ce que j'aime chez Phun. Bien sûr, il est jaloux et possessif (les autres ne le savent pas, c’est seulement moi), mais il n'est pas du genre à chercher la bagarre. Phun ne s'est jamais défoulé sur nos amis, ce qui m'aurait mis dans l'embarras. Phun ne m'a jamais blessé physiquement ou émotionnellement. Bien sûr, parfois, il s'énerve et fait des choses bizarres comme d'habitude parce que cela correspond au type de personne qu'il est. (Comme ce qu'il fait maintenant.) Parfois, il empêche discrètement les autres de m'approcher. Et faire une scène en public juste pour prouver que j'ai ma place à ses côtés ? Oubliez ça, il ne ferait jamais une telle chose. Phun m'a toujours traité avec respect et je l'en remercie.

    Je jette un coup d'œil à Phun avec un sourire sur le visage. Il a l'air confus et veut probablement demander pourquoi je le regarde comme ça, mais il ne le fera pas. (Cette guerre froide est toujours d'actualité.) Hé hé hé. Il est curieux et ça m'amuse, alors je siffle joyeusement pour l'encourager. Puis j'entends une voix qui m'interrompt.

    — Noh ! Bonjour ! Est-ce que tu regardes où tu marches ? Hé hé.

    À qui est cette voix ? Je cherche autour de moi d'où vient cette voix qui me semble familière mais je n'arrive pas à mettre le doigt dessus. Et puis j'en découvre la source.

    Oh. C'est la fille du lycée privé !

    Ah, merde. Je pâlis parce que si elle m'a reconnu, moi je ne me souviens pas de qui elle est. Que dois-je faire maintenant ? Sera-t-elle blessée si elle se rend compte que je ne la reconnais pas ? Ah, j'aimerais avoir une bouée de sauvetage en ce moment.

    Pendant que je me creuse la tête pour essayer de me rappeler son nom, la fille devant moi me montre le chemin. 

    — Je suis Jeed. Je t'ai vu hier mais je ne t'ai pas appelé parce que j'avais peur que tu ne te souviennes pas de moi.

    Oh, ouais ! Jeed ! C'est elle ! Maintenant je me souviens !

    Maintenant que Jeed s'est représentée, je ne peux pas m'empêcher de faire un grand sourire comme si j'étais fou. Je ne peux pas m'en empêcher, je suis content de m'en souvenir. Je remarque que Phun a l'air contrarié pendant une seconde mais je ne lui accorde aucune attention.

    — Bien sûr que je me souviens de toi. Haha.

    Menteur, menteur. C'est du vent. Je vais ajouter ça à la longue liste des péchés que j'ai commis. Je paierai pour ça plus tard en enfer, je suppose. Au moins, mon mensonge réussit à faire sourire Jeed. 

    — Je suis si heureuse ! Hé hé. En fait, je te croise souvent près du lycée privé mais je ne t'ai jamais salué parce que j'avais peur que tu ne te souviennes pas de moi.

    Peut-on ne pas répéter la partie où je ne me souviens pas de toi ? (Parce que je ne me souvenais pas.) Je souris timidement en retour. Avant que je puisse répondre, une voix familière et profonde m'interrompt.

    — Tu es dans l'équipe rose, Jeed ? Donc tu es dans la même équipe qu’Ohm alors ?

    — Ouais, le gars un peu bruyant, non ? Tu es dans l'équipe jaune, donc tu es dans la même équipe que Yuri ?

    — Oui.

    Et ils continuent leur longue conversation au point que Jeed n'a plus l'occasion de discuter avec moi. Et ça me convient parfaitement, vraiment. Profite de ta discussion. Continue. Passe entre Earn et moi pendant que tu as une conversation sérieuse avec Jeed pendant que tu y es. (Hmph !)

    Il est en train de le faire, d'ailleurs. Je suis étonné qu'il réussisse à tenir une conversation avec Jeed pendant tout le trajet. (Il ne parle même pas autant quand il est avec moi.) Même quand on marche littéralement sur les crêtes des rizières. Oui, il y a des rizières autour de nous maintenant. Phun continue de parler à Jeed tout en essayant de marcher sur les crêtes comme autant d'obstacles continuels. Il n'y a pas d'accalmie, pas un seul instant. Hé hé. Ce n'est pas génial. Je suis si heureux pour toi. Tu essaies vraiment de la draguer, n'est-ce pas ? Je peux le voir dans les yeux de Jeed et c'est une sorte de conquête de sa part. Ça me démange de dire quelque chose. Je veux avertir Phun qu'il risque de s'attirer des ennuis.

    Finalement, ce rêve (lequel ?) se brise lorsqu'il est temps pour Phun de nous quitter pour rejoindre ses camarades de l'équipe jaune. Il laisse derrière lui Jeed, Earn et moi pour qu'on continue notre chemin vers notre propre zone. Avant de partir, Phun me lance un regard noir comme pour m'avertir. Quoi ? Tu crois que je vais essayer de la draguer ? Elle est déjà tombée amoureuse de toi, espèce de salaud.

    Je lui grogne dessus avant de partir pour rejoindre Jeed et Earn. Nous parlons à peine, mais pas parce que je suis contrarié ou quelque chose comme ça. Mais il fait tellement chaud. Il fait tellement chaud que j'ai besoin de mettre une serviette sur ma tête ou je m'évanouirai de chaleur. Nous n'avons même pas encore commencé à travailler et j'ai déjà envie de me rendormir. Je n'ose même pas imaginer à quel point la situation sera mauvaise une fois que nous aurons commencé à travailler. Earn et moi faisons de petites discussions et nous plaignons du temps qu'il fait tandis que Jeed s'excuse puisque nous sommes arrivés devant la zone de l'équipe rose. Au loin, j'aperçois Ohm qui aide une jolie fille à transporter des bottes d'herbes de vétiver. Et même s'il est loin de moi, il essaie toujours d'afficher un grand sourire et de montrer qu'il est mieux loti que moi. Hé, le salaud. Bien sûr, maintenant tu agis comme un gentleman. Quand il est avec nous, il est plus paresseux qu'un paresseux. Qu'il soit maudit ! Je lui fais un doigt d'honneur avant de passer devant le groupe d'un air découragé. 

    — Une seule zone est assez large. Je me demande si on sera capable de la gérer. se plaint doucement Earn alors que nous continuons à cheminer à travers les différentes zones. 

    Il faut un long moment pour en traverser une, à tel point que je ne veux même pas imaginer la taille que pourrait avoir la nôtre. Et je ne suis pas non plus du genre à faire de l'exercice régulièrement. Oui, je suis dans la fanfare de l'école, mais je n'ai pas vraiment fait de défilé ces derniers temps. J'ai plutôt tendance à procrastiner et à m'entraîner dans la salle du club. Earn, d'un autre côté, n'a probablement pas à s'inquiéter. L'équipe de cheerleaders se donne à fond pendant les entraînements et avoir été choisi comme capitaine signifie que Earn a travaillé plus dur que les autres.

    — Comme si tu avais des raisons de t'inquiéter.

    Je lui donne une ou deux tapes dans le dos et lui fais un sourire. Il me sourit doucement en retour.

    — Je voulais dire toi. Je me demandais si tu serais capable de le supporter.

    C'est quoi ce bordel ? Il veut bien faire ou il me regarde juste de haut ?! Je passe de la main qui lui tapote le dos à celle qui lui donne une claque sur la tête. Hahaha. Il a beau être le capitaine le plus cool des cheerleaders, même ce président d'un club boiteux arrive à mettre un coup ou deux.

    — Va te faire foutre, je suis en super forme ! Regarde ! Regarde ! Je lui donne la chance de voir les muscles de mes biceps (ou ma graisse). Hahaha. Earn reste sans voix pendant un moment avant de commencer à dire quelque chose.

    — Merde, Noh. Je pense qu'il est temps que tu commences à faire de l'exercice.

    Trou du cul ! Je ne t'ai pas demandé ton avis !

     

    Trois heures plus tard, je commence à être d'accord avec la suggestion d'Earn.

    Comment peut-il faire aussi chaud ? ! Il fait si chaud que ma graisse est en train de fondre hors de moi. Et j'ai beaucoup de graisse ! Il y a beaucoup de masse qui fond en ce moment. Merde ! J'aimerais pouvoir enlever mon t-shirt mais il y a des filles autour et je veux être respectueux. Sans compter que le Gang des Anges a gagné en nombre maintenant qu'il y a d'autres écoles dans le coin. (Et ils sont beaucoup plus effrayants.) Je n'ai pas d'autre choix que de continuer à porter le t-shirt vert qui attire impitoyablement la chaleur. Bon sang !

    Planter de l'herbe est en fait plus difficile qu'il n'y paraît. Je pensais que ce serait simple et que je pourrais y aller doucement. Genre, creuser un petit trou et mettre un bouquet dedans et c'est tout. Mais en réalité, c'est beaucoup plus compliqué que ça. Le sol ici est extrêmement sec. (Et je veux dire sec, je ne pourrais pas imaginer quelque chose d'aussi sec si je ne l'avais pas vu de mes propres yeux). C'est tellement sec qu'il y a des fissures partout. Tout le monde a du mal à creuser. Nous n'avons même pas apporté assez de pelles pour tout le monde, alors nous laissons les filles et les gars (qui sont des filles à l'intérieur) les utiliser. Un dur comme moi ? (Oui, en ce moment, je suis le plus fort ! Vous ne pouvez pas me contredire.) J'utilise seulement mes mains !

    Creuser et planter des herbes à mains nues signifie avoir des éraflures et des ampoules. Les ongles d'Earn ont commencé à saigner. (Espèce d'idiot, tu creusais avec tes ongles ?) On a donc décidé tous les deux de procrastiner à l'ombre parce qu'on sentait qu'on ne pouvait pas continuer à creuser. Malheureusement pour nous, il n'y a pas de grands arbres dans cette zone. Nous n'avons que des herbes hautes près desquelles on peut s'asseoir et éviter le soleil.

    — Hé, Noh. Comment vont tes mains ? Fais-moi voir ?

    Est-ce vraiment le moment d'être si chevaleresque, Earn ? Je ricane sèchement en regardant mes mains abîmées. Il y a des coupures et des éraflures partout. Je jette un coup d'œil au type en face de moi dont les mains sont dans un état bien pire que les miennes. Je ne peux pas m'en empêcher et je l'engueule. 

    — Tu me demandes comment je vais ? Tu as vu tes propres mains ? Je vais chercher la trousse de premiers soins pour toi, d'accord ?

    — Non, tu n'as pas à le faire. Mes mains ne sont pas très importantes. C'est toi qui en as besoin pour jouer des instruments.

    Wow, j'avais complètement oublié cette partie. 

    — Je vais me débrouiller ! Si je ne peux pas jouer, je peux me détendre pendant les réunions du club, ahahaha !

    Ow, pourquoi il m'a frappé ?! L'esprit de Phi Diew l'a possédé ou quoi ? Je saisis ma tête et pointe son visage en guise d'avertissement.

    En vérité, Earn et moi faisons une pause dans le creusement parce qu'il n'y a plus grand chose à faire. Il n'y en a plus que quelques-unes à planter. Dans notre équipe, on a décidé de faire des pauses à deux. (Au lieu d'une maison complète. Quoi ? Ce n'était pas drôle ? Bien, plus de blagues de ma part. Hmph !) Earn et moi étions les deux derniers qui n'avaient pas encore eu la chance de faire une pause. (On travaillait à plein régime.) Les autres membres de l'équipe étaient unanimes à dire qu'il était temps pour nous deux de faire une pause. Ils s'occuperaient eux-mêmes du reste de la plantation et termineraient. Et c'est ainsi que je me suis retrouvé assis à côté d'Earn, si près l'un de l'autre, car il n'y a que peu de place à l'ombre. Hé, hé. Ne pensez même pas à courir voir Phun pour me dénoncer parce qu'il est déjà en train de venir ici !

    — Toujours pas fini, Earn ?

    Comme d'habitude, ce n'est pas à moi qu'il parle. Il parle à tout le monde autour de moi, sauf à moi. Bien sûr ! Je lui lance un regard en coin. Il sourit d'une oreille à l'autre en se plaçant impoliment entre Earn et moi.

    T'es si impatient, salaud ?!

    — Pas encore, il n'en reste qu'un peu. Votre équipe a déjà fini ?

    — Ouais, on a fini. Un tas de gens ont sauté dans l'étang pour jouer dans l'eau après !

    Ah, ça a l'air très amusant ! Je l'écoute en silence et j'ai failli lui demander d'aller jouer aussi. Mais je me suis souvenu que la guerre froide est toujours en cours.

    Bon sang. Parfois, je déteste vraiment ma propre fierté.

    Alors je me tais et je laisse Phun et Earn discuter entre eux de tout un tas de choses. Je commence à me sentir somnolent, vraiment somnolent. C'est probablement à cause de la chaleur. Peut-être que mon corps veut simplement se mettre en mode repos pour supporter cette chaleur. Mes paupières sont lourdes. Mais alors je remarque qu'il y a beaucoup de sang sur les mains de Phun.

    — …

    Mec, je meurs d'envie de lui demander s'il va bien, mais mon ego ne me permet pas de lui parler en premier. Je suis pathétique, n'est-ce pas ?

    Mais si je fais ça, ce ne sera probablement pas considéré comme une défaite, non ? Je prends secrètement sa main dans la mienne, en ayant peur de le blesser. J'espère que ce geste suffira à lui faire comprendre que je m'inquiète pour lui.

    Phun prend une seconde pour me regarder pendant qu'il discute avec Earn. Ses lèvres se recourbent en un doux sourire. Il tend son autre main pour guider ma tête et l'appuyer sur son large dos. J'esquisse un sourire heureux avant de presser ma joue contre son dos. Ma main tient toujours la sienne.

    Quand va-t-il recommencer à me parler ? Je meurs d'envie de me réconcilier avec lui.

    Je ne sais pas combien de temps s'est écoulé. Dans mon beau rêve, on pique-nique au sommet d'une montagne. Le temps est frais et venteux. Il y a un seau rempli de bière glacée pour nous aider à nous détendre. Quelqu'un joue de la guitare acoustique à proximité. Ce rêve est si doux que je n'ai pas envie d'ouvrir les yeux et d'affronter la réalité (de cette chaleur insupportable). Il y a aussi de jolies filles tout autour de nous.

    Bon sang ! Qui m'a poussé de la falaise ?! Putain de connard ! J'ai failli me cogner la tête sur le sol. (Heureusement, la main de Phun arrête ma chute.) Je me réveille en panique pour découvrir que ce n'était nul autre que Phun lui-même qui m'a tiré de mon imagination. Il s'est éloigné et m'a réveillé tandis que j'ai failli me fracasser la tête contre le sol ! Espèce de salaud !

    — Tu...!

    J'ai failli le maudire quand je me suis rappelé qu'on est encore en pleine guerre froide. Ça veut dire que celui qui parle en premier perd. (Sérieusement ?) Réalisant cela, je ricane de lui du mieux que je peux tout en gardant les insultes pour moi. Putain de connard, tu l'as fait exprès. J'essaie de le lui faire comprendre avec mes yeux. Il me fixe en retour. Oui, je l'ai fait. Qu'est-ce que tu vas faire ? Je te le ferai payer plus tard !

    Je peux entendre Earn rire bruyamment pendant que je me relève avec l'aide de la main de Phun. Oh, maintenant tu essaies d'être gentil après la connerie que tu as faite avec moi ? Je n'oublierai pas ce que tu as fait ! Je me dis en m'époussetant et en les rejoignant pour retourner à l'endroit où nous avons planté des herbes.

    — Est-ce que tout le monde a terminé depuis longtemps ? Désolé pour ça. je profitais vraiment de ma sieste.

    Je m'excuse auprès d'Earn avant qu'il ne me fasse signe de la main pour m'empêcher de m'excuser.

    — C'est bon, on vient juste de finir. Ohm, Pong et Palm sont venus tout à l'heure mais ils ont vu que tu étais endormi et ils sont partis. Je crois qu'ils sont allés jouer dans l'eau.

    — Merde, je veux y aller aussi !

    Lorsque nous nous dirigions vers notre zone tout à l'heure, on est passés devant une grande étendue d'eau et j'étais vraiment tenté de sauter dedans à ce moment-là. Après avoir découvert que mes amis jouent déjà dans l'eau, j'ai encore plus envie de les rejoindre. J'aimerais pouvoir voler jusque là-bas et plonger dans l'eau tout de suite ! (Quelqu'un ne se sentait-il pas tellement fatigué qu'il s'est écroulé tout à l'heure) ?

    — Ouais, on devrait se dépêcher avant que la journée ne se termine.

    Earn jette un coup d'œil à sa montre et me presse. Naturellement, je le suis.

    Hourra ! J'ai hâte de sauter dans l'eau !

    C'est exactement comme ce qu’Earn m'a dit. Je vois plus d'une douzaine de campeurs qui s'amusent déjà énormément dans l'eau à notre arrivée. Je regarde Ohm essayer de frimer devant les filles en faisant un salto arrière dans l'eau. (Je vais rire aux éclats si tu te cognes la tête à la place.) Mais il semble que les cris des ladyboys pour lui soient en fait plus forts. (Haha !) J'enlève rapidement mes chaussures et vais rejoindre mes amis de mon lycée et ceux des autres écoles qui s'amusent visiblement.

    — Laissez-moi jouer aussi ! Alors tu as fini ta zone depuis un moment ?

    Je m'accroupis et demande à Ohm puisque je n'ai toujours pas décidé de la manière dont je veux présenter mon saut. Ohm apprend à Palm comment s'aplatir comme une étoile de mer dans l'eau. Il lève les yeux vers moi.

    — Oui, il y a longtemps. Mes doigts sont tous émoussés maintenant.

    — Son équipe a fini tellement vite. Je parie qu'ils ont triché.

    Palm relève la tête de sa posture d'étoile de mer et dénonce Ohm. Ohm l'éclabousse d'une énorme vague d'eau en retour. Ils devraient vraiment jouer en fonction de leur âge au moins. J'espère qu'ils réalisent que c'est un étang et pas une vraie piscine.

    — Je pense que la raison pour laquelle ils ont fini si vite est qu’Ohm a mangé toutes les herbes. Tu sais, il n'a probablement pas pu s'en empêcher.

    — Enfoiré !

    Hahaha. Nous éclatons de rire et nous nous félicitons mutuellement d'avoir réussi à insulter Ohm en douce. À ce moment-là, j'entends des cris derrière moi.

    — Bougez ! Bougez ! Bougez !

    C'est Earn et Phun. Ils sprintent ensemble au loin. Puis ils synchronisent tous les deux  leur plongeon. Merde ! Ils avaient l'air trop cool ! Comment je vais sauter maintenant pour avoir l'air aussi cool ? Je dois faire un salto ? Ou un demi-tour ? (Ok, descendez d'un cran.) Alors que je réfléchis, quelqu'un me renverse et je tombe dans l'eau.

    Splash !

    Mon soi-disant plongeon cool s'est transformé en un plaqué ventral.

    Ça fait mal, bordel !

    Je peux entendre les rires des campeurs, probablement parce que j'avais l'air ridicule. (Noooon !) Et j'ai aussi mal au ventre maintenant. Ah, je sens que je vais exploser ! Je n'ai pas intérêt à découvrir qui m'a fait ça, sinon je vais les mettre en pièces. Je grommelle lorsque mes amis me plongent la tête sous l'eau au lieu de vérifier si je vais bien. 

    Nous continuons à jouer joyeusement dans l'eau. C'est en fait la première fois que je joue comme ça. Je n'ai joué que dans l'océan, les piscines et les chutes d'eau. Je n'ai jamais joué dans un étang comme celui-ci. C'est un peu effrayant aussi. (Parce que c'est assez profond, mes pieds ne peuvent pas atteindre le fond.) Mais c'est très amusant, probablement parce que je suis ici avec un groupe d'amis et je ne pense pas qu'ils me laisseraient me noyer. Hahaha. (Pourquoi est-ce que je me porte la poisse ?)

    — Ahhh ! Ne fais pas ça !

    Alors que nous nous amusons à remonter et à sauter encore et encore avec différentes poses, j'entends un grand cri près d'un chariot de crème glacée qui est garé à proximité pour que les campeurs puissent en acheter.

    Nous nous tournons tous immédiatement vers la source du cri. Nous voyons une jolie fille à la peau claire et pas une goutte de sueur sur elle. Autour d'elle, des filles aux vêtements trempés font de leur mieux pour la persuader de sauter dans l'étang en lui tirant les bras.

    — Non ! Je suis sérieuse ! Ne le faites pas ! Non ! S'il vous plaît ! Ne faites pas ça !

    Je regarde Yuri qui tient une cuillère dans une main et une coupe de glace dans l'autre en suppliant ses amies de l'épargner. On dirait que ses amies ne la laissent pas s'en tirer facilement. Haha. (Mais Yuri a peur de l'eau ? Je me souviens qu'elle était la première à se précipiter dans l'océan lorsque nous allions à la plage ensemble). Les filles semblent avoir des forces surhumaines en ce moment. (Elles ne faisaient certainement pas autant d'efforts lorsque nous plantions des herbes. Ha...) Elles réussissent à tirer Yuri jusqu'au bord de l'étang avant de donner une dernière forte poussée.

    Splash !

    — Vous êtes toutes tellement méchantes !

    Yuri est jetée dans l'eau, pas très loin de moi. Elle reste sous l'eau quelques instants avant de remonter à la surface et de se mettre à hurler à pleins poumons. Le groupe de filles qui l'a poussée (dont Jeed) glousse et applaudit joyeusement. Elles sautent et rejoignent Yuri dans l'eau.

    — Ce ne serait pas ton ex, Noh ? Ça te dérange si je l'invite à sortir ?

    Pete nage jusqu'à l'endroit où je suis et me taquine. Il peut s’il le veut. J'espère qu'elle dira oui. Ce serait bien de la voir sourire à nouveau.

    Nous jouons dans l'eau pendant un long moment avant que les membres du staff ne viennent nous chercher. Il est temps de nous nettoyer pour pouvoir dîner plus tard. Lentement, les campeurs quittent l'étang. J'essore l'eau de mon t-shirt mouillé et je remarque que Yuri est la dernière personne dans l'eau. 

    — Yuri, qu'est-ce qu'il y a ?

    Une fille, dont le nom est May si je me souviens bien, crie depuis le bord de l'étang puisque tout le monde est sorti de l'eau. Yuri secoue simplement la tête en retour.

    — Yuri, viens. On devrait partir avant que les sanitaires ne se remplissent.

    Pourtant, Yuri refuse toujours de partir.

    Je me retourne pour regarder en continuant à essorer mon t-shirt vert. Il est encore assez humide, donc il est vert foncé pour le moment. Cela m'aide à réaliser quelque chose. 

    — Hey, Noh. Tu es prêt à partir ? demande Tong alors qu'il met ses tongs pour pouvoir partir avec les autres et retourner au bâtiment de l'école. 

    (L'accent est mis sur l'école... et non sur un hôtel.) Je lève la main et demande une seconde avant d'enlever mes tongs et de replonger dans l'eau.

    Yuri semble être surprise quand elle voit que je nage vers elle. Je choisis de m'entêter à le faire, même si elle ne veut peut-être plus de l'aide de quelqu'un comme moi.

    Je m'arrête devant le visage familier avant de retirer mon t-shirt et de le lui mettre.

    — Ne te soucie pas de le rendre plus tard.

    Sa chemise blanche mouillée lui colle à la peau. Elle est assez fine pour qu'on puisse voir à travers et révèle le soutien-gorge noir qu'elle porte en dessous. Je comprends pourquoi elle ne veut pas sortir de l'eau et pourquoi elle ne voulait pas jouer dans l'eau en premier lieu.

    Yuri garde la tête baissée et ne croise pas mon regard. Je ne m'attendais pas à ce qu'elle me remercie en premier lieu. Je m'éloigne à la nage et retourne vers mes amis après avoir fini de lui enfiler mon t-shirt vert.

    — Bon sang, c'est une façon de frimer, Noh. T'as les couilles de te mettre torse nu avec ce gros bide, haha. Tu n’as pas trop froid quand même, mec ?

    Ohm me taquine mais il y a un soupçon d'inquiétude dans sa question. Il fait un peu froid, mais ça ira très bien. Je regarde mes amis se regarder les uns les autres comme s'ils planifiaient quelque chose en douce. Nant est le premier à enlever son t-shirt.

    — Puisque Noh se met torse nu, autant le rejoindre !

    Tous les autres commencent à enlever leur t-shirt et à le jeter par-dessus leur épaule. C'est un peu obscène, n'est-ce pas ? Haha. On pourrait effrayer les filles. Je leur donne une tape dans le dos pour leur montrer ma gratitude pour leur gentillesse d'endurer le froid avec moi. Nous partons les bras autour des épaules de l'autre.

    Mon cœur se sent plus gros et ça n'a probablement rien à voir avec le fait d'être gonflé par l'eau non plus, je pense.

     


    Notes

    1/ Le Vétiver est une herbe qui n’est pas évasive, elle est l’idéal pour la création des haies qui peuvent servir de barrages contre l’érosion, pour marquer les périmètres des champs et pour ‘fixer’ les sols. Le ‘système vétiver’ est utilisé mondialement par les cultivateurs pour lutter contre l’érosion, la sécheresse, protéger les sols et les enrichir afin d’augmenter leur production



  • Commentaires

    2
    Dimanche 18 Avril 2021 à 10:31

    merci pour ce nouveau merveilleux chapitre *__* 
    j'adore toujours autant Noh et Phun :)
    à la prochaine ;)

    1
    Vendredi 16 Avril 2021 à 09:12

    Coucou Néphély, 

    Un véritable régal que ce chapitre 62, traduit à la perfection !

    La "guerre froide" que se livrent Noh et Phun est drôle et mignonne à la fois.

    Je ne le dirai jamais assez mais j'adore Noh et son authenticité. Connaître ses pensées, ses doutes, son humour et ses sentiments amoureux est tout bonnement génial.

    Il y avait des moments très beaux dans cet épisode.

    Merci pour ce travail titanesque. Un vrai plaisir de lecture.

    Bon courage pour la suite. ^_^

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