• 38ème Chaos

    38ème Chaos
    Je souhaite

    — Phi Noh !

    Je tressaille de toutes mes forces quand j'entends Nong Pang, qui est en train de choisir des snacks, crier mon nom. Je ne me souviens plus depuis combien de temps nous ne nous sommes pas vus. Mais ce n'est vraiment pas le bon moment pour se croiser comme ça.

    — Yuri, je dois y aller, d'accord ? Bye.

    Je raccroche rapidement. Mes lèvres essaient de bouger pour dire quelque chose à Nong Pang. Elle se tient là avec un large sourire sur le visage. Mais avant que je ne puisse commencer une conversation amicale, la voix d'une tierce personne se fait entendre.

    — Pang ? Les sodas sont là-bas. Quel genre tu préfères ? Je ne sais pas lequel choisir.

    Je ne sais pas si je dois me sentir heureux ou pas quand je vois que Phun est maintenant devant moi.

    Nous nous dévisageons pendant un moment. Je remarque que ses yeux sont écarquillés car il est un peu surpris, mais ensuite il se force à me sourire. 

    — Oh...Noh.

    — Oh… salut. Qu'est-ce que vous faites ici ?

    Voilà une question vraiment stupide à poser. Ils sont dans un supermarché, donc ce n'est pas comme s'ils faisaient de l'agriculture ou autre chose. Je me maudis dans ma tête.

    Cependant, Nong Pang n'est pas du genre à être désagréable, je le sais. Elle me fait un grand sourire avant de se mettre à côté de moi. 

    — On achète des ingrédients pour faire des cookies. Phi Noh, tu devrais venir les goûter ! S'il te plaît ? S'il te plaît ?

    Apparemment, l'esprit de Yuri a pris possession de son corps et elle commence à me supplier.

    Je ne sais pas quoi lui dire. Je continue à regarder la jeune fille à côté de moi, puis je passe à Phun et je reviens vers elle. Je ne sais pas trop comment lui répondre.

    Au final, Phun écourte notre conversation. 

    — Pang, Phi Noh est probablement occupé. Ne le dérangeons pas.

    Il gronde sa sœur et me regarde avec un soupir. Je sais que Phun ne comprend pas encore la situation. Je sais aussi qu'il ne veut pas non plus que je vienne chez lui en ce moment. Mais si c'est le cas, comment allons-nous résoudre ce malentendu ?

    — Je suis libre. Je t'aiderai pour la dégustation, d'accord ?

    Je le devance et j'accepte l'invitation aussitôt. Nong Pang saute de joie mais je ne sais pas comment Phun réagi car je ne suis pas assez courageux pour lever les yeux et lui faire face.

    Je suis resté silencieux pendant tout le trajet en taxi. La voix vive de Nong Pang fait de temps en temps de petites conversations avec Phun et moi. Néanmoins, aucun de nous deux ne dit un mot. Une fois arrivé à la grande porte, Phun rentre rapidement dans la maison avec tous les sacs de courses et ne remarque pas ce que fait sa jeune sœur. Elle se retourne pour me regarder en me faisant un clin d'œil.

    — Vous vous êtes disputées, hein ?

    Je suppose que nous avons été si silencieux que c'est évident pour Nong Pang. Je lui fais un sourire sec. 

    — N-Non, on ne se dispute pas.

    — Mensonges ! Vous devriez parler tous les deux et je vais vous faire quelque chose de délicieux, dit-elle avant de s'enfuir dans la cuisine en me laissant là, confus.

    Peu après, Phun revient. 

    — Euh ? Où est Pang ?

    — Elle a dit qu'elle allait nous faire quelque chose de délicieux.

    — Je vois. Tu veux regarder la télé ? demande-t-il en me conduisant dans le salon. Quelqu'un d'autre regardait probablement l'énorme télévision puisqu'elle est déjà allumée et réglée sur HBO. Je regarde l'expression vide de Phun alors qu'il zappe les chaînes sans même me regarder. Je soupire, puis je commence à parler.

    — Phun…

    — Qu'est-ce qu'il y a... ?

    Cela peut sembler être une réponse normale, mais je sais qu'il se sent mal au fond de lui.

    — Je suis désolé... que tu l'aie découvert de cette façon.

    — 

    Seuls les sons de Cartoon Network rompent le silence entre nous deux. Je retiens presque mon souffle en attendant d'entendre sa réponse parce que j'ai l'impression d'avoir déjà dit ce que je voulais lui dire. Le reste dépend de lui maintenant.

    Son visage pointu a maintenant l'air un peu sombre. Les deux lèvres orange clair de Phun sont serrées l'une contre l'autre comme s'il réfléchissait à quelque chose. 

    — Tu... ne savais pas comment me le dire, n'est-ce pas... ? demande Phun doucement comme s'il était complètement épuisé.

    Je prends note de son attitude et ça me déchire de l'intérieur. Je voulais tout faire pour lui pour qu'il soit heureux, mais c'est moi qui suis responsable de son état actuel.

    Les yeux de Phun sont fermés. C'est comme s'il ne voulait plus rien savoir d'autre. 

    — Tu... ne m'as pas caché ça intentionnellement, n'est-ce pas... ?

    La façon dont il dit cela ressemble plus à un vœu qu'à une question. Je me rapproche de son corps figé. Il semble si fragile. Je place doucement ma main sur le dos de la sienne.

    — Phun... Je suis désolé. Honnêtement, je ne savais pas comment te le dire... parce que je ne voulais pas te voir comme ça…

    Je lui serre la main un peu plus fort. Je le regarde utiliser son autre main pour tenir sa tête tout en expirant faiblement.

    Je le sens dans sa main tremblante et dans ses yeux qui sont encore fermés. Malgré le fait que je ne puisse pas les voir, je comprends la bataille féroce qui se déroule en lui.

    — Quelqu'un d'autre à part toi est au courant ? murmure Phun et je secoue la tête même si je sais qu'il ne regarde même pas.

    — Je l'ai appris par Golf. Je n'en ai jamais parlé à quiconque.

    — Je ne veux pas que les gens la regardent mal.

    Malgré la souffrance qu'elle lui a infligé, Phun tient toujours à cette femme. Je me rends compte que c'est le genre de personne qu'est Phun. Une fois qu'il commence à s'occuper d'une personne, il s'en soucie toujours. Son visage se déforme un peu avant qu'il ne se force à parler. 

    — Et je ne veux pas non plus que tu sois triste de me voir comme ça… dit-il alors qu'il retire sa main de ma prise afin de pouvoir tenir la mienne à la place en continuant à parler de sa voix grave. … est-ce-que tu es en colère que je sois triste de ce qui se passe avec Aim ?

    Je me doutais qu'il penserait cela. Je savais que Phun aurait peur de ma peine en apprenant à quel point il tient à Aim. Il se trompe, car ce n'est pas le moment d'être jaloux ou de s'énerver pour quelque chose de futile. Au contraire, il me décevrait s'il ne ressentait rien du tout à propos de ce qui s'est passé.

    J'aime Phun parce qu'il est toujours sincère avec tout le monde et parce qu'il se soucie toujours du bien-être des autres. Si Phun était une personne égoïste qui n'apprécie que son propre bonheur, alors je ne voudrais pas avoir affaire à lui.

    J'utilise ma main libre pour serrer celle qui tient déjà la mienne. 

    — Écoute-moi, Phun...

    Il tourne son beau visage pour me regarder dans les yeux, et je continue à parler.

    — Depuis combien de temps êtes-vous ensemble ? Si tu devais faire face à quelque chose comme ça et ne rien ressentir, je me sentirais très mal. Je suis heureux d'avoir rencontré une bonne personne comme toi. Et je suis encore une fois désolé de ne pas t'en avoir parlé au départ et de t'avoir laissé tout découvrir comme ça par toi-même…

    Plus je parle, plus je me sens mal. Je me déteste tellement que je n'ai même pas le courage de regarder Phun dans les yeux. Je me rends à peine compte que Phun secoue la tête.

    — Je comprends... merci de t'inquiéter pour moi. Depuis combien de temps as-tu découvert ça ?

    — Depuis le... tournoi de football.

    — Il y a un certain temps alors... dit-il avec un petit rire mais je sais bien qu'il n'est pas d'humeur à plaisanter. 

    Je jette un coup d'œil à son visage tourmenté, plein de tristesse. Puis Phun me dit autre chose.

    — J'ai juste besoin de temps, Noh. Je te ferai savoir quand je serai prêt…

    Voir les larmes de Phun couler sur son visage me tue. 

     

    C'est lundi et je suis à l'école. J'ai rapidement laissé mon cartable à mon bureau, j'ai dit bonjour à Ohm et au reste des gars comme d'habitude, puis je me suis faufilé dehors pour passer un coup de fil.

    J'appelle Golf parce qu'il y a quelque chose d'important que je dois lui faire savoir. Si vous me demandez pourquoi je ne l'ai pas appelé depuis dimanche, c'est parce que le dimanche est un jour de famille pour Golf. Je sais, ça semble vraiment étrange, n'est-ce pas ? Mais c'est vrai. Il a l'air d'être une personne terrible, mais il est très attaché à sa famille. Si quelqu'un devait l'appeler et l'inviter quelque part un dimanche, il le maudirait. De plus, il prend rarement un appel le dimanche de toute façon. Tout le monde sait qu'on ne peut que lui envoyer des SMS le dimanche.

    Mais c'est important et cela ne peut pas se faire par SMS, alors j'ai attendu jusqu'au lundi pour le lui dire. 

     

    ♫ Donne moi quelque chose en quoi croire.

    Car je ne crois plus en toi, en toi

    Je me demande même si ça ferait une différence d'essayer

    Ouais, c'est donc un "au revoir”. ♫

     

    — Quoi de neuf, mon pooooote ? Où est-ce qu'on va boire ? Allons-y.

    La sonnerie de Golf est presque passée au nouveau couplet quand il répond à l'appel. Je voulais me plaindre du temps qu'il met à décrocher, mais je pense que j'ai une autre raison de lui crier dessus.

    — Très drôle. Tout le monde était là vendredi et tu étais où, bordel ? crié-je sur lui en me disant que s'il avait été là, les choses n'auraient pas aussi mal tourné.

    Il me répond sur un ton désagréable. 

    — J'étais trop occupé à baiser - je veux dire à traîner avec une nana. Je veux dire que j'étais trop occupé à baiser avec une fille. Ai-je manqué quelque chose de génial ?

    — Ouais... complètement génial, dis-je en expirant fort. 

    Golf capte ça.

    — Qu'est-ce qui s'est passé ?

    — Phun a découvert pour Aim.

    — Yooo ! Tu lui as dit ?! Tu aurais pu me dire que tu allais lui en parler !

    Naturellement, Golf fait beaucoup de bruit de l'autre côté de la ligne. Je n'ai pas le temps d'être agacé par ses propos car je suis trop préoccupé par ce que j'ai à faire en ce moment.

    — Je ne lui ai pas dit...

    — Alors comment il l'a découvert ?

    — Il a vu la vidéo sur mon téléphone... par accident...

    — 

    A ce stade, nous sommes tous les deux silencieux. Je peux dire ce qu'il a en tête.

    — C'était la pire des façons possible. Mais je ne dis pas que c'est de ta faute, tu ne voulais probablement pas que ça arrive.

    Ah non ? Tu es sûr ? Je regarde mon téléphone en me sentant un peu agacé avant de pousser un long soupir.

    — Bien sûr que non. J'étais mort de trouille quand il l'a découvert, mais on a déjà parlé. Il a dit qu'il avait besoin d'un peu de temps.

    Tout comme moi, Golf laisse échapper un gros soupir. 

    — D'accord. Fais-moi savoir quand il est prêt, je t'aiderai de toutes les façons possibles.

    — Merci, mec. Et merci au nom de Phun aussi.

    — C'est bon, c'est bon. On se connaît. Et si c'est ton ami, alors c'est mon ami aussi.

    Je suis profondément touché par sa réponse. Je me mets à sourire même s'il ne me voit pas. Je me sens très chanceux d'être entouré de tant de bons amis comme lui.

    — Je t'aime, mec.

     

    C'est l'heure du déjeuner et la cafétéria est bondée. En fait, je n'ai pas beaucoup de temps libre aujourd'hui car j'ai un tas de courses à faire. Je prends contact avec différents départements car j'ai besoin de leur aide pour organiser le concours qui aura lieu dans quelques jours.

    Je cours jusqu'à l'endroit où les boissons sont vendues, car je me suis dit que je n'aurais pas le temps de manger étant donné ma situation actuelle. J'ai encore une tonne de personnes à qui je dois parler. Nous organisons l'événement dans le gymnase cette année, donc les choses sont un peu mouvementées. La personne qui s'occupe du gymnase est (vraiment) mauvaise.

    — Ma tante, je vais... prendre une bouteille de Splash.

    Je vais juste faire semblant d'être Nichkhun(1) pour la journée. Je commande mon habituel et tragique repas pendant que je jette un coup d'œil à la cafétéria. La gentille dame essaie d'ouvrir la bouteille pour moi.

    Je repère une grande silhouette qui se promène pas très loin de là où je suis, bien que son beau visage n'ait pas le moindre soupçon de sourire. J'ouvre la bouche pour crier son nom, mais je pense à mieux que ça. (Ça me ferait mal à la gorge.)

    — Ma tante, je vais aussi prendre une brique d'Ovomaltine.

    J'ajoute autre chose à ma commande et je suis un fardeau pour la pauvre dame qui retourne lentement ouvrir le réfrigérateur.

    Je me propulse vers Nong Mick (le petit ami d'Ohm) une fois que j'ai reçu tout ce que j'avais commandé. Il est assis avec ses amis et déjeune à proximité.

    — Hé, Mick !

    — O-oui...Phi Noh ?

    Nong Mick est comme un garçon qui est constamment en état de panique. Je l'ai remarqué à plusieurs reprises maintenant. Chaque fois que quelqu'un crie son nom très fort, il sursaute violemment. Parfois, nous aimons bien l'embêter en faisant ça. (Film nous crie car Mick est son gamin préféré).

    — Je peux t'emprunter un stylo et un post-it ?

    — Bien sûr, répond-il en fouillant dans son sac, le matériel qu'il a sur lui. (Je suppose qu'il vient de changer de salle de classe.) 

    Je n'ai qu'à attendre un court instant avant qu'il me tende un stylo bleu et un Post-it rose fluo.

    Est-ce une bonne idée ? 

    — Tu n'as pas une couleur différente, Miiiick ?gémis-je. 

    Si Film était dans le coin, il m'aurait engueulé parce que Nong Mick est déjà gentil de faire ça, mais je suis grincheux. (Mince, je ne peux pas le toucher du tout, n'est-ce pas ?)

    Cependant, Nong Mick secoue rapidement la tête. 

    — Je n'en ai pas, Phi Noh. En fait, j'ai volé ça à ma grande sœur.

    C'est vrai, s'il les avait achetés lui-même, ça aurait été trop mignon (d'une manière bizarre) de sa part. En tout cas, la couleur n'a pas d'importance au final. J'accepte les Post-it et j'en arrache un. Ensuite, je griffonne rapidement quelque chose dessus.

    — Merci beaucoup, Mick ! Je vais faire en sorte que tu passes plus de temps seul avec Ohm ! Heh heh !

    Je n'attends pas d'entendre ses explications (ils le nient toujours tous les deux) et je me dépêche de sortir avant que ma cible ne disparaisse.

    Phun et un groupe de ses camarades de classe se promènent devant la cafétéria, non loin de l'endroit où je me trouve. Je suppose qu'ils ont déjà fini de manger et sont sur le point de se rendre dans leur classe. En réalisant cela, j'accélère le pas pour passer devant le secrétaire du conseil des étudiants tout en lui enfonçant la brique d'Ovomaltine dans les mains. (Une scène qui ressemble à un trafic de drogue).

     

     :) Où est ton sourire, mec ? :)

     

    C'est ce que j'ai écrit sur le post-it et que j'ai collé sur la brique d'Ovomaltine. Mais je ne me suis pas retourné pour voir si Phun avait souri juste comme le disait le post-it parce que je suis trop gêné. Je ne sais pas si ses amis m'ont vu ou non. Je me suis trop concentré pour retourner au bâtiment F et me diriger vers la salle du club.

    Bip bip.

    Mon téléphone me dit que j'ai reçu un SMS, alors j'y jette un coup d'œil. 

     

    Merci.

    Je souris maintenant. =]

    Expéditeur : Phun Cons. Etudiant.

     

    Son émoticône souriant me fait faire un large sourire, comme celui d'un malade mental.

    Je n'espère pas que Phun puisse se remettre rapidement de toutes les choses horribles qui sont arrivées.

    Je souhaite seulement que Phun puisse sourire... et être heureux avec les choses qui lui restent. C'est tout.

    — Je suis là pour toi.


    Notes
    1/ Acteur, chanteur, mannequin sino-thaï.


  • Commentaires

    2
    Dimanche 15 Août 2021 à 11:23

    Oh c'est triste mais maintenant il sait

    1
    Dimanche 20 Septembre 2020 à 11:47

    mille merci pour ce nouveau chapitre :)
    je l'ai adoré !

    bonne traduction pour la suite et encore merci de nous traduire ce roman :)
    bon dimanche

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