• Chapitre 16

    Chapitre 16
    Le Cadran Solaire de la Réincarnation

    Guo Changcheng entendit du bruit et regarda par-dessus son épaule pour trouver Li Qian debout.

    Ses mouvements étaient anormaux, comme une marionnette cassée contrôlée par un marionnettiste inexpérimenté. Mais comme elle souffrait probablement encore des effets des sédatifs, Guo Changcheng n’y prêta pas attention.

    Avec un grand soulagement, il dit : 

    — Oh, Dieu merci, vous allez bien.

    Li Qian resta silencieuse et le fixa d’un regard vide.

    Soudain, Guo Changcheng la trouva plutôt étrange. 

    — Li Qian ?

    Il s’avança pour la regarder de plus près, mais Shen Wei lui bloqua le passage.

    Li Qian sourit étrangement, sa bouche se recourbant en un croissant peu naturel. Elle émit un étrange gargouillis, ses épaules se tordirent maladroitement, comme si elles étaient rouillées, et son corps entier se balança.

    Au moment où Guo Changcheng se demanda si elle était paralysée, elle bondit en avant à la vitesse de l’éclair, ouvrit la bouche et attaqua l’épaule de Shen Wei. Dans la faible lumière du téléphone, sa bouche béante révéla des dents comme les crocs d’un monstre, et ses yeux étaient presque exorbités.

    Shen Wei recula et esquiva sur le côté, se heurtant à Guo Changcheng. Ce dernier, lent à réagir, agit par instinct et remplit involontairement sa promesse de “protéger” l’autre : ses bras s’agitèrent sur Li Qian comme ceux d’une pieuvre frénétique… ses attaques maladroites consistaient à griffer et à tirer les cheveux, et il semblait sur le point de se jeter sur elle pour la mordre. Au cours de ce combat hargneux, il la frappa au visage par hasard et la piétina deux fois dans sa panique.

    Bien que ses actions soient presque héroïques, il continuait à crier de manière pathétique, comme d’habitude : 

    — Ne venez pas ici ! Ne venez pas ici ! Au secours ! N’approchez pas !

    La situation ne pouvait pas être plus chaotique : pris au milieu, Shen Wei repoussa Guo Changcheng d’une main et tordit le bras de Li Qian de l’autre.

    Li Qian s’agita et se tortilla comme un crabe dans une marmite, griffant et mordant violemment. Shen Wei lâcha Guo Changcheng pour saisir le cou de la jeune femme par derrière, la pousser contre le mur et lui coincer les mains qui s’agitaient.

    La petite salle de stockage était en effervescence : une fille sifflante, un enfant fantôme serrant la jambe d’un policier en pleurs, un chat jurant et des griffes horribles grattant la porte de l’extérieur.

    Bien que Shen Wei soit plus calme qu’aucun humain ne pourrait jamais l’être, il se demanda à ce moment-là s’il n’était pas en train de faire un rêve schizophrénique.

    — Qui peut m’aider à l’attacher ? demanda Shen Wei, mais entre tous les pleurs et les jurons, personne ne lui prêta attention. Forcé de changer de tactique, il éleva la voix. Arrêtez de pleurer, jeune officier Guo, cette petite ne va pas vous mordre. Je peux te demander de venir m’aider un peu ?

    Comme pour défier ses paroles, l’enfant fantôme ouvrit sa bouche presque édentée et commença à grignoter la jambe de Guo Changcheng.

    Guo Changcheng hurla comme un dauphin, mais le chat lui donna un coup de patte en travers de la tête pour le faire taire. 

    — Regarde bien, espèce d’idiot !

    Guo Changcheng avait l’impression qu’il était sur le point de s’évanouir de douleur, mais il réussit à ouvrir un peu les yeux et à regarder vers le bas. Les dents et les mains de la petite fille fantôme traversaient directement son corps - elle ne pouvait même pas le toucher !

    Il cligna des yeux de stupéfaction et la douleur brûlante disparut instantanément. Il était clair que sa puissante imagination l’avait tout simplement inventé.

    Li Qian se débattait avec de plus en plus de force, et Shen Wei, coincé avec deux compagnons inutiles, se mit à transpirer. 

    — Officier Guo !!!

    Guo Changcheng se précipita en enlevant sa ceinture. Il fut obligé de serrer ses jambes l’une contre l’autre pour empêcher son pantalon de tomber. Il avait l’air d’essayer de ne pas se faire dessus, mais il aida Shen Wei à attacher la fille.

    Soudain, l’esprit de la vieille dame ressurgit. Elle semblait avoir perdu beaucoup de force et, alors qu’elle essayait anxieusement de toucher Li Qian, sa main ne faisait que traverser le corps de la fille. Plus elle essayait, plus elle s’affaiblissait.

    Guo Changcheng tendit la main pour l’arrêter. 

    — Hé, vieille dame…

    Sans surprise, sa main la traversa.

    Elle se retourna et le regarda. Son visage était profondément marqué, avec de larges poches sous les yeux. Ses cheveux blancs clairsemés étaient retenus par un chignon en perruque, révélant un cuir chevelu laid et ratatiné. Son front se plissa autour de ses yeux ternes au point qu’ils s’enfoncèrent dans de petits triangles.

    Elle semblait désireuse de dire quelque chose mais lorsqu’elle ouvrait la bouche, aucun son n’en sortait. Lorsqu’elle continua à tendre la main en vain, sans pouvoir toucher quoi que ce soit, son empressement se transforma finalement en désespoir.

    Impuissante, elle fixait Li Qian, des larmes silencieuses coulant sur son visage. Elles étaient aussi ternes que ses yeux, comme de l’eau de pluie baignant dans la boue.

    Guo Changcheng resta là, bêtement, regardant le professeur Shen et Da Qing pour obtenir de l’aide ; il désigna Li Qian et dit : 

    — Qu’est-ce que… qu’est-ce qui se passe avec elle ?

    Shen Wei baissa la tête, incertain, mais Da Qing soupira. 

    — Quelque chose de maléfique est en elle ; mais il doit y avoir une raison. Si tu pouvais aller bien alors qu’elle est possédée, il doit y avoir quelque chose qui cloche chez elle.

    Guo Changcheng ne pouvait pas dire si c’était un compliment ou une insulte. Mais il n’eut pas le temps de se poser la question, car soudain - avec un bruit strident - un trou fut percé dans la petite porte en fer. Une griffe géante en forme de faux, comme celle d’une mante religieuse, entra violemment à travers la porte.

    Shen Wei l’esquiva avec agilité et poussa Li Qian sur le côté. La griffe du fantôme affamé lui frôla le cuir chevelu. 

    Le fantôme affamé, bien plus gros qu’avant, ouvrit la porte entièrement et bondit vers les vivants. La grand-mère fantôme se trouvait encore sur son chemin, et il lui traversa le corps. Son expression horrifiée semblait demeurer, même si son corps disparu complètement.

    Da Qing cria : 

    — Esquivez !!!

    Guo Changcheng se coucha instinctivement sur le sol. Da Qing sauta sur un point élevé, et son corps commença à se gonfler pour atteindre presque deux fois sa taille ; ses yeux devinrent dorés. Il donnait l’impression d’être une petite panthère grondante aux dents acérées comme des rasoirs.

    Mais il ne faisait pas un bruit ordinaire : il émettait des ondes supersoniques, une énergie invisible qui se dirigea vers le fantôme affamé qui sévissait dans la salle de stockage.

    Guo Changcheng ne pouvait pas l’entendre, mais il pouvait ressentir la puissance pure ; elle passait devant son visage comme des couteaux, et il avait presque l’impression que son nez était coupé.

    La seconde suivante, le fantôme affamé s’écrasa contre le mur ; dans la faible lumière, Shen Wei pensa même pouvoir voir une fissure se former.

    Le fantôme maléfique était cloué au mur comme une décoration. Da Qing retrouva sa taille normale et trébucha en avant, tombant de l’étagère comme un chat zombie. Shen Wei le rattrapa juste à temps. Da Qing jeta un faible regard à Shen Wei avant de s’évanouir dans ses bras.

    Pendant un instant, Guo Changcheng redoutait qu’il ne soit mort, mais lorsque Shen Wei caressa sa fourrure et que la poitrine de Da Qing se souleva et retomba régulièrement sous sa paume, il réalisa que Da Qing ne s’était évanoui que de fatigue.

    — Que fait-on ? demanda Guo Changcheng en se levant du sol.

    Avant que quiconque ne puisse dire quoi que ce soit, un grondement retentit dans la pièce.

    Guo Changcheng retomba sur ses fesses.

    Surpris, ils se retournèrent pour regarder le mur. Le fantôme affamé qui était aplati contre le mur comme une crêpe un instant plus tôt commença à grossir de nouveau. Des hordes d’ombres noires arrivaient du couloir ; le fantôme affamé les absorbait toutes et son gigantesque estomac continuait à gonfler comme un ballon. Il se détacha du mur et atterrit sur le sol sur ses jambes maigres, en se balançant. Sa bouche s’ouvrant presque à 180 degrés, sa tête ressemblait à une pastèque coupée en deux. Un vent terrible soufflait dans la salle de stockage.

    Guo Changcheng se sentit glisser vers l’avant de façon incontrôlable ; il était choqué de voir qu’il s’éloignait de Shen Wei et se rapprochait du fantôme de seconde en seconde. 

    — Je suis aspiré !!! hurla Guo Changcheng, et malgré sa panique, il trouva en quelque sorte une métaphore. Je suis aspiré comme de la gelée dans un aspirateur ! Je suis dévoré vivant !!!

    Il se débattait dans tous les sens pour trouver quelque chose à quoi s’accrocher.

    — Je… Je suis un officier de police ! Je suis dévoré vivant !!! Je suis un officier de police !

    Il avait complètement oublié qu’il avait initialement utilisé cette phrase pour se motiver. Mais son cerveau devait de toute façon mal fonctionner ; il n’y avait aucune relation logique entre le fait d’être policier et celui d’être mangé vivant.

    Même le fantôme affamé sembla trouver sa nourriture trop bruyante ; il ouvrit à nouveau sa bouche et rugit. Guo Changcheng se sentit étranglé par une main invisible et n’émit plus aucun son. Il s’efforçait de secouer la tête, ses mains se frottant contre son propre cou, dont les veines ressortaient déjà. Sa gorge émit un son horrible, comme un vieux soufflet qui fuit.

    Shen Wei lui attrapa la main et tenta de le tirer en arrière ; Guo Changcheng avait l’impression d’être déchiré en deux.

    Da Qing était toujours inconscient, Li Qian se débattait sur le sol, les yeux ternes, et le fantôme géant affamé approchait lentement avec toute une horde de petits esprits.

    La situation ne pouvait pas être pire.

    Mais parfois, quand la nuit était la plus sombre, les étoiles apparaissait.

    À ce moment-là, un sifflement aigu surgit de nulle part, perçant les tympans de tous.

    L’enfant fantôme, terrifié, poussa un cri silencieux et s’échappa par le plancher.

    Une dague noire s’abattit entre Guo Changcheng et le fantôme affamé, comme si elle coupait une corde invisible, et le fantôme se fracassa contre le mur. Guo Changcheng tomba en arrière sur le Professeur Shen, et les deux trébuchèrent…

    Guo Changcheng tomba à plat sur le sol, mais Shen Wei fut rattrapé par quelqu’un.

    Zhao Yunlan passa ses bras autour de la taille de Shen Wei et s’écarta, les angles de son visage étant mis en évidence par la lueur du briquet : beau, froid et aux contours nets comme une statue bien faite. Ses yeux brillaient dans l’obscurité pure comme deux flammes.

    Le chef Zhao joua le rôle du sauveur de manière experte. Il baissa la voix comme un loup indompté et regarda le professeur droit dans les yeux comme un héros sauvant une demoiselle en détresse. 

    — Professeur Shen, vous allez bien ?

    Personne ne se rappelait du pauvre stagiaire gémissant sur le sol.



  • Commentaires

    2
    Vendredi 17 Mars 2023 à 17:17

    Coucou Néphély,

    Merci pour ce nouveau chapitre et ce cliffhanger ^^. Zhao arrive à pique pour sauver le professeur pendant que Guo s'étale dans toute sa splendeur ! Je ris à chaque nouveau chapitre et j'attends patiemment les rencontres entre Zhao et Shen Wei oops

    1
    Mercredi 15 Mars 2023 à 19:59

    Zhao Yunla et sauveur dans la même phrase ^^

    C'est le petit Shen Wei qui doit être content ;0)

    Merci pour la traduction de ce 16ème chapitre

     

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