• Chapitre 3 - Dealing With Adversity

    Chapitre 3

    Le week-end qu’il a passé chez moi trois mois plus tôt a complètement solidifié notre relation. On a passé beaucoup de temps à discuter de ce que l’on voulait, de ce que l’on attendait de notre histoire et au final, on a fini par faire l’amour pour la première fois. C’était doux, tendre et tellement intense que j’ai eu l’impression de découvrir réellement ce que faire l’amour voulait dire.

    Le temps est vite passé et même si l’on doit encore se cacher, même si je voudrais l'annoncer au monde entier, j’accepte sa décision et je me contente des instants volés au lycée et des étreintes à l’abri des regards. 

    Quand la sonnerie retentit, je bondis hors de ma classe. Je n’attends absolument personne et personne ne me retient. En fait, je n’ai pas vraiment d’ami, le seul qui compte c’est Frank. D’un pas pressé je pars en direction de sa classe parmi les autres élèves. 

    — Frank, attends-moi 

    Je le hèle à travers le couloir bondé avant de courir le rejoindre quand j'aperçois sa silhouette qui s’éloigne en direction des toilettes. Plusieurs têtes se retournent sur mon passage, mais les autres élèves reprennent vite leurs activités en m'ignorant. 

    Après m’être battu quelques fois avec certains d’entre eux, ils ont appris à se méfier et à nous laisser tranquille. De toute façon, c’est à peine si je les vois, je suis totalement focalisé sur le jeune homme qui s'est arrêté un peu plus loin et qui m'attend avec un petit sourire au coin de ses douces lèvres.

    J'arrive à sa hauteur et je passe mon bras autour de son cou avec un grand sourire pour le rapprocher ostensiblement de moi. Il se fige légèrement, mais son sourire s’agrandit. Mais il finit par me donner un coup d'épaule pour que je le lâche et j'obéis en soupirant un peu. 

    — Qu'est-ce qui se passe Drake ? 

    Il me lance un petit regard innocent, alors que son sourire ne l’est pas du tout. C'est encore pire quand il se mordille la lèvre inférieure et je sens mon bas ventre se contracter de désir pour lui.

    — Viens... 

    Ma voix est légèrement plus rauque alors que je l'attrape par le poignet et l'entraîne rapidement à travers le lycée. Je suis fixé sur un objectif et Frank se laisse entrainer, ce genre de scène nous est maintenant familière de toute façon. J’ouvre la porte du couloir d’une manière un peu trop vigoureuse la faisant claquer contre le mur. Je n’y prête pas attention parce que je suis déjà en train de monter les marches rapidement. 

    J'ouvre une dernière porte et enfin on arrive sur le toit qui comme toujours est désert. L'endroit est facile d'accès et devrait grouiller d'étudiants, mais heureusement notre lieu de rendez-vous n’est pas populaire et ça me convient très bien.

    Je ne regarde pas le paysage qui est pourtant beau. Non, si on est ici c'est pour une seule chose, profiter d'un moment en tête à tête entre amoureux. Quand je me retourne pour lui faire face, il se dépêche de rejoindre l’étreinte de mes bras et de coller sa bouche contre la mienne. Il entoure mon cou de ses bras et m'attire contre lui.

    Enfin, après quatre heures interminables à essayer de me concentrer sur ce que racontaient mes professeurs, je peux le toucher et l'embrasser. Les heures de cours sont une véritable torture et j'aimerais que l'on n’ait pas à se cacher des autres. Je quitte ses lèvres et m’occupe de picorer la peau de son cou, l’aspirant légèrement entre mes dents dans l’idée de laisser une marque. Seulement, il chuchote en laissant échapper un soupir avant que je ne puisse faire quoi que ce soit.

    — Drake... si tu fais ce genre de choses, les autres vont se douter de quelque chose.

    Je grimace légèrement en relâchant sa peau avant de respirer profondément son parfum, il m’est devenu tellement familier maintenant que j’ai du mal à m’en passer. Juste le tenir comme ça dans mes bras me permet de recharger mes batteries pour pouvoir faire face aux prochaines heures de cours. Au bout d’un moment, je quitte mon abri pour lui répondre. 

    — Je voudrais pouvoir te laisser une marque. 

    Je parle en observant la peau laiteuse de son cou, laissant mon index glisser dessus. 

    — Frank, ce serait vraiment si mal si les gens savaient ?

    C’est à mon tour de murmurer, mais il m’entend parfaitement. Aussitôt, son corps se tend et je me mordille la lèvre. Sa réaction est moins violente qu’avant, mais je sais que j’aurais mieux fait de me taire quand doucement, il quitte mes bras pour reculer de plusieurs pas.

    — Tu sais très bien ce qui se passerait si les gens venaient à savoir, surtout ici... je... c'est impossible.

    Il est déjà en train de paniquer, ses yeux essayant de regarder partout à la fois pour s’assurer que personne ne peut nous voir. Mon cœur se serre et une fois encore, j’aimerais battre ceux qui lui ont fait tellement de mal et qui continue de lui en faire. Je sais qu’il est déjà en train de s’imaginer tous les pires scénarios possibles qui pourraient nous arriver si jamais notre histoire venait à se savoir au lycée.

    Je sais aussi, car il a fini par me raconter en détail, que tous ses scénarios, son ancien meilleur ami les a vécus pendant de long mois. J’attrape ses mains que je sens trembler contre les miennes et je lui fais un petit sourire pour tenter de le calmer. Je sais que dans un autre contexte, Frank n’aurait aucun mal à dire aux gens que l’on s’aime tous les deux. 

    Je l'attire contre moi, entourant de mes bras son corps qui tremble autant que ses mains. La colère s’attise de nouveau dans mes veines quand il s’accroche à moi et que je peux entendre un petit sanglot. Ma main se glisse dans ses cheveux pour le réconforter et j’attends que la crise que j’ai encore une fois déclenchée se calme. Je murmure à son oreille avec tendresse.

    — Je suis désolé mon ange. Ce que l’on vit toi et moi me convient parfaitement, d’accord ?

    Il hoche la tête et le silence retombe, je lui laisse le temps dont il a besoin pour retrouver son calme. Je pose mon menton sur sa tête, je lui caresse le dos sans m’arrêter. Le silence retombe, juste interrompu par de petit reniflement qui s’estompe avec le temps.

    Je suis toujours étonné par la manière dont je me comporte avec lui. Je suis patient, calme, tendre et attentionné. Cela ne me ressemble pas vraiment, habituellement, je suis plutôt du genre à foncer dans le tas sans poser de question. Pourtant, ça me semble tellement naturel de prendre soin de lui, je le fais passer avant moi sans même y penser. 

    Au départ, même si j’ai beaucoup apprécié sa présence et ses discussions, je n’aurais pas parié sur le fait que l’on deviendrait des amis proches tous les deux. Et si on m’avait annoncé le jour de notre rencontre qu’il deviendrait mon premier amour, mon seul amour, j’aurais sûrement bien ri à cette idée.

    Sa présence à mes côtés m'a ouvert les yeux, je sais que même si je le pensais, je n’étais pas quelqu’un de bien avant. J’étais un coureur de jupon qui ne prenait rien au sérieux, que ce soit les relations amoureuses, l’école ou même mon avenir. Je couchais avec de nombreuses filles pour mieux les quitter après en m’imaginant tout savoir de l’amour et du sexe, mais je me trompais lourdement. 

    Aujourd’hui, Frank est devenu le centre de mon monde, je sais que jamais je ne pourrais me lasser de sa présence, de ses discussions et de son corps. Là où je me lassais dès le premier baiser échangé, avec lui, ma passion et mon envie se renforce au fur et à mesure que le temps passe. 

    Je soupire doucement en sentant mon coeur se serrer un peu. J’aurais aimé ne pas vivre toutes ces aventures, ne pas rencontrer toutes ces filles, pour pouvoir vivre toutes mes premières fois avec Frank. Avec lui, faire l’amour, aimer, chérir, toutes ces choses prennent du sens, tout devient plus intense et si c’est possible, je pense que plus le temps passe, plus je l’aime. 

    — A quoi est-ce que tu penses ? 

    Il parle doucement, un peu gêné par sa réaction. Il est calme, son visage s’est détendu et il réussit même à faire un sourire un peu timide. Il redresse la tête pour m’observer alors que moi, je suis immobile et silencieux depuis un petit moment. Je soupire longuement avant de me pencher pour lui voler un baiser, pour oublier ces pensées qui me mettent mal à l’aise. 

    — Je pensais à moi avant de te rencontrer.

    Je lui réponds dans un souffle. Aussitôt son regard se fait plus sombre et il baisse la tête pour me cacher ce qu’il ressent. Avant d’être mon petit ami, il a été mon ami et à ce moment-là, je lui ai parlé sans détour de mes nombreuses conquêtes et de comment je collectionnais les femmes comme on collectionne les timbres. Il m’écoute encore quand parfois j’en parle, mais il n’aime pas, car il a peur que je me rende compte que j’étais plus heureux dans les bras d’une femme que dans les siens.

    Il n’a pourtant, absolument rien à craindre, je n’ai pas regardé une femme depuis que l’on s’est embrassé pour la première fois. Les formes voluptueuses ne me font plus rien, alors que celles anguleuses de son corps me rendent complètement dingue. Je suis décidé à le rassurer jour après jour, à lui faire comprendre que homme ou femme, personne d’autre ne compte à part lui. 

    — Je pensais à combien j'étais misérable avant toi et que je suis le plus heureux des hommes depuis que tu m’as rendu mon baiser.

    Je lui fais cette déclaration surprise qui le fait furieusement rougir. Il baisse la tête pour ne pas me montrer sa réaction en posant son front contre mon torse et je le trouve adorable. Le silence retombe entre nous, mais il n’est pas gênant, c’est juste agréable d’être l’un près de l’autre et il n’y a pas besoin de long discours. 

    — Est-ce que tu veux venir chez moi ce soir ? Mes parents sont en voyage... 

    Sa voix est timide mais déterminée et je sens une poussée de désir parcourir mon corps. Je ne suis encore jamais allé chez lui, alors je suis vraiment heureux de sa proposition. Je suis curieux de découvrir son chez lui, d’avoir un aperçu de son univers. Je serais incapable de le refuser et je pense qu’il le sait bien. Je caresse ses joues rouges avant de me pencher pour lui susurrer à l’oreille. 

     — Tu sais que je ne peux rien te refuser. 

    Il frémit quand mon souffle chaud percute sa peau et savoir que pour lui aussi les cours vont lui sembler horriblement longs avant que l’on se retrouve me rassure. Nos lèvres se retrouvent et on s’embrasse à en perdre haleine pendant un long moment avant de reculer lentement. 

    — Je crois qu’il va falloir qu’on aille se rafraîchir avant d’aller manger. 

    Je pouffe de rire en l’observant tenter de reprendre son souffle. Frank a les lèvres rouges et humides, ses joues sont colorées et son uniforme est complètement froissé. Je me demande quand même comment les autres étudiants font pour ne pas se douter de quelque chose. C’est quand même régulièrement que l’on se retrouve dans cet état quand on quitte le toit pour retourner en classe.

    Il éclate de rire avant d’essayer de remettre de l’ordre dans ses habits. Il pose ses mains sur ses joues pour se les rafraîchir comme si cela pouvait atténuer les rougeurs présentes dessus et il me lance un regard brûlant. 

    — Dépêchons nous avant que l’idée de sécher les cours ne devienne trop séduisante. 

    Il me prend la main en parlant pour nous guider vers la sortie. Je le laisse m'entraîner dans les escaliers, la bouche entrouverte alors que je mets un moment à comprendre le message. Il prend tellement ses études aux sérieux, que je ne l’aurais jamais imaginé prononcer ses mots. 

    — Et pourquoi on pourrait pas ?

    Je le questionne en retrouvant soudainement ma voix. Il descend tranquillement les escaliers avec moi à la suite. Mon sourire s’agrandit, alors que l’idée me plait de plus en plus. Je secoue sa main pour attirer son attention et je peux voir un petit sourire naître au coin de sa bouche. 

    — Tu étais sérieux ? On pourrait partir… c’est qu’une après-midi de toute façon.

    J’insiste alors que son silence s’éternise. Cependant, il m’ignore, continuant à nous ramener vers les couloirs du lycée. Son sourire s’agrandit et je sais qu’à l’instant même, il est fier de lui. 

    — Bébé…

    Et voilà que je le supplie d’une petite voix, espérant une réponse, mais ça ne marche absolument pas. En arrivant en bas des escaliers, il se retourne pour me faire face. Il tire sur ma main pour que je me rapproche de lui. Je prends une grande inspiration pour le supplier une nouvelle fois, mais il me coupe la parole en m’embrassant tendrement.

    — Soit un bon garçon studieux et je te promets que tu auras une belle récompense ce soir. 

    Il murmure contre mes lèvres et je m’enflamme complètement. Je dois me battre un instant contre mon instinct et mon envie de le jeter sur mon épaule. Je veux remonter sur ce toit et lui montrer combien je peux être un étudiant studieux. Je respire difficilement en essayant de calmer mes hormones et moi. Je sais très bien que jamais il ne me laisserait faire, jamais il ne voudrait faire l’amour sur ce fichu toit, alors ça ne sert à rien de s’emballer. 

    — J’espère pour toi que tu es prêt, car je veux une très grosse récompense.

    J’arrive finalement à parler d’une voix rauque. Je prends une dernière inspiration profonde avant de capturer rapidement ses lèvres. On se lâche la main en s’éloignant un petit peu pour tenter de ne pas paraître suspect. On passe la porte, on redevient de simple camarade de classe. Heureusement, les couloirs sont vides à cette heure-ci.

     

    Comme je l'avais prédit, l'après-midi est passée à la vitesse d'un escargot. J'ai eu l'impression que chaque minute valait une heure. Alors même si je dois encore attendre un peu Frank à l'extérieur du lycée, quand enfin la sonnerie annonce la fin de la journée. Je ressens un grand soulagement de pouvoir aller me poser contre mon muret en écoutant de la musique.

    Avec les semaines passées, j’ai pris l’habitude de l’attendre, alors, je suis surpris quand, à peine vingt minutes après, il se plante devant moi avec un grand sourire. 

    — Qu'est-ce que tu fais déjà là ?

    Je m'exclame peut-être un peu trop fort car je le vois se renfrogner. Il n’est pas satisfait de ma réponse et boude pour me le montrer. Le problème, c’est que moi je l'aime encore plus quand il plisse son nez de cette manière.

    — Je peux aussi dire qu'en fait je n'annule pas ma séance de tutorat, si tu ne veux pas que l'on passe plus de temps ensemble. 

    Même sa voix boudeuse me plait énormément et un sourire béat apparait sur mes lèvres. Il fait mine de repartir vers l'école les bras croisés devant sa poitrine. J'ai juste le temps d'attraper son bras en éclatant de rire avant de le rapprocher de moi. J’aimerais le prendre dans mes bras, le serrer le plus fort possible contre moi, mais c’est impossible. Je me contente de prendre sa main, d’y faire une pression avant de la lâcher et lui parler avec douceur pour l’apaiser.

    — Ne boude pas, j'ai juste été surpris de te voir si vite. 

    — Je boude pas… J'étais juste pressé de passer du temps avec toi.

    Sa réponse fuse sans attendre et je dois me retenir de rire alors qu’il gonfle ses joues. Il avoue cette dernière chose en rougissant et mon cœur tressaute dans ma poitrine. Si ce n’était pas déjà fait, je pense qu’il me ferait tomber amoureux sans problème à cet instant. 

    — Alors dépêchons nous de passer chercher mes affaires et d'aller chez toi. J'ai hâte aussi. 

    J’abandonne l’idée de le taquiner car même si ses réactions me plaisent beaucoup, je suis pressé de pouvoir profiter des bras de mon petit ami. Son visage se détend et il m'offre même son petit sourire en coin. C'est sans un mot de plus que l'on se met en route et pendant le temps du trajet on parle de notre après midi, de nos cours et de tout et de rien à la fois. L’ambiance est calme, détendue et on est juste heureux d’être ensemble.

    — On commande des pizzas ce soir ?

    Je le questionne alors que l’on arrive pas loin de chez moi. Le sujet de notre soirée en amoureux est naturellement venu sur le tapis. Et le sujet de la nourriture est d’autant plus important que l’on aime beaucoup manger lui et moi. Seulement, aucun de nous n'est pas très bon cuisinier alors je m'en voudrais de brûler la cuisine de Frank pour tenter de lui faire un dîner qui, de toute façon, sera immangeable.

    — Hmmmm oui, c'est une bonne idée… 

    Il me répond un peu rêveusement. Je sais déjà quelle pizza il va commander et je grimace d'avance. Parfois, je n’arrive pas à comprendre les goûts de cet homme et des étranges garnitures qu’il peut associer ensemble. 

    J’ouvre la bouche pour répondre, je ne sais pas pourquoi, j’ai envie de le taquiner ce soir. Cependant, les mots meurent dans ma bouche quand je relève la tête vers ma maison et que je vois la personne qui se trouve devant. 

    Je m'arrête brusquement de marcher à trois mètres d’elle car j'ai du mal à comprendre ce que je vois. Frank fait deux pas de plus avant de se tourner vers moi sans comprendre. Il m’observe et fronce les sourcils car mon expression doit montrer un mélange de surprise, d’inquiétude et d’anxiété. 

    Il tourne la tête pour voir ce que je fixe aussi intensément et je voudrais l’en empêcher, je voudrais lui interdire de regarder. Seulement, je ne peux rien faire et j’ai l’impression d’être à bord d’une voiture qui fonce à vive allure droit dans un mur.

    Il fronce les sourcils quand son regard tombe sur la jeune femme qui nous regarde également d’un air gênée. Elle a un geste instinctif que de protéger son ventre proéminent en rougissant. 

    — Tout va bien Drake ?

    La main de Frank se pose sur mon avant bras, il me regarde l'air inquiet, mais je ne peux pas lui répondre, je suis muet. Je ne la regarde pas, comme si ça pouvait la faire disparaître. Je veux juste entraîner Frank loin de cette scène qui, je le sais, va nous faire atrocement souffrir.

    — Drake… je peux te parler ? 

    Une voix douce s’élève et je n’ai d’autre choix que de quitter l’homme que j’aime du regard pour m’intéresser à Ai'Aim. Mes yeux se posent sur mon ancienne petite amie, malheureusement, malgré mon souhait, son ventre n’a pas disparu. Au vue de sa taille, je dirais qu’elle est enceinte d’environ huit mois et que cela coïncide avec la dernière fois que l’on a couché ensemble.

    Encore une fois, je suis incapable de parler, je tourne la tête vers Frank qui semble comprendre petit à petit sans que personne n’ait besoin qu’on lui explique. Son regard passe de la jeune femme, à son ventre et ensuite à moi. Son visage s'assombrit, sa main se retire lentement de sur mon bras et je voudrais le retenir, mais je ne peux rien faire.

    — Je t'attends à l'intérieur.

    La voix de mon petit ami est vide et triste comme s’il était déjà résigné. Il n'a pas salué la jeune femme qui de toute façon ne le regarde même pas. Elle est focalisée sur moi comme si on était seul au monde. Je suis tiraillé sur ce que je dois faire et j’hésite une seconde sur ce que je devrais faire. 

    Une seconde de trop puisque Frank se dirige déjà vers ma porte d'entrée, tête basse. Il disparaît rapidement dans la maison et la porte qui claque me donne une drôle de sensation. Je ne vois pas Aim qui s’approche de moi pour me prendre la main. A peine je sens sa peau contre la mienne que je la recule, je ne veux surtout pas que Frank se fasse des idées, s’il venait à regarder par la fenêtre.

    — Drake, je... je suis désolée de débarquer comme ça. Je pensais pouvoir faire face toute seule, mais mes parents menacent de me mettre dehors si je ne leur donne pas le nom du père. 

    Elle débite un flot de paroles rapides et je n’arrive pas à comprendre. Je pose une main sur ma hanche. Je me pince l'arrête du nez de l'autre et j'essaie de réfléchir. La seule information que mon esprit semble bien vouloir enregistrer, c’est que l’enfant qu’elle porte est le mien. Dans quelques semaines, je vais être papa et… je ne sais absolument pas comment gérer ça.

    — Aim... c'est impossible, on s'était protégé, je... je ne peux pas être le père. 

    Je m'accroche à cette idée, à ce préservatif qui pour moi change toute la donne. C’est vrai j’ai couché avec beaucoup de femmes, mais je me suis toujours protégé, justement pour pouvoir éviter ce genre de situation. Je passe nerveusement ma main sur ma bouche et je sens que ma gorge se serre, je ne suis pas loin de paniquer. 

    Je ne peux pas devenir papa maintenant, je ne peux pas élever un enfant que je n’aurais pas désiré, surtout alors que j'en suis encore un. Et le point important, il est hors de question que je me marie avec Aim, j'aime Frank, jamais je ne pourrais le quitter, c’est lui mon avenir maintenant.

    — Les accidents arrivent et... c'est arrivé.

    Elle baisse les yeux en me répondant d’une petite voix penaude. Je soupire avant de passer mes deux mains dans les cheveux, je les attrape et tire dessus comme si ça allait soudain m’apporter la solution. Je suis en train de vivre un véritable cauchemar et pourtant, au fond, je sais que c’est le retour de bâton pour mon passé, je ne peux que m’en prendre à moi-même.

    — Et tu veux… le garder ? L’élever ?

    Je la questionne d’une voix tremblante et hésitante. Je dois paraître sans cœur à cet instant, mais je trouve dingue qu’elle veuille l’élever, alors qu’on a que dix-sept ans. On est encore au lycée, on a pas de travail, pas de maison, rien. Si elle veut vraiment s’en occuper, on pourra difficilement le faire par nous même.

    — Quand j’ai découvert que j’étais enceinte… c’était déjà trop tard pour avorter. 

    Elle me répond d’une voix aussi tremblante que la mienne. J’ai envie de me donner des baffes car je me montre vraiment indélicat avec elle, mais je n’arrive pas à faire mieux. Je prends une profonde inspiration avant de faire un petit geste de la main pour l’inviter à continuer ses explications. 

    — Au début, j'envisageais de le donner à l’adoption. Je te le promets Drake, je ne voulais pas le garder. Et puis… 

    Sa voix se casse, ses yeux se remplissent d’eau et je me retrouve démuni incapable de savoir quoi faire. Je n’ai jamais été très doué pour réconforter les gens et là avec le choc, je ne comprend absolument pas ce qui est en train de se passer.

    — Il s’est mis à bouger. C’est une partie de moi, de nous et je ne peux pas juste l’abandonner comme si c’était un animal. Tu me comprends ?

    Elle me le demande avec de l’espoir dans le regard. Comme si son explication allait soudain me donner un élan d’amour pour elle et ce bébé. Malheureusement, je n’arrive pas à la comprendre, je ne veux pas la comprendre. Je nage en plein cauchemar et je veux juste me réveiller alors que mon monde est en train de s’écrouler. 

    Elle a eu huit mois pour s’habituer à l’idée d’avoir un bébé. Moi je viens de le découvrir depuis à peine cinq minutes alors elle ne peut pas s’attendre à ce que je saute de joie, non ?

    Je reste silencieux un moment, réfléchissant à ce que je vais lui répondre. Est-ce que je dois la repousser, lui dire de se débrouiller et faire comme si je n’étais pas au courant de l'existence de cet enfant ? 

    Je ne suis pas comme ça, maintenant que je sais, je dois assumer mes responsabilités, même si elle ne me laisse pas le choix, je ne peux pas faire comme si de rien n’était. Je prends une profonde inspiration avant de m’ébouriffer les cheveux. 

    — Très bien… je serais là pour vous. 

    Ma voix est lasse quand je reprends la parole. Aussitôt son visage se transforme, il s’illumine et moi je me sens encore plus mal. Je ne veux pas qu’elle imagine des choses, je ne ressens rien pour elle et même si je suis présent, il n’y aura jamais plus rien entre nous.

    — Drake, c’est…

    — Je ne t’épouserais pas Aim… jamais.

    Je l’interromps avant qu’elle ne commence à préparer notre faire part de mariage. Sa réaction ne se fait pas attendre, elle ouvre la bouche, elle se redresse prête à poser une multitude de questions et surtout à tenter de me convaincre. Je lève la main pour l’empêcher de parler et je me frotte le front pour essayer de faire disparaître le mal de tête qui commence à s'installer. 

    — J’ai besoin de temps pour digérer tout ça. Je dois en parler à mes parents et… je te rappellerai d’accord.

    Je lui fais un pâle sourire avant de lui tourner le dos et de m’en aller. J’ai l’impression de flotter et d’être lourd en même temps. Je ressemble à un zombie alors que je pousse le portail de mon jardin. Je lève les yeux rapidement quand je le referme et je peux voir qu’elle n’a pas bougé d’un pouce. Je soupire avant de traverser mon jardin, j’accélère le pas car plus que jamais, j’ai besoin de prendre Frank dans mes bras.

     

    J’ouvre la porte de ma chambre le cœur serré, je ne sais pas comment on va survivre à tout ça, mais j’ai confiance en nous. Oui, il va falloir compter un enfant dans l’équation, mais je ne veux pas le perdre. Frank est assis au bord de mon lit, la tête basse, il joue nerveusement avec ses doigts en se mordillant la lèvre inférieure. Il m’attend même s'il semble déjà résigné sur ce que je vais lui annoncer.

    Je m'approche de lui sans un mot et m'assois à ses côtés. Je ne sais pas comment je peux le rassurer alors que je suis moi-même en train de paniquer. Je me contente donc de lui prendre la main, d'entrelacer nos doigts et de la serrer doucement pour lui montrer ma présence à ses côtés.

    — Je ne te quitterai pas Frank. 

    C’est tout ce que je peux lui dire en murmurant. J’aimerais le rassurer, lui dire que l'enfant est celui d'un autre. Je pourrais faire une plaisanterie et dire que ça ne me concerne pas, mais ce n'est pas le cas. Il me connaît, il sait que je ne vais pas fuir mes responsabilités, d’ailleurs il me détesterait sûrement si je le faisais.

    — Tu n'auras peut-être pas le choix... 

    Je me crispe quand sa voix terne et triste s’élève. Je n'en peux plus alors que de secondes en secondes, la distance qui nous sépare semble devenir de plus en plus grande. Je le saisis par les épaules et le force à me faire face. On se regarde dans les yeux et je n'ai jamais été aussi déterminé de toute ma vie.

    — Je t'aime, il n’y a que toi que je veux à mes côtés. Jamais je ne l'épouserai, tu m’entends ? 

    Je passe rapidement ma langue sur mes lèvres sèches avant de continuer, car j’ai l’impression que si je ne lui dis pas clairement, les choses vont aller de pire en pire. 

    — Je dois assumer, mais tu seras toujours mon petit ami et l’être le plus important de ma vie. 

    Son regard se voile et je peux lire la peur dans son regard. La culpabilité me submerge et je l'attire à moi, le serrant aussi fort que possible pour tenter de le rassurer. Je respire plus facilement quand il répond à mon étreinte. 

    On reste un long moment juste comme ça dans les bras l’un de l’autre, cherchant à trouver de la force pour affronter les obstacles qui se dressent devant nous. Finalement on se recule, en se regardant droit dans les yeux. 

    Je pose mes mains sur ses joues et je l’embrasse amoureusement. Je veux le rassurer à travers ce baiser qui est aussi tendre que possible et aucun de nous ne cherche à l’approfondir et le rendre plus intense.

    — Tu préfères rester là ce soir ? 

    Sa voix est un peu moins triste, mais je n’aime toujours pas la résignation que je trouve sur son visage. Il me pose la question, mais il semble déjà certain que je vais l’abandonner et le laisser seul. Je prends une profonde inspiration et je me fais la promesse de lui prouver chaque jour que c’est lui que je choisis, que j’aime et avec qui je veux être.

    — J’ai besoin d’être avec toi. Je ne veux pas que tu t'éloignes de moi.

    Je lui fais un petit sourire tendre en répondant d’une voix qui ne me ressemble pas vraiment. Il retrouve un peu le sourire et je me lève alors pour préparer rapidement mes affaires. Au final, même si on a été un peu mal à l’aise et un peu ailleurs au début, on a passé une bonne soirée, simplement dans les bras l’un de l’autre. Se serrant et s’embrassant quand le stress et la peur de perdre l’autre devenaient parfois trop forts. 

    On n’a pas fait l’amour, on s’est contenté de se coucher, Frank a posé sa tête contre mon torse et je l’ai observé s’endormir alors que je caressais lentement son dos nu. Seulement, moi je ne dors pas, je regarde le plafond et les paroles de Aim résonnent encore et encore dans ma tête. 

    Je suis tourné sur le côté, j’ai le cœur qui bat à mille à l’heure alors que la réalité vient me frapper de plein fouet. Je vais avoir un enfant, je vais être papa et rien ne pourra empêcher ça. Je me mords la lèvre pour ne pas craquer pour ne pas laisser la peur et l’angoisse me submerger. 

    Seulement, je perds cette bataille et je tente de faire le moins de bruit possible. Je ne veux pas que Frank se réveille et me voit faible, je dois être fort pour nous deux, je ne peux pas lui laisser penser que je ne suis pas confiant dans notre avenir. S’il me voit m’effrondrer alors ses peurs reviendront plus fortes encore et…

    Un bras s’enroule autour de ma taille, un torse chaud se colle à mon dos et je sens des lèvres se coller contre ma nuque et alors je craque complètement. Les émotions que je gardais sous clé depuis la fin d’après-midi se déversent à travers des larmes et de longs sanglots. 

    — Tout va bien se passer, mon coeur. Je t’aime et à deux on y arrivera, je serai près de toi pour toujours, je te le promets.

    La voix de Frank se fait douce à mon oreille et il me serre contre lui, m’apportant du réconfort et me rassurant sur notre histoire. Finalement, on s’endort comme ça, dans les bras l’un de l’autre, les sourcils froncés par l’angoisse de l’avenir et un petit sourire aux lèvres de savoir que l’on ne sera pas seul pour l’affronter.



  • Commentaires

    2
    Vendredi 4 Mars 2022 à 19:27

    Et voilà une lourde épreuve les attends......J'espère qu'ils pourront la surmonter...

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    Mercredi 19 Janvier 2022 à 23:52

    Je ne l'avais pas vu venir celle-là ^^ Mais vu le nom de la fille, je n'ai pu m'empêcher de penser à celle de Lovesick et de me dire que c'est sûrement le même genre de c******* he

    Merci pr ce nouveau chapitre, bises 

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