• Chapitre 14

    Chapitre 14
    Mork

     

    Parce que Tawan m'a dit plus tôt.

    Qu'il voulait que quelqu'un lui demande "Es-tu épuisé ?"

    C'est pourquoi j'ai attendu ici pour être ce quelqu'un pour lui.

    Ce doit être l'une des rares choses que je peux faire.

    Qui peut le rendre heureux et qui peut aussi me rendre heureux.

    De ma simple place, ma position...

    La position qui ne correspond pas à sa personne spéciale.

    Je ne sais pas si c'est une coïncidence, mais le même jour, deux personnes m'ont éclairé sur le même sujet. La première est le docteur Aim (que je n'ai jamais rencontré, j'ai seulement lu son article dans ce livre) qui m'a appris ce qu'il faut faire quand on est pris dans un amour unilatéral. Ensuite, c'est Tawan qui m'a appris ce qu'il faut faire si nous n'avons pas de place, pas de but.

    À première vue, ces deux choses peuvent sembler sans rapport l'une avec l'autre. Mais elles ont résolu une interrogation dans mon esprit. Que faire si nous vivons un amour à sens unique, et que nous ne sommes pas dans le cœur de la personne ? Nous pouvons toujours la rendre heureuse et, entre-temps, nous rendre également heureux.

    En même temps, si nous ne sommes pas satisfaits de notre place ou de notre position actuelle, n'y faisons pas attention. Mieux vaut passer du temps à réfléchir à ce que nous pouvons faire depuis cette position. S'il y a quelque chose que nous pouvons faire, mais que nous ne faisons pas, alors c'est regrettable.

    Après avoir déposé Tawan devant l'hôpital, je l'ai regardé se précipiter et disparaître dans la salle des urgences, laissant une traînée de poussière derrière lui. Au début, j'ai pensé rentrer chez moi car la journée avait été longue. Normalement, un jour férié comme celui-ci, si je n'ai pas de travail, je fais une longue sieste dans l'après-midi. Aujourd'hui, j'ai plutôt choisi d'aller dans une librairie et j'ai rencontré Tawan par hasard. Ensuite, nous avons passé du temps ensemble jusqu'à tard dans la nuit et maintenant je réalise soudainement que mon corps est fatigué et las, il a besoin de se reposer.

    Je lève la béquille de ma moto et me prépare à démarrer le moteur.

    .....C'est vrai, même moi je me sens épuisé.

    Si épuisé que je veux rentrer directement à la maison pour dormir.

    Si je suis aussi épuisé, alors qu'en est-il de Tawan ?

    Tout à l'heure, il m'a dit qu'il y avait eu un accident de masse ou quelque chose comme ça et que les urgences étaient bondées, alors il a dû aller aider ses collègues. En se précipitant là-dedans, il s'est dirigé vers des vagues de troubles chaotiques qui l'attendent. Et personne ne sait combien d'heures cela va prendre. Je pense que Tawan doit être également épuisé.

    Alors que je suis sur le point de rentrer chez moi, lui, en revanche, court dans l'hôpital pour sauver la vie d'autres personnes. Il court vers plus d'épuisement, même si le travail d'aujourd'hui ne relève pas de son devoir ou de sa responsabilité. Je me souviens de son visage lorsqu'il a répondu au téléphone. Il était plein de détermination. Il n'a pas perdu une seconde à réfléchir, mais a immédiatement dit oui au téléphone et m'a demandé de le conduire à l'hôpital.

    Normalement, Tawan se plaint d'avoir peur quand j'accélère, mais aujourd'hui il ne l'a pas fait. Il m'a dit d'aller plus vite, alors que sa main s'est crispée sur mon épaule, apparemment par peur... Peut-être que les médecins ne deviennent pas des médecins juste par leur formation. Je sens que l'existence de Tawan en tant que médecin va au-delà de ses compétences et de ses connaissances.

    Je ne sais pas, je ne suis pas doué pour expliquer et je n'arrive pas à transmettre verbalement l'image que j'ai. Tawan est de ceux qui, lorsqu'il est là, me réchauffent le cœur et me donnent envie de les respecter en même temps. Malgré son épuisement et le fait qu'il ne soit pas de service, il y a quelque chose en lui qui le pousse à courir aux urgences, je suppose que c'est ce qu'on appelle "la vocation du médecin".

    Je comprends pourquoi il veut que quelqu'un lui demande "es-tu épuisé ?" à la fin de la journée, quand il a enfin terminé son travail.

    Parce qu'il doit supporter l'épuisement tous les jours au travail. En y réfléchissant, peut-être qu'un mototaxi comme moi ne pourra jamais comprendre la réelle étendue de son épuisement.

    Même si je ne peux pas comprendre, ça ne veut pas dire que je ne peux pas avoir de la compassion pour lui. Cela ne veut pas dire non plus que je ne peux pas aider à soulager son épuisement... Je décide de ne pas démarrer mon moteur et j'appuie de nouveau sur la béquille avec mon pied. Je sors mon téléphone portable et j'appelle Ar.

    "Mork ! Où diable étais-tu passé ? Il est tard et tu n'es pas encore rentré."

    Dès qu'il répond au téléphone, il me crie dessus ardemment. Je dis qu'il est plus mère poule que ma propre mère. Chez moi, à Chumphon, quand j'étais enfant, il m'arrivait de rentrer si tard ou presque à l'aube, et maman ne me grondait jamais.

    "Wouah ! Ar Dej, calme-toi. Je suis allé à une foire de Loy Krathong."

    "Heck, tu n'y es jamais allé, qu'est-ce qui t'a pris d'y aller cette année ?"

    Oh.....il marque un point.

    "Hum...Doc voulait y aller alors j'y suis allé avec lui."

    "...Doc ? Le docteur Tawan que nous avons rencontré l'autre jour ?"

    "Oui, celui-là."

    "Et vous êtes... ?"

    Le ton de sa voix a changé après que je lui aie parlé de Tawan. Il ne termine même pas sa dernière question, mais je sais ce qu'il veut demander.

    "Je t'appelle pour te dire que je rentrerai un peu plus tard ce soir. Il a eu une urgence à l'hôpital et je compte l'attendre."

    "Pourquoi l'attends-tu ?"

    "Je ne sais pas, Ar."

    "Il t'a dit de le faire ?"

    "Non, il ne l'a pas fait, je veux juste attendre."

    Ar devient brièvement silencieux. Je sais qu'il utilise à la fois sa tolérance et sa prévenance pour ne pas me maudire. Bien que lui et Loong ne l'aient pas dit directement, tout montre qu'ils ne me soutiennent pas au sujet de Tawan. Ne vous méprenez pas. Quand ils m'ont parlé de leur passé, ce n'était pas pour m'encourager.

    J'ai l'impression que c'était en fait un avertissement.

    Pour me prévenir que tout le monde ne pouvait pas être aussi chanceux qu'eux.

    J'étais moine avant. J'ai appris qu'il y a quelque chose de plus qu'une simple coïncidence, pour deux personnes de pouvoir se rencontrer, de vivre ensemble et de partager des sentiments. C'est un mérite accumulé entre les deux. Pour continuer ensemble, il faut quelque chose que l'on a construit ensemble. Les gens ont beaucoup plus de chances de se croiser que de rester ensemble. S'il existe une sorte de lien qui peut les relier l'un à l'autre, ce doit être les mérites accumulés et le destin.

    Tout le monde n'a pas ça.

    Pour être exact, je veux dire le Docteur Tawan et moi.

    L'histoire entre Ar et Loong est leur propre histoire.

    Elle ne peut pas être évaluée selon les mêmes critères que Tawan et moi.

    Je pense que c'est ce que Loong voulait me faire comprendre quand il m'a raconté son passé ce jour-là.

    Bon, je sais comment ça va finir, mais alors quoi ? Le docteur Aim et Tawan m'ont fait réaliser que quelle que soit notre position, nous pouvons créer du bonheur pour eux tout en trouvant notre propre bonheur. Et tant que nous ne sommes pas éloignés les uns des autres, nous devrions saisir l'opportunité de créer beaucoup de bonheur.

    Saisissez le jour heureux tant qu'il dure.

    Je me souris à moi-même pour avoir inventé cette devise intelligente.

    "Comme tu veux, alors."

    La courte réponse d'Ar résume ce qu'il ressent.

    "Merci, Ar. Tu peux fermer, j'ai les clés."

    "Bien... Fais attention à toi, d'accord ?"

    "Oui, monsieur."

    Puis, chacun de nous raccroche le téléphone.

    Pendant que Doc sauve des vies, je vais rester ici à l'attendre. Si je ne peux pas être la personne spéciale dans sa vie, alors, je serai la personne qui lui demandera "es-tu épuisé ?" quand il aura fini son travail.


    Parce que je sais qu'il sera heureux.

    Et son bonheur alimentera à son tour le moteur de mon propre bonheur.

    …………..

    "Wow, Mork, tu as attendu ici ou tu es rentré chez toi et tu es revenu ?"

    Il descend les escaliers de l'hôpital vers moi, son visage apparemment fatigué, mais avec un sourire.

    "Je t'ai attendu ici, je ne suis pas rentré chez moi. Tu ne m'as pas répondu, doc, tu es épuisé ?"


    "Attends, quoi ? !" Tawan regarde sa montre. "Tu es resté ici pendant plus de trois heures ? Pourquoi as-tu attendu ici ?"

    Je hausse les épaules. "Je ne savais pas quoi faire d'autre, doc. En plus, tu l'as dit toi-même, tu veux que quelqu'un te demande 'es-tu épuisé ?' après le travail. Et il se trouve que j'étais libre, alors j'ai attendu."

    J'essaie d'avoir l'air décontracté, de garder un ton neutre, comme quand on parle à "un ami", de peur que mes sentiments ne transparaissent dans ma voix et que ça puisse... Je ne sais pas, lui donner la chair de poule ? J'essaie de la jouer cool et de donner l'impression que c'est une chose normale à faire pour un ami.

    "Yep, je suis épuisé." Il répond enfin à ma question. Malgré cela, il me regarde et élargit son sourire. "Mais je me sens beaucoup mieux maintenant, merci beaucoup, Mork."


    "Quand tu veux, doc. Tu retournes au dortoir maintenant ? Je te raccompagne, ou tu peux monter sur ma moto." Je ne suis pas sûr qu'on ait le droit de conduire une moto dans un hôpital.

    Tawan secoue la tête en faisant la moue. "Non, j'ai de nouveau faim. Tu veux qu'on trouve quelque chose à manger ensemble ?"

    N'attendant pas qu'il demande à nouveau, je donne un coup de pied à ma béquille tout en lui tendant un casque. "Monte, doc. Je vais t'emmener dans un resto nocturne près d'ici."

    "Hmmmm ? Ce ne sont pas des piqûres de moustiques ?"

    Il me montre du doigt mes mains et mes bras et je réalise que j'ai quatre ou cinq bosses rouges, en effet.

    "Ouais, je suppose. Maintenant que tu le demandes, ça me démange tout d'un coup !" Je tends la main pour gratter un bouton, mais il la repousse.

    "Ne te gratte pas !"

    "Mais ça me démange, doc."

    "Je te donnerai une pommade plus tard. Ne te gratte pas, ça va rougir."

    "D'accord, d'accord, doc. Je ne le ferai pas."

    Je capitule même si j'ai vraiment envie de me gratter. Les piqûres d'insectes sont bizarres, quand on ne remarque pas la bosse, tout va bien. Mais dès qu'on la remarque, ça démange énormément. Je me demande s'il y a un mécanisme spécial qui fait que la vue affecte l'envie de se gratter.

    Tawan met le casque et monte derrière moi, une main sur mon épaule et l'autre sur la barre d'appui arrière, comme d'habitude. Je démarre le moteur et me tourne vers lui pour lui parler.

    "Doc, tu peux t'accrocher à ma taille. Ça semble difficile pour toi."

    "Eh ?" Il lève un sourcil vers moi. "Tu ne m'as pas dit que tu n'aimais pas ça parce que tu es chatouilleux."

    Je ricane. "C'est bon maintenant, doc. Le trajet va être plus long que d'habitude, si tu t'accroches à moi comme ça, tes bras vont être fatigués. Passe plutôt tes bras autour de ma taille. Je ne conduirai pas vite. Et ne me serre pas trop fort, ou ça va chatouiller."

    Une de ses mains glisse de mon épaule vers le bas pour saisir un côté de ma taille, tandis que l'autre main lâche la barre pour saisir l'autre côté. Je peux sentir qu'il tient à peine les deux côtés de ma taille, de peur que ça me chatouille.

    "Pfff ! Doc." Je tire ses deux mains et les repositionne pour que ses bras s'enroulent autour de ma taille. "Tiens-toi à ma taille avec tes bras comme ça. Et attache tes mains ensemble comme ça."

    "Bah, mais alors, mon visage est écrasé contre ton dos, beurk, tu pues la sueur."

    "On ne peut rien y faire. Blâme tes bras d'être trop courts, bahaha ! "

    Même s'il dit que je pue, il garde ses bras autour de ma taille et pose son visage sur mon dos. La sensation de sa joue pressée contre mon dos est juste... J'aimerais que le temps s'arrête ici.

    "Tu sais, c'est la première fois que je monte derrière quelqu'un avec mes bras autour de sa taille comme ça." dit Tawan.

    "C'est aussi la première fois que je laisse quelqu'un mettre ses bras autour de ma taille sur une moto". Ok, accroche-toi bien, je démarre, doc, ou on n'aura jamais de nourriture."

    Je passe la vitesse et accélère.

    "Où est-ce qu'on va ? Tu as dit que c'était un long trajet."

    Je rigole. "Un restaurant qui reste ouvert jusqu'à l'aube. Un peu loin mais je te garantis que la nourriture est bonne."

    "Si c'est loin et que la nourriture n'est pas bonne, tu vas avoir des problèmes !" Il me menace.

    Je n'ai rien à répondre à cela, je souhaite simplement que ce soit encore plus loin, pour qu'il ait besoin de continuer à me serrer comme ça pendant longtemps.

    ………..

    "Lequel est le plus délicieux ?" demande Tawan en feuilletant le menu du restaurant de riz bouilli.

    "Tout est délicieux, doc. Commande ce que tu veux. Cette tante est réputée pour faire d'excellents plats sautés. Tu n'as qu'à le commander et elle te servira à peu près n'importe quoi. Elle fait toutes sortes de plats sautés."

    "Elle a des moustaches de tortue et des cornes de lapin 1 ?"

    Il a l'air espiègle et se penche, son visage se rapprochant beaucoup du mien.

    Je recule un peu. Même s'il a serré ma taille et posé son visage contre mon dos tout le long du chemin, je ne suis pas habitué à voir son visage de si près. J'ai peur que mon coeur explose.

    "N... nah, elle n'en a pas. Doc, commande quelque chose qui puisse exister."

    J'évite le contact visuel. Je suis content d'avoir la peau bronzée, sinon il aurait remarqué que je rougis.

    "Oh wow, ils ont de l'ormeau au menu. C'est vraiment un restaurant de rue ? Pourquoi c'est si chic?"

    "Je te l'ai dit, elle a à peu près tous les ingrédients."

    Il ferme le menu. "Du porc grillé et des œufs frits, s'il vous plaît. Avec du riz à la vapeur."

    Je me tourne pour passer ma commande aussi. "Deux portions en tout, s'il vous plaît."

    "Je pensais que tu allais prendre l'ormeau."

    "Non, je n'ai jamais essayé ça et je ne sais pas quel goût ça a. Je ne veux pas risquer de prendre quelque chose qui ne serait pas bon."

    Je rigole. "C'est cher, comment ça peut ne pas être bon, doc ?"

    "Ce n'est pas toujours vrai. Tout ce qui est cher n'est pas forcément bon." Et il tapote ses doigts sur la table en remuant les sourcils. "Mais le porc grillé sera toujours délicieux, hahaha."

    "Tu sembles peu exigeant, doc."

    "Évidemment, je suis l'enfant du milieu."

    Je fronce les sourcils. "Pourquoi le fait d'être l'enfant du milieu a quelque chose à voir avec ça ?"

    "Eh bien, les parents accordent généralement plus d'attention à leurs enfants les plus âgés et les plus jeunes. Je suis l'enfant du milieu, donc je dois être facile à vivre. Je dois garder de la nourriture pour mon grand frère et en donner pour mon petit frère, alors je mange juste ce qui reste."

    "Tu as rendu ça pitoyable." J'essaie de l'imaginer... Je n'ai jamais été un enfant du milieu, donc je ne suis pas sûr que ce genre de sentiment puisse être réel, le sentiment d'être un enfant du milieu.

    "Ce n'était pas si misérable, tu sais." Il tire la langue. "Disons juste que ma famille est bien. Et je ne suis pas difficile en matière de nourriture. Les docteurs ne sont pas difficiles en matière de nourriture. On mange n'importe quoi, pour survivre."

    Maintenant c'est à son tour de me demander.

    "Et toi, Mork ? Tu as des frères et soeurs ?"

    "J'ai un frère aîné, qui a deux ans de plus que moi. Il travaille à Bangkok."

    J'omets la partie sur nos problèmes familiaux et lui en dis juste assez pour qu'il acquiesce. En fait, il y a un petit désaccord entre mon frère et nous - maman et moi. Mais ouais, je n'ai pas besoin de lui dire ça.

    Deux plats de porc grillé et d'œufs frits, garnis d'un tas d'oignons verts émincés, sur du riz à la vapeur, sont posés devant nous. Les yeux de Doc s'écarquillent en voyant la nourriture. Il met la première cuillerée dans sa bouche et mâche, les yeux fermés béatement. Je ris intérieurement. Parfois, il a l'air si mature qu'il m'intimide. Parfois, il a l'air si enfantin que j'ai envie de lui caresser la tête.

    "Comment est la nourriture, doc ?"

    "Tellement délicieux !" Il prend une autre cuillerée. "Je ne savais pas qu'il y avait un tel endroit avec de la bonne nourriture ici."

    "Alors, reste en contact avec moi. Je connais beaucoup d'endroits où l'on mange bien."

    "Merveilleux." Il avale rapidement la troisième, la quatrième et la cinquième cuillerée dans sa bouche. Sa vitesse est stupéfiante, même pour un mototaxi comme moi. Il mange plus vite que moi. Plus de la moitié de sa nourriture est déjà partie.

    "Je mange rarement ce genre de nourriture. La plupart du temps, je mange près de l'hôpital ou de la résidence. Je n'ai jamais mangé aussi loin." Il prend son verre et boit une gorgée d'eau. "P'Por n'aime pas s'éloigner. Il préfère commander une livraison par téléphone."

    J'acquiesce parce que je ne sais pas quoi dire. Mieux vaut éviter de parler de son petit ami. "Oh, doc, tu m'as dit que tu avais des frères. Où sont-ils maintenant ?" Je me demande, puisque son petit ami est absent, pourquoi il ne rentre pas chez lui pour les vacances.

    "Mon grand frère est parti à l'étranger pour une conférence et mon petit frère est interne, il travaille actuellement hors de la ville. Nous sommes tous trois médecins. Mes parents sont également allés rendre visite à mon petit frère." Il met la dernière partie de sa nourriture dans sa bouche, alors que mon assiette est à peine à moitié mangée. Comment peut-il manger aussi vite avec une si petite bouche ?

    "Quelle famille impressionnante !"

    Je continue à manger. En fait, je n'ai pas tellement faim, je voulais juste lui tenir compagnie. Mais puisque j'ai déjà commandé de la nourriture, je devrais la finir.

    "Merci, Mork."

    "Mmm, ne me remercie pas. Ce n'était pas un compliment. C'est la vérité. Toute la fratrie est médecin, c'est vraiment quelque chose."

    "Non, je ne t'ai pas remercié pour ça."

    "Oh, tu m'as remercié pour quoi, alors ?"

    "Je te remercie pour. ...m'avoir libéré de l'épuisement et de la solitude aujourd'hui."

    Et puis, il sourit. Ce genre de sourire, oh, ce que je ne donnerais pas pour le voir au réveil chaque matin. J'essaie de garder un visage impassible et de ne pas sourire en retour..... mais c'est vraiment difficile. Les coins de ma bouche essaient de se soulever pour imiter son sourire. Finalement, son sourire est contagieux et mon visage en a un aussi.

    Je lui renvoie son sourire tout en tendant la main pour essuyer un grain de riz d'un coin de ses lèvres.

    "Bahh doc, tu manges aussi mal qu’un enfant."

    "Merci encore. Haha."

    Il rit timidement.

    Je me dépêche de finir ma nourriture.

    "Allons-y, docteur. Je te déposerai à l'hôpital."

    "Mais je n'ai même pas encore sommeil, Mork." Il se plaint.

    " Non non, tu as besoin de te reposer, doc. Juste au cas où tu aurais besoin d'énergie pour gérer les urgences demain."

    Pour être honnête, j'ai envie de rester avec lui plus longtemps et je ne veux pas le raccompagner tout de suite. Mais si je l'aime et que je tiens à lui, c'est ce que je devrais faire, et non continuer à exploiter l'occasion de me faire plaisir sans me soucier de son bien-être.

    "Oh, hé. Aujourd'hui, nous avons eu deux repas ensemble."

    Dit Tawan en me suivant jusqu'à ma moto.

    "Et tu as aimé ça?" Je me retourne pour demander et lui tendre le casque.

    "Uh-huh, ça m'a plu. Hoy Tord était super. Ce restaurant de nuit, aussi."

    "Eh bien, la prochaine fois, quand tu seras libre, je pourrai t'emmener faire un tour. Je connais plein d'autres endroits avec de la bonne nourriture."

    "Hey, je te prends au mot, Mork. Je vais te traîner partout avec moi"

    "Et je te prends aux tiens, doc. Ok, grimpe."

    Il baille un peu en mettant le casque.

    Je rigole. "Quelqu'un a dit qu'il n'avait pas sommeil."

    Il se tourne pour me regarder d'un air moqueur. "C'est juste un bâillement."

    Sur le chemin du retour, il passe ses bras autour de ma taille sans avoir besoin d'une instruction de ma part. Quand il pose sa joue contre mon dos, je peux sentir les doux frôlements de sa lente respiration. Oh, s'est-il secrètement endormi ? Je conduis plus lentement et fixe une main sur les siennes posées sur ma taille, par précaution, au cas où il s'endormirait. Je ne veux pas qu'il tombe du siège.

    Il est presque 2 heures du matin, presque deux heures de ce nouveau jour. Le matin va bientôt arriver, mettant fin à la nuit du jour de Loy Krathong. Mais même après la fin de cette année, je me souviendrai longtemps de cette nuit, car ce fut un Loy Krathong vraiment heureux pour moi.

    ………

     

    Lorsque j'ai été ordonné, mon mentor, un moine âgé, m'a enseigné "ne t'attache pas au bonheur" car il n'est pas éternel. Le bonheur d'aujourd'hui peut conduire à la souffrance demain. Si cela doit arriver, laissons-le venir et laissons-le passer, nous devons simplement le reconnaître.

    C'est ce qui m'arrive aujourd'hui.

    Durant mon travail à la station, je me dis que si je suis libre le soir, j'enverrai un message à Doc pour lui dire que je suis partant s'il veut qu'on aille manger quelque chose de délicieux ensemble. Mais à peine ai-je terminé ma pensée que je vois la voiture de M. Por entrer sur la place de parking du 7-Eleven au croisement du début de notre rue.

    Je suppose qu'il vient juste de revenir de chercher Doc, et que c'est le moment de se retirer pour un outsider comme moi. Je suis en train de me calmer et d'annuler mentalement le plan de soirée quand je remarque que la personne qui descend de la voiture avec M. Por n'est pas Tawan. C'est quelqu'un d'autre que je n'ai jamais vu auparavant.

    "Mork, pourquoi diable regardes-tu cette voiture ?"

    Demande P'Fueang.

    "Ce type, c'est le petit ami de Tawan."

    Je réponds, mes yeux toujours fixés sur les deux gars qui sont maintenant entrés dans le 7-Eleven.

    "Oh..... ton ami qui est médecin, c'est ça ?" P'Fueang suit mon regard. "Le type à côté de lui, c'est ton ami ? Il ne me dit rien."

    "Non, ce n'est pas lui. Il est avec quelqu'un d'autre qui n'est pas Tawan."

    "Alors, peut-être que c'est juste son ami. Ne mettons pas notre nez dans les affaires des autres."

    Je suis sur le point d'être convaincu que son observation est juste, mais ils sortent du magasin et je remarque qu'ils se tiennent la main. Mr. Por se penche aussi pour embrasser le front du gars avant de monter dans la voiture.

    "Merde. Je crois qu'ils ne sont pas juste des amis."

    P'Fueang marmonne à voix basse, ses yeux suivant toujours la même cible que les miens.

    En fait, je n'ai pas besoin d'entendre son commentaire.

    Parce que je pense exactement la même chose...

    …….

    Je sais que je ne devrais pas. Je sais que ce ne sont pas mes affaires.

    Pourtant... mon petit cul (excusez mon langage) ne peut s'empêcher de s'en mêler. Je gare ma moto, attendant devant la résidence de Mr. Por. Je veux savoir s'il va partir et quand, ou s'il va rester pour la nuit. Je sais que ça semble absurde, mais ne faisons-nous pas tous des choses absurdes parfois ?

    A cinq heures et demie, cet inconnu sort de la résidence. Il fait signe à un taxi et part en toute hâte. Je reconnais très bien son visage, mais ce n'est pas nécessaire, car le dénommé Por est là. Il raccompagne l'autre homme, l'escorte jusqu'au taxi avec une attitude qui les fait ressembler à... je ne veux pas dire le mot, mais ils ont l'air... amoureux.

    Oh, ils en ont vraiment l’air. Mr. Por congédie cet homme avec un regard si affectueux. Je serre les poings, me sentant soudain envahi par une rage d'origine inconnue. Sans réfléchir, je prends mon téléphone et envoie un message à Tawan.

    "Hey, doc. Qu'est-ce que tu fais ? Tu rentres à la résidence ? Je peux venir te chercher."

    En moins d'une minute, il répond.

    "Euh, pas encore. Il n'est pas rentré.

    Je ne peux pas entrer de toute façon. Journée au dortoir pour moi, je pense.

    Donc, apparemment, Tawan ne sait pas que Por est rentré, et je parie que Por ne lui a pas dit qu'il était déjà revenu à l'appartement. Il n'y a pas d'autre explication, il trompe clairement Tawan.

    "Ton petit ami a amené quelqu'un d'autre à l'appartement."

    C'est ce que je veux taper. Mais... mes doigts survolent l'écran. Une autre partie de mon esprit m'arrête, disant "Que diable penses-tu obtenir de ça ? Tu crois que détruire leur relation va le pousser à t'aimer à la place ?"

    "Mais c'est la bonne chose à faire, non ? Si je découvre qu'un ami est trompé, je devrais le lui dire. Je débats avec ma petite voix intérieure.

    "Pfft hahaha ! Tu es sûr ?" Je l'entends se moquer de moi en retour. Si tu es un véritable ami, ne devrais-tu pas rester en dehors de ses affaires personnelles ? Ce sont des amants. C'est leur propre problème. Laisse tomber, mec. Tu es un outsider."

    Bip…

    Pendant que les deux voix débattent l'une contre l'autre dans ma tête, Tawan m'envoie un message.

    "Quoi de neuf, Mork ?

    Tu veux aller dîner ?"

    "Nah, rien, doc. Je voulais juste dire bonjour.

    Aujourd'hui, je dois travailler jusqu'à tard dans la nuit. A plus tard."

    J'ai trop peur de tout déballer si je le rencontre aujourd'hui. Tant que je ne sais pas encore ce que je dois faire en tant qu'ami de Tawan, je ne devrais pas le voir. Au moins, ça m'évitera de déraper. Franchement, je me fiche de la relation entre Tawan et le gars nommé Por.

    Je m'inquiète des sentiments de Tawan.

    Je me rappelle le moment où j'ai appris pour Fern et son autre petit ami. Qu'on les aime beaucoup ou peu, et qu'on ait quelqu'un pour nous réconforter ou non, la douleur d'une trahison de l'être aimé fait mal. Elle ne fait pas mal comme une éraflure d'un accident de moto ou une coupure d'un couteau de cuisine. Ça fait mal comme une douleur que vous ne pouvez même pas expliquer. Elle commence par une douleur mineure et engourdissante et se transforme en une douleur sévère.

    Je ne sais pas si je dois être celui qui appuie sur la gâchette de cette douleur.

    Je ne sais pas si j'ai le droit de révéler le secret au docteur.

    Je ne suis pas sûr... de pouvoir porter la responsabilité si je suis celui qui détruit leur relation.

    Je ne suis pas sûr.

    Je ne suis sûr de rien du tout.

    ………..

     

    "P'Mek...

    Je suis l'un de vos fans secrets."

    Euh... attends, ce ne sera plus un fan secret une fois que j'aurai envoyé ce foutu message privé dans sa boîte de réception, non ? Nan, pas génial. Pourquoi est-ce que j'utilise le mot "secret" ? Je dois l'effacer.

    "P'Mek

    Je viens de commencer à lire votre page."

    Hum...ok. C'est une meilleure introduction.

    "J'ai besoin de votre avis sur quelque chose. J'ai un ami et il a un petit ami. Mais l'autre jour, j'ai vu son petit ami avec quelqu'un d'autre. Je suis trop paresseux pour expliquer ça en détail, mais il est évident qu'il sort en cachette avec quelqu'un d'autre. Devrais-je en parler à mon ami ?"

    Une fois le message terminé, je le relis pour m'assurer que je n'en révèle pas trop et que je n'ai pas mentionné mon nom ou celui du docteur Tawan. Dans un moment pareil, la seule personne vers qui je peux me tourner est P'Mek.

    Ce n'est pas que je ne crois pas aux conseils de Loong et d'Ar, mais ils ont rencontré Tawan et ils savent tout de lui et de moi. Ils savent aussi ce que je ressens envers Doc. Je veux des conseils de quelqu'un qui est vraiment extérieur et qui n'a aucune information sur ce qui s'est passé plus tôt. Plus important encore, P'Mek m'a aidé (sans le savoir) à résoudre plusieurs de mes problèmes auparavant. Je pense qu'il aura de bons conseils pour moi.

    Je vais devoir attendre, je suppose. Je me lève, me préparant à éteindre les lumières et à aller me coucher, mais un message de notification retentit avant.

    "Hé, mon pote,

    Je ne vais pas te dire si tu dois le faire ou non.

    Permets-moi juste de te demander ce que tu obtiendras en le faisant ? "

    Si cela lui permet de devenir ton petit ami, et que tu en tires profit, alors fais-le ! Mais d'abord, tu dois être absolument sûr que ce sera le résultat, et que tu peux prendre soin de lui, qu'il peut t'aimer à sa place.

    Mais si tu as simplement envie de le faire sans être capable de répondre à ce qui va se passer, alors fais attention ! Je te préviens, ça va se retourner contre toi et t'exploser à la figure.

    On ne peut jamais savoir à quel point ils s'aiment. Parfois, pour les partenaires, le pardon a plus de poids que l'amour lui-même. Et s'ils se pardonnent l'un l'autre ? Que se passera-t-il pour toi ? Réfléchis bien à ça. Sais-tu ce que signifie l'expression "chien de garde" ?

    Je peux très bien comprendre ton sentiment de "c'est mal", mais tu n'es pas un juge. Tu ne peux pas condamner quelqu'un.

    Si tu penses que lui dire fait partie de ton plan pour le conquérir, alors essaie. Mais si tu ne sais toujours pas pourquoi tu le fais, si tu veux juste être la justice... reviens à la première partie de ce paragraphe. Tu n'es pas un juge.

    Ne sois pas surpris. J'ai souvent vu ça.

    Je sais que l'ami que tu as mentionné a plus de signification pour toi qu'un simple ami.

    S'il n'est vraiment qu'un simple ami, tu ne te débattrais pas au point de me demander conseil.

    Crois-moi. Je suis déjà passé par là."

    Nous ne pouvons jamais savoir... à quel point ils s'aiment...

    Rien que cette partie fait déjà assez mal à lire. Je ne sais pas à quel point Doc et ce Por s'aiment. Pour être précis, je ne sais pas à quel point Por aime Doc, mais je sais... je sais à quel point Doc aime ce type nommé Por.

    Je me souviens d'un jour durant la semaine précédant le jour de Loy Krathong. Il pleuvait ce soir-là et j'étais assis avec des gars plus âgés lors d'une pause pendant le service. Soudain, le docteur est apparu, trempé de la tête aux pieds. Il avait dû marcher sous la pluie depuis la station du métro aérien jusqu'au croisement de la rue.

    "Hé, Mork, emmène-moi à l'appartement, s'il te plaît."

    "Oh wow, doc, t'es tout trempé. Viens ici, attends sous le toit avec nous."

    Mais il a secoué la tête, refusant d'utiliser l'abri.

    " Peux-tu me ramener à l'appartement ? "

    J'ai regardé la pluie battante dehors. "Non, la pluie est trop forte, doc. C'est dangereux de conduire la moto maintenant. Attends qu'elle se calme. Regarde Doc, personne ici ne conduit. On attend que la pluie s'arrête."

    "C'est pas grave, alors. Je vais y aller à pied."

    Il s'est tourné pour partir sous la pluie, mais j'ai attrapé son bras.

    "Attends, tu n'as pas de parapluie ?"

    Il a secoué la tête. "Non, mais je veux me dépêcher de le rejoindre."

    J'ai emprunté un imperméable à P'Fueang et l'ai tendu à Tawan.

    "Tiens, mets-le, je vais te déposer."

    "Merci, Mork."

    "Pas de soucis, doc."

    D'accord.... donc, je sais à quel point il aime Mr. Por.

    Suffisamment pour que Doc fasse passer ce type avant lui-même.

    Ce que P'Mek a dit est vrai. Parfois, pour les partenaires, se pardonner l'un l'autre a plus de poids que l'amour lui-même. Si je le dis à Doc, et puis quoi ? Si je lui dis, au pire ils se disputeront pendant un jour ou deux. Puis, ils se réconcilieront, et recommenceront à s'aimer. Pendant que je deviendrai un chien de garde. Pire encore, si Por apprend que c'est moi qui l'ai dit à Doc, je deviendrai quelque chose d'encore plus hideux que le chien de garde.

    "Il n'y a pas moyen qu'il se tourne vers moi et pleure sur mon épaule quand il est triste. Il n'y a aucun moyen que je devienne sa personne spéciale..."

    Je me dis, bien qu'il m'ait souvent dit que je pouvais être plus qu'un chauffeur de mototaxi, là, à cet instant, je suis toujours un chauffeur de mototaxi. C'est un docteur avec un brillant avenir. Je n'ai rien à lui offrir à part ..... mes sentiments et mes bons soins. Même s'il est célibataire, un gars comme moi n'a pas le droit d'en rêver.


    Mais comme j'ai décidé de faire de mon mieux pour le rendre heureux en le soutenant de ma position, il est hors de question de lui dire la vérité. C'est peut-être la bonne chose à faire, mais cela lui apportera du chagrin. C'est contre mon intention initiale.

    J'ai eu ma réponse. Je ne le ferai pas.

    Je regarde l'heure, il est 23 heures.

    Je suis arrivé à ma conclusion. Il est temps d'aller se coucher pour de bon.

    Je me lève et éteins les lumières, puis je me jette sur le lit et ferme les yeux.

    Pendant ce temps, je dois me répéter que je dois juste le rendre heureux et que c'est suffisant.


    1 Un équivalent thaïlandais de la fourrure de tortue et des cornes de lapins. Une métaphore bouddhiste des choses qui n'existent pas ou qui sont hors de portée. Souvent utilisé en référence à une attente ou une demande déraisonnable ou impossible.



  • Commentaires

    5
    Dimanche 22 Mai 2022 à 09:47

    Merci  beaucoup

    4
    Jeudi 19 Mai 2022 à 13:32
    Merci beaucoup pour se chapitre
    3
    Mercredi 18 Mai 2022 à 21:24

    Je veux un Mork, il est tellement adorable :') 

    Merci pour ce nouveau chapitre, cette histoire est vraiment pleine de beaux sentiments ^.^ 

    A bientôt pour la suite, bises <3 

    • Voir les réponses
    2
    Mercredi 18 Mai 2022 à 19:20

    c'est vraiment bien écrit, et bien traduit, les sentiments qu'ils ressentent chacun de leurs côtés, les questions qu'ils se posent, les réponses cherchées et obtenues... bref, c'est un réel plaisir que d'en lire chaque chapitre

    merci pour la traduction =)

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